La jeunesse européenne, une génération perdue pour l’emploi ?

Semaine préparatoire des Etats Généraux de l’Europe : « Quel pacte pour les Jeunes européens » ? 5/5

, par Vladimir Pecheu

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La jeunesse européenne, une génération perdue pour l'emploi ?
Etats généraux de l’Europe http://www.etats-generaux.eu/

Tel était le titre de la conférence organisée conjointement par Notre Europe, les Jeunes Européens France, Confrontations Europe et Nouvelle Europe, dans le cadre des débats préparatoires des États généraux de l’Europe. Ce fut l’occasion pour Laurent Janneau, journaliste au magazine Alternatives Économiques, Frédéric Lerais, Directeur général de l’Institut de Recherches Économiques et Sociales et auteur d’un rapport sur les jeunes dans la crise, et Thiébaut Weber, Secrétaire confédéral CFDT chargé de l’action revendicative à destination de la jeunesse de discuter de la situation de la jeunesse européenne face à l’emploi aujourd’hui.

Dès les premiers instants, Mr. Janneau donnait le ton en évoquant le « parcours du combattant » marqué par la concurrence et l’anxiété, auquel les jeunes font face aujourd’hui. S’étendant en moyenne de l’entrée dans le supérieur – si elle a effectivement lieu – à la fin de la vingtaine, moment où la majorité des Européens décrochent un contrat stable, il a été d’autant plus exacerbé par la crise économique. Comme le soulignait Mr Lerais, en Espagne et en Grèce le taux de chômage des jeunes s’élève à quasiment 50% cette année avec un bond de plus de 20% depuis 2008, et ce ne sont pas les seuls pays qui affichent de telles tendances inquiétantes, la statistique pour l’ensemble de l’Union européenne étant de 21,3%.

Quel rôle, les institutions européennes pourraient donc jouer face à un tel constat ?

Telle était la question à l’honneur mercredi, mais peu de solutions ont été discutées du point de vue fédéral. De fait,dès que le sujet fut soulevé, Mr. Lerais – tout en insistant être un européen convaincu – y mettait un point, en mettant en avant la réticence des États membres à se voir contraints dans leurs politiques de l’emploi, et ce surtout par la Commission européenne, dont la popularité atteint des abimes. En lieu et place, ces derniers privilégieraient les « échanges de bonnes pratiques », mais qui n’aboutissent qu’à peu de résultats, à court terme du moins.

Alors, est-ce tout ? Divertissant ses citoyens avec ses programmes Erasmus, l’Europe ne pourrait rien plus faire pour eux une fois le diplôme obtenu. Effectivement, s’il est difficile de voir émerger à un horizon proche, une directive sur un salaire minimum et une fiscalité du travail européenne, ou alors des politiques d’indemnisation du chômage à l’échelle fédérale, l’Europe n’a pas besoin de s’imposer sur les États membres pour combler les brèches du marché du travail des jeunes.

Comme le notait M. Weber mercredi, il reste aujourd’hui 82 milliards d’euros inutilisés dans les fonds structurels européens 2007-2013 destinés aux projets menés par l’UE, ce qui offre amplement la possibilité d’une action autonome de l’Union. Ce sujet a en réalité été abordé au sommet européen du 31 janvier dernier, et le Conseil européen a conclu sur la mise en place de groupes de travail menés par la Commission dans les pays où les jeunes sont les plus touchés par le chômage.

Une ligne directrice : mobilité et action

La jeunesse est certainement la période de la vie où l’éventail des choix auxquels un individu fait face est le plus large, et où ses ambitions sont les plus grandes, mais c’est aussi le moment où les obstacles sont les plus nombreux. Pourtant il ne suffit parfois que d’un simple coup de pouce pour les franchir tous d’un seul bond. L’Union devrait prendre compte de cela, car en ciblant ses politiques vers les millions d’européens dont le talent se dissipe en désillusions, elle pourrait récolter de profondes réussites.

Considérons l’incroyable hétérogénéité qu’il existe en terme de chômage en Europe, partant des sommets abordés plus haut, aux 7.8% de l’Allemagne qui inquiètent le pays d’une surchauffe inflationniste. Si les jeunes européens pouvaient plus facilement décrocher un job au-delà de leur frontière – 6 jeunes Grecs sur 10 envisagent d’aller travailler dans un autre pays européen selon une enquête allemande – les taux de chômage chuteraient sur tout le continent. Et sans pour autant pénaliser les pays performants, car les effets d’un cycle vertueux de plus grande activité et de croissance dont tous les États bénéficieraient se mettraient alors en mouvement. En fait cette souplesse du déplacement des travailleurs est une condition pour un bon fonctionnement de notre zone monétaire, et sachant que traditionnellement l’ajustement sur le marché du travail se fait par les jeunes, quoi de mieux que d’agir sur la partie la plus flexible de la population pour y aboutir.

Pour cela plusieurs directions peuvent être considérées. La mise en place d’un contrat de travail européen garantirait plus de stabilité et de cohésion pour rendre l’embauche plus facile aux employés et aux entreprises. Celles-ci devraient aussi pouvoir faire parvenir leurs offres au plus grand nombre d’européens. A cet effet, l’Union a mis en place depuis 1994 le réseau Eures, qui a pour objectif d’inciter les services de recherche d’emploi des pays membres à collaborer, et propose une base d’offres à pourvoir sur l’ensemble du continent. Cependant, des mesures plus proactives et ciblées seraient bienvenues, comme un programme de formation insistant particulièrement sur la langue.

Enfin, l’Europe se distingue aussi franchement de ses partenaires anglo-saxons, par le peu de jeunes engagés dans entrepreneuriat. Certains mettent en avant une différence culturelle et une aversion au risque accrue, mais comme le pointait mercredi dernier Thiébaut Weber, c’est surtout un gâchis de talent. Cette faille offre une opportunité dont l’Union européenne doit se saisir et même inciter les citoyens des différents États à collaborer entre eux pour favoriser l’émergence d’un esprit européen en la matière.

Nombreux sont les économistes à s’accorder sur l’importance des PME en terme de création emplois, de croissance et de développement sur le long terme. De la même manière, les jeunes portent le futur du projet européen, et en s’adressant à eux, l’Union a l’occasion d’influencer son propre destin.

Cette conférence s’est tenue dans le cadre des débats préparatoires aux États généraux de l’Europe qui se tiendront le 10 mars. Pour plus d’informations : http://www.etats-generaux.eu/

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