Un partenariat énergétique dominé par la Russie
La coopération entre les deux entités trouve ses origines dans un accord de partenariat et de coopération signé en 1994 et ratifié en 1997. Cet accord devait encadrer des domaines clés tels que commerce, énergie, changement climatique, culture… Ceci étant, au bout d’une dizaine d’années, les relations euro-russes ainsi encadrées donnaient déjà lieu à un bilan mitigé. Dans son rapport au Sénat de 2007, M. Yves Pozzo di Borgo, intervenant en qualité de délégataire de l’Union, dressait un rapport peu élogieux de l’état de ces relations.
Cela étant, les années passant, les relations se sont développées, au point qu’aujourd’hui, l’Union européenne est le plus important partenaire de la Russie, et la Russie est le 5ème partenaire économique de l’Union. Le ciment de cette relation ? L’énergie. L’Union européenne, « avide d’hydrocarbures », se trouve dans une situation de dépendance de ce partenaire qui amenuise les marges de manœuvre qu’elle pourrait avoir pour régler certaines questions politiques. La Russie, bien consciente de la domination qu’elle exerce dans le domaine, n’a ainsi pas hésité à couper, en 2015, les approvisionnements à l’Ukraine, pays de transit majeur vers l’Union, pour solliciter des Européens qu’ils payent la dette ukrainienne qui se calculait alors en milliards de dollars. Symbole de cette dépendance : l’entreprise russe Gazprom qui assure l’approvisionnement énergétique du marché européen.
Ce partenariat « forcé » n’est pas de nature à permettre une coopération plus étendue dans d’autres domaines. Alors que l’Union européenne se tourne progressivement vers une politique plus respectueuse de l’environnement, la Russie continue à recourir aux énergies fossiles, à l’opposé donc a priori des objectifs européens. D’ailleurs, la Russie n’a pas hésité à contester les mesures pro environnement de l’Union en engageant quatre procédures devant l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) pour contester l’ajustement du prix du gaz dans les enquêtes anti-dumping en 2013, le Troisième Paquet énergie de l’Union en 2014, ou encore les mesures anti-dumping sur produits en acier plat laminés à froid en provenance de Russie en 2017. Et un prochain épisode peut être attendu avec la taxe carbone. Mais cette attitude pourrait être amenée à changer.
Gestion de la crise ukrainienne : et si on rebattait les cartes ?
Si la Russie mène la danse dans le domaine énergétique, il en va différemment dans le domaine politique. La crise ukrainienne semble avoir été l’opportunité pour l’Union de renverser la vapeur et de s’affirmer face à la Grande Ours. Depuis plusieurs années, les conflits de l’Europe de l’Est et des Balkans cristallisent les relations euro-russes. Kaliningrad, Kosovo, Ossétie du Sud ravivent les tensions avec la Russie. Les élargissements successifs de l’Union vers l’Est inquiètent la Russie qui ne manque pas de réagir, comme en atteste la crise ukrainienne.
L’annexion de la Crimée, jugée illégale par l’Union, a conduit cette dernière à adopter des mesures restrictives contre le pays des tsars. Ces mesures ont pris notamment la forme de gels d’avoirs et de visas. Le Conseil, estimant que la situation ne s’était pas améliorée de façon significative, a récemment décidé de reconduire l’application des sanctions jusqu’au 23 juin 2021. Cette annexion a aussi valu à la Russie son exclusion du G7.
Le tournant des relations entre l’Union européenne et la Russie est certainement la crise ukrainienne. La réaction européenne a été à l’échelle de la gravité de l’événement.
Forte de cette réaction dans laquelle elle a été soutenue, l’Union européenne n’hésite plus à multiplier les sanctions pour toute intervention qu’elle estime nuisible. Les multiples tentatives d’immixtion polymorphes de la Russie dans les affaires et sur le territoire européens aboutissent désormais à des prises de position et à des représailles de la part de l’Union. L’affaire Skripal en est un très bon exemple. L’ex-espion russe et sa fille avaient été empoisonnés alors qu’ils se trouvaient à Salisbury, en Angleterre, en 2018, avec des neurotoxiques. Les personnes impliquées ont fait l’objet de gels d’avoirs et d’interdictions de se rendre sur le territoire européen. Ceci étant, l’efficacité de ces sanctions peut être discutée.
Une affirmation à poursuivre
La relation de l’Union européenne avec la Russie est marquée par une domination, qui bascule incessamment d’un côté puis de l’autre. Mais finalement, sur les quinze dernières années, l’Union européenne a su montrer qu’elle était capable de taper du poing sur la table en cas de violations graves des règles établies. Sa relation avec la Russie n’est pas faite que de divergences. Même s’il est compliqué de traiter avec un partenaire qui ne respecte pas les règles, l’Union européenne doit persévérer. Les tensions de ces dernières années ouvriront de nouvelles voies tant au cœur de cette relation que sur la scène internationale en générale, comme par exemple avec l’OTAN.
Comme le relève Alexandros Papaioannou, « la coopération entre l’Union européenne (UE) et l’OTAN a souvent été comparée à une tâche de Sisyphe : à peine des progrès sont-ils accomplis que tous les efforts semblent réduits à néant et qu’il faut repartir de zéro, sans plus de chance de succès ». L’état actuel des relations avec la Russie pourrait bien la pousser à se rapprocher de l’OTAN et à relancer cette organisation en peine depuis des années.
Ceci étant, elle doit aussi lutter contre des nouvelles formes variées d’influence russe : cyber attaques, financement de mouvements politiques en Europe, multiplication des investissements… Le pouvoir semble rebasculer du côté russe. Il incombe désormais à l’Union européenne de contrecarrer ces types d’influence pour faire de la Russie un partenaire avec lequel elle pourrait entretenir à (très) long terme une relation stable, et mettre un terme à ce jeu de pouvoirs.
1. Le 3 août 2020 à 08:37, par Klod Kolesnikov En réponse à : 15 ans de relations UE – Russie : une histoire de jeux de pouvoirs ?
Poutine, le president terroriste qui voulait dominer le monde !
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