Conseils européens de Juin et Juillet : la tension monte

, par Dominique Thaury

Conseils européens de Juin et Juillet : la tension monte
Conseil Européen du 16 juillet Crédit photographique : Conseil de l’Union Européenne

26 Juin – 16 juillet 2014 : 3 semaines qui vont marquer en Europe.

Les 26 et 27 juin, lors du Conseil européen, les chefs d’État et de gouvernements ont proposé Mr Juncker (tête de liste européenne du parti PPE, vainqueur des élections du 25 mai) comme président de la Commission européenne pour la période 2014/2019.

Nous ne pouvons que nous réjouir de voir le Conseil suivre l’esprit du Traité sur l’Union européenne (TUE) de 2008 (art 7 §7), mais aussi une motion de l’UEF Europe, qui avait fait un certain bruit, « choisissez votre candidat » (2008) et enfin la résolution sur le même thème votée en juillet 2013 par le Parlement Européen à une très large majorité.

C’est donc un « vieux » combat qui aboutit.

Le 16 juillet, c’est le Conseil Européen « extraordinaire » pour nommer le Haut représentant pour les Affaires étrangères et la sécurité, ainsi que le président du Conseil européen.

Dès le début du Conseil, les chefs d’État et de Gouvernement se rendent compte qu’ils sont dans l’incapacité de nommer quelqu’un à ces 2 postes dans la mesure où la Commission n’est pas nommée et où certains équilibres doivent être trouvés à partir de cette nomination.

Mr Juncker, élu largement le 15 juillet par le Parlement européen comme président de Commission, en a profité pour indiquer, fermement au Conseil que les désignations de tous les commissaires sont sous sa responsabilité (TUE, art 17 §6), à l’exception du Haut Représentant, où il partage la responsabilité avec le Conseil (TUE, art 18 §1).

En gros : aux États de proposer des noms (puisque nous en sommes malheureusement encore à la règle : 1 pays = 1 commissaire), Mr Juncker se chargera de les mette au bon endroit…

Ceci n’empêchera certainement pas tout magouillage, mais la prise de position de Mr Juncker est révélatrice de sa volonté de ne pas être gouverné, comme d’autres titulaires de la fonction l’ont été auparavant , mais bien de gouverner. Il y a donc eu, au cours de ces 2 réunions, une évolution du Conseil européen vers plus de transparence. Il faut noter que les positions de Mr Juncker laissent espérer que la démocratie va reprendre ses droits et que les institutions parlementaires européennes joueront pleinement leur rôle. Nous pouvons espérer que nous reviendrons, après une trop longue période où l’intergouvernemental a régné en maître, au texte de l’article 10 §1 du TUE : « Le fonctionnement de l’Union est fondé sur la démocratie représentative ».

Tout ceci est bel et bon, mais… Mais, comme toujours, en lisant de plus près les conclusions du Conseil des 26-27 juin, on voit apparaître ces mots : « Une fois que la nouvelle Commission européenne aura été effectivement mise en place, le Conseil Européen examinera le processus futur de nomination du président de la Commission européenne, dans le respect des traités européens ».

Que vient faire ce texte dans le communiqué final ?

Ceci signifie que, cette fois-ci, le Parlement européen, en forçant un peu la main au Conseil européen, avec la résolution de juillet 2013, sur la présidence de la Commission, a dérangé l’unanimité de façade affichée jusqu’à présent sur cette nomination, mais qu’il a aussi « osé » se mettre en travers des combinaisons internes qui prévalaient jusqu’alors, en faisant désigner des candidats à cette présidence par les partis européens.

Les membres du Conseil européen sont donc furieux de cette intrusion des parlementaires dans leurs arrangements. La Grande-Bretagne, bien sûr, mais aussi la Suède, les Pays-Bas, la Hongrie et, sans le dire ouvertement, l’Allemagne, ont voulu torpiller cette avancée et empêcher, ainsi, cette démarche vers une démocratie parlementaire européenne.

On sait qu’il a fallu tout le poids des parlementaires allemands, et en particulier CDU, pour faire rentrer madame Merkel dans le rang. Grâce leur en soit rendue ! Cette petite phrase dans les conclusions finales montre bien que le Conseil souhaite réexaminer la procédure de nomination du président de la Commission car il trouve, peut-être que, vraiment, cette année, on est vraiment allé trop loin dans la transparence ! Lamentable de la part de nos dirigeants, qui prétendent disposer, seuls, de la légitimité démocratique !

Cette « nouvelle » idée du Conseil européen pourrait cependant s’avérer fort bénéfique pour les idées fédérales.

Si le Conseil européen veut modifier l’article 17§7 du TUE, le Parlement européen doit déclarer que, s’agissant d’une modification substantielle du T.U.E., on se trouverait d’évidence dans le cas d’une révision ordinaire des traités (article 48, §2 à 5 du TUE).

Le Parlement est alors automatiquement consulté et doit approuver la ou les modifications proposées. Considérant que la façon dont a été nommé J.C. Juncker doit dorénavant faire jurisprudence et que toute modification de cet article du TUE serait substantielle, le Parlement et la Commission seraient en droit de demander la convocation d’une Convention.

À ce moment, le Parlement devrait exiger, que la dite Convention soit consacrée à un toilettage plus étendu des textes du TUE pour lui donner une tournure plus fédérale en revenant aussi, par exemple, sur le droit de veto, sur le nombre des commissaires, sur la procédure de nomination des commissaires, en abordant la question des ressources propres de l’UE, et l’idée de nouvelles politiques communes (énergie, immigration, fiscalité et défense entre autres) etc….

Le combat entre le Conseil européen et le Parlement européen risque fort, dès lors, d’être féroce et, nous, Fédéralistes Européens, devrons soutenir et aider les parlementaires à faire « plier » les chefs d’États et de gouvernements.

La vengeance est un plat qui se mange froid… mais qui mangera l’autre ?

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