« L’Union fait la force » : Histoire du drapeau belge

, par Paul Brachet

« L'Union fait la force » : Histoire du drapeau belge
Drapeau de la Belgique, le tricolore noir-jaune-rouge © Pixabay

En ce 21 juillet, les Belges célèbrent leur fête nationale. Commémorant la prestation de serment de 1831 de celui qui allait devenir le premier « Roi des Belges », Léopold Ier, la fête nationale belge est l’un des symboles de l’unité d’un pays qui est aujourd’hui traversé par des tensions linguistiques et culturelles, notamment flamandes et wallonnes. Autre symbole de l’unité du plat-pays : son drapeau. Plongeons dans son histoire, intimement liée à celle de l’identité nationale belge.

Entre France et Liberté, les Belges

Le drapeau belge est né dans le contexte de la Révolution belge de 1830. Cette révolution prend place dans une Belgique sous administration néerlandaise. Le Royaume uni des Pays-Bas du protestant Guillaume Ier d’Orange-Nassau est profondément centralisateur vis-à-vis des huit provinces catholiques du sud du royaume. Cependant, ces provinces méridionales se forgent peu à peu une identité commune, une identité belge. La Belgique, devenue nation, se révolte contre un pouvoir royal considéré comme répressif par la population et les élites belges : la Révolution belge éclate.

Pour marquer leur désir de liberté et d’autonomie, qui deviendra véritable volonté d’indépendance, vis-à-vis des Pays-Bas, les Belges remplacent à la hâte les drapeaux officiels du Royaume par des drapeaux français, symbole à l’époque de liberté et d’idéaux révolutionnaires. Le tricolore devient donc dans les mentalités le symbole de la révolution, des drapeaux français fleurissent dans les rues, sur les façades des bâtiments publics comme privés.

Le drapeau comme symbole d’une conscience nationale

Mais le drapeau français n’est pas vu partout d’un bon œil. Certains craignent l’influence grandissante des « rattachistes », un mouvement politique souhaitant voire le rattachement des provinces sécessionnistes à la France. L’utilisation du tricolore français est vu par les rattachistes comme la preuve de la volonté des provinces de se rattacher à la France. Or, il n’en est rien. L’utilisation du tricolore français est davantage le signe d’un attachement aux valeurs révolutionnaires qu’à la nation française. Pour se démarquer du Rattachisme, les villes commencent à brandir des tricolores aux couleurs de leurs armoiries.

À Bruxelles et dans l’ensemble de la province du Brabant, les couleurs noir-jaune-rouge sont brandies. Province riche qui a toujours joué un rôle politique et économique central dans la région, le Brabant diffuse ses couleurs par-delà ses frontières. Le tricolore noir-jaune-rouge obtient une réelle popularité et devient vite l’étendard de l’indépendance. Une popularité qui peut s’expliquer aussi par la présence d’au moins deux des trois couleurs dans nombre de régions, provinces ou villes de Belgique. Devenu l’étendard belge, le tricolore dispose les couleurs horizontalement : une bande noire, jaune, puis rouge.

L’étendard devient drapeau par la constitution du Royaume de Belgique qui consacre le tricolore en verticalisant les couleurs. Le tricolore vertical noir-jaune-rouge devient ainsi le drapeau officiel et constitutionalisé du nouveau royaume de Belgique, indépendant et des Pays-Bas et de la France.

Après le Noir-Jaune-Rouge, le Noir-Jaune et le Jaune-Rouge ?

Drapeau du léopard noir sur bouclier d’or de la Flandres
© Pixabay

Depuis, le drapeau est symbole national. Un symbole d’unité dans un pays divisé par les clivages linguistiques et économiques. La rivalité flamande-wallonne, néerlandophone-francophone, n’a cessé de croître ne faisant exception qu’à l’égard de trois symboles : le roi, le football et le drapeau. Si aujourd’hui le drapeau est encore considéré comme un facteur d’unité, ce dernier est de moins en moins brandi en Belgique. En dehors de Bruxelles-Capitale, ce sont les drapeaux flamand, noir et jaune, et wallon, jaune et rouge, qui sont les plus populaires. À tel point que certains observateurs questionnent l’existence même d’une Belgique unie, alors que se prépare une réforme institutionnelle qui rapprocherait davantage la Belgique d’une confédération que d’une fédération.

Drapeau du coq rouge sur bouclier d’or de la Wallonie
© Pixabay

Aux dernières élections fédérales, en 2019, les partis nationalistes flamands ont obtenu 28% des voix. Aujourd’hui, ils représenteraient, selon les sondages, 42% des intentions de votes, soit une majorité au sein de la Flandre. Ces partis indépendantistes flamands sont classés à droite voire à la droite de la droite, chez les Wallons, les francophones de Belgique, c’est l’inverse. Le paysage politique est dominé par des partis de gauche voire de la gauche de la gauche. La division linguistique est donc accentuée par une division politique marquée, renforcée par des situations économiques opposées. Alors que les ports de la mer du Nord permettent à la région flamande un dynamisme économique important, la désindustrialisation a fait de l’économie wallonne une économie en perdition accumulant immobilisme, chômage et pauvreté.

En 1830, le tricolore noir-jaune-rouge avait été le recéptacle d’une conscience nationale belge, partant du peuple, il s’était imposé à l’État. Aujourd’hui, le drapeau est un symbole de l’État alors que le(s) peuple(s) de Belgique questionne(nt) leur identité, leur nation, et in fine quel étendard les représente vraiment.

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