Allemagne : Une réforme pour le fédéralisme

La mère de toutes les réformes

, par Benjamin Anoufa

Allemagne : Une réforme pour le fédéralisme

Le vendredi 30 Juin, les députés allemands ont approuvé la plus importante réforme portant sur le fédéralisme allemand depuis 1949. Après des années de blocage et ce, malgré une volonté partagée, la répartition des pouvoirs entre les Länders et l’Etat fédéral devrait être établie sur des bases plus claires.

Point phare des réformes proposées par Angela Merkel, cette réforme fut donc approuvée par les députés allemands le vendredi 30 Juin.

Ce vote peut être d’ors et déjà considéré comme un grand succès pour Angela Merkel sur la scène politique intérieure.

En effet, une telle réforme aurait déjà du être approuvée fin 2004, mais après un désaccord sur les questions liées à l’éducation, ce projet était tombé dans l’oubli.

A la tête de sa grande coalition il semble donc qu’aujourd’hui la chancelière allemande ait réussie à faire passer un projet que tout le monde voulait mais que chacun refusait de signer. Cette réforme est fondamentale pour le fédéralisme allemand qui, après des années d’évolution et de rapports de force entre les différents groupes (Länders, partis politiques et ministères), s’est incroyablement complexifié au point de rendre le système législatif opaque et contreproductif.

Comme tout état fédéral, le système politique allemand repose à la fois sur une séparation des pouvoirs au niveau horizontal (executif, législatif et judiciaire) et au niveau vertical entre les Länders et l’Etat fédéral. Le fédéralisme est ainsi garant d’efficacité, puisqu’il distribue les pouvoirs au niveau politique le plus adapté. Cette séparation verticale des pouvoirs permet ainsi une meilleure gouvernance politique mais aussi et surtout le respect fondamental de la diversité dans un Etat aussi complexe que l’Allemagne.

Une simplification du partage des compétences

A la création de l’Etat fédéral allemand, le système législatif ne nécessitait l’approbation des lois par le Bundesrat - la Chambre des Länders - que dans 10% des cas. Au fil des années cette implication du Bundesrat a évolué pour atteindre aujourd’hui la part de 60% des lois. Cette croissance de l’implication des Länders dans le processus législatif fédéral était bien entendu l’objet de tous les débats. En effet pour qu’une loi fédérale soit adoptée il fallait l’accord simultané des deux Chambres si bien que le système se retrouvait souvent dans une impasse.

Si les Länders reconnaissaient volontiers que ce système paralysait la politique de l’Allemagne, ils ne voulaient cependant pas lâcher une parcelle de leur pouvoir. Il aura fallu attendre la coalition d’Angela Merkel pour arriver au terme de cette impossible négociation. Ainsi, selon les termes de la réforme, l’implication des Länders dans le processus législatif fédéral devrait passer de 60% à 40% des lois, en échange de quoi l’Etat fédéral transfère une partie de ces compétences au profit des Länders.

Les domaines tels que l’éducation et la recherche, l’environnement, le régime pénitentiaire, et la rémunération des agents de la fonction publique sont passés dans le champ quasi exclusif des compétences régionales. S’il est raisonnable de penser qu’une décentralisation de ces domaines puisse être profitable au respect des particularités régionales, des groupes tels que les associations de parents d’élèves et les enseignants s’inquiètent d’un accroissement de l’inégalité de l’accès à l’enseignement.

De telles craintes se retrouvent en matière d’environnement. Les associations de défense de l’environnement, très présentes en Allemagne, craignent un nivellement des normes par le bas. Les Länders est-allemands, disposant de peu de ressources financières ne seraient plus obligés de suivre les normes écologiques élevées de l’Allemagne fédérale. Ces questions de la répartition des compétences sont bien celles de tous systèmes politiques fédéraux.

Des questions restent en suspens

Si la question du partage des compétences entre les régions et l’Etat fédéral était bien l’objet de cette réforme, de nombreuses questions restent encore en suspens.

Dans un contexte politique européanisé, le fédéralisme allemand ne peut plus être géré sans une approche européenne. Les Länders disposent en effet d’un droit de négociation direct avec l’Union Européenne dans les domaines où ils sont compétents.

Ce système politique à 3 niveaux (Union Européen, Etat Allemand, Länders) qui par la force des choses n’a pas de précédent, sera la prochaine épreuve que connaîtra l’Allemagne fédérale. Sans aucun doute l’Union Européenne devra elle-même s’adapter a particularismes du modèle politique de l’Allemagne.

L’expérience d’autres modèles fédéraux tel que celui de la Suisse pourrait dans cette perspective être une bonne base de départ pour une prochaine évolution, tant du fédéralisme Allemand que de l’avenir politique de l’Union Européenne.

Ce modèle fédéral continental (par opposition au fédéralisme Anglo-Saxon), nous offre des réponses quant à la gestion politique à donner au multilinguisme, à la diversité culturelle, et à la gestion d’un nombre important de niveaux politiques compétents.

L’Allemagne et l’Europe - dont les destins sont liés - ne seront satisfaire aux critères de la bonne gouvernance, du respect de la diversité, et de la démocratie que par la création d’une Europe fédérale avec une répartition des pouvoirs adaptés.

- Illustration :

 Photographie tirée de la galerie Flickr du site officiel de la Coupe du monde 2006 de la FIFA.

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