Brigitte Fouré : « politiser la Commission et la rendre moins technocratique »

Interview de l’Eurodéputée à l’occasion de l’Eurotour des Facs

, par Romain Bail

Brigitte Fouré : « politiser la Commission et la rendre moins technocratique »

Interview de Brigitte Fouré, eurodéputée (Nouveau Centre / PPE) de la circonscription Nord-Ouest, réalisée à l’occasion de l’Eurotour des Facs qui passait à Caen. Elle est venue nous parler d’Europe en toute simplicité et avec beaucoup de franchise. C’est elle qui a succédé à Jean-Louis Bourlanges, démissionnaire, en tant député au Parlement européen.

Le Taurillon : Les Jeunes Européens - France proposent dans le cadre de la campagne et des élections européennes à venir que le président de la Commission européenne soit élu par les députés qui seront issus de ce scrutin. Ils demandent également que les différents partis politiques annoncent bien avant les élections leur candidat à cette présidence, derrière des programmes européens et autour de listes transnationales. Qu’en pensez-vous ?

Brigitte Fouré : Je pense clairement qu’il faut en effet « afficher la couleur » dès le début de la campagne. Nous devons davantage politiser la Commission européenne, pour qu’elle nous paraisse moins technocratique. Cela permettrait à l’Europe de prendre chair en son Parlement. L’annonce d’un candidat à cette présidence s’inscrit dans une suite logique à son élection souhaitable par le nouveau Parlement. Néanmoins, il sera difficile qu’un seul candidat émane pour chacun des partis politiques en présence, du moins dans le cadre de cette prochaine campagne. Pour autant, cet engagement de la part des grands partis politiques nationaux susciterait une campagne européenne plus transparente et plus claire.

Quant aux programmes transnationaux derrière des listes véritablement européennes dans leur composition, je serais plus nuancée. Son principe est une bonne chose, mais compte tenu de l’état de l’opinion à l’heure actuelle à l’égard de l’Europe, ce choix serait vécu comme une gageure à l’encontre de l’identité nationale de chacun des membres. Cela pose inévitablement aussi le problème des débats internes et nationaux qui resurgiront au moment des élections européennes.

Le Taurillon : Que pensez-vous du rôle et de l’importance de l’Eurotour des Facs, tour de France des Universités par les JE-France pour expliquer la Présidence Française du Conseil de l’Union Européenne et inciter les étudiants à aller s’inscrire sur les listes électorales ?

Brigitte Fouré : Je suis profondément convaincue de l’intérêt de ce type d’action au profit des citoyens et plus particulièrement des étudiants. Je pense notamment aux étudiants en droit [1] qui représentent un véritable vivier, à la fois source de questions, d’informations et vecteur d’opinion. Il faut chercher à toucher les citoyens, comme j’essaie de le faire au quotidien, sans être élitiste.

Eurtour des Facs

Nous devons lancer un message qui parle au cœur des gens. Ce message est probablement plus facile à recevoir lorsque l’on est jeune et que l’on est en recherche. En fait, toutes les formes de communication sont bonnes pour parler d’Europe, il faut toutes les employer et faire de l’Europe un sujet commun.

Le Taurillon : Quel est votre rapport à l’Europe en tant qu’élue locale de la ville d’Amiens ? Comment s’incarne votre proximité à l’Europe depuis Amiens ?

Brigitte Fouré : J’essaie d’être un passeur d’Europe. Je conçois mon rôle à la fois comme porte-parole des habitants et des populations locales à Bruxelles, et inversement comme porte-parole de l’Europe localement. Pour les habitants d’Amiens, l’Europe est souvent perçue comme un ensemble de dossiers financiers ou de subventions distribuées aux projets locaux. Mais ce n’est pas que cela, surtout lorsque l’on reconsidère le faible budget de l’Union Européenne.

Nous avons un destin commun et devons au cours du siècle à venir faire front à la mondialisation. Laissons les intérêts personnels et nationaux de côté, abandonnons nos chapelles pour construire l’Europe ensemble.

Le Taurillon : La campagne des élections européennes de 2009 ne va pas tarder à démarrer, pensez-vous déjà à cette échéance et comment préparez-vous cette campagne ?

Eurotour des Facs à Caen

Brigitte Fouré : Bien entendu, j’y pense déjà. J’ai une réelle envie de continuer à servir l’Europe. L’une des difficultés est de se rendre proche des électeurs et des citoyens sur un territoire immense. A nous de présenter une relation rénovée et repensée pour se rapprocher des populations en région. De même, il faut impérativement éviter les débats nationaux pour se concentrer sur les apports de l’Europe au niveau local. Je souhaite aller à la rencontre de ceux qui côtoient l’Europe au jour le jour, qui la vivent ou qui sont touchées par elle au cours de journées locales et thématiques. Il ne faut pas oublier l’utilité des tracts pour présenter son programme et l’incontournable outil qu’est Internet avec les sites et les réseaux qui s’y greffent pour promouvoir l’Europe de demain et en discuter.

Le Taurillon est partenaire de la campagne Who Is Your Candidate ? :

 Le président de la Commission européenne ne doit plus être nommé dans le huis clos du Conseil européen.
 Au contraire, le Président de la Commission européenne doit être désigné par le Parlement européen, c’est-à-dire les représentants des citoyens, comme le suggèrent les articles 9A et 9D du Traité de Lisbonne.
 En conséquence, les partis politiques représentés au Parlement européen doivent, suffisamment tôt avant les élections européennes de 2009, répondre à la question : Quel sera votre candidat à la présidence de la Commission ?

Pour signer la pétition : ici.

Illustration :
 photographie de Brigitte Fouré fournie par son équipe
 logo de la campagne Who is your candidate
 photographie de la conférence réalisée à l’occasion du passage de l’Eurotour des Facs à Caen.

Mots-clés
Notes

[1NDLR : Brigitte Fouré a été maître de conférence de droit privé à l’université d’Amiens. Source : Wikipedia.

Vos commentaires
  • Le 13 octobre 2008 à 17:51, par Ronan En réponse à : Brigitte Fouré : « politiser la Commission et la rendre moins technocratique »

    Quant aux programmes transnationaux derrière des listes véritablement européennes dans leur composition, je serais plus nuancée. Son principe est une bonne chose, mais compte tenu de l’état de l’opinion à l’heure actuelle à l’égard de l’Europe, ce choix serait vécu comme une gageure à l’encontre de l’identité nationale de chacun des membres. Cela pose inévitablement aussi le problème des débats internes et nationaux qui resurgiront au moment des élections européennes.

    Et ben bravo. Et c’est cette dame qui a succédé à Jean-Louis Bourlanges comme Eurodéputée ?! La-men-ta-ble ! (Avec des « Européistes » comme ça, il n’y a même plus besoin d’Eurosceptiques pour enterrer le projet européen...).

    Compte tenu de l’Etat de l’opinion ?! On attendait de nos eurodéputés qu’ils aient de l’audace, fassent preuve d’initiatives et montrent la voie... Et on en découvre que certains d’entre eux suivent l’opinion dans ses postures les plus frileuses et dans ses pulsions les plus conservatrices (même si elles sont minoritaires...).

    Une fois encore, faudra surtout pas venir se plaindre si les Européistes se font déborder par beaucoup plus revendicatifs qu’eux. Si l’ultra-gauche propose demain une Constituante démocratiquement élue, on aura bonne mine, tiens... (et on va surtout encore passer pour des couillons...). Félicitations. (Reviens Spinelli, reviens !)

  • Le 14 octobre 2008 à 10:19, par calvinus En réponse à : Brigitte Fouré : « politiser la Commission et la rendre moins technocratique »

    On ne saurait trop lutter contre la lassitude et la frilosité qui atteignent même nos rangs militants. Mais peut-on reprocher aux professionnels de la politique, qui se soumettent au suffrage de leurs concitoyens, de considérer les humeurs des électeurs ? A nous de les encourager à être plus que des échos de l’opinion et à en devenir des leaders. Les agresser n’est peut-être pas la meilleure forme du lobbying auquel nous devons les soumettre.

  • Le 14 octobre 2008 à 12:01, par Ronan En réponse à : Brigitte Fouré : « politiser la Commission et la rendre moins technocratique »

    Mai que dire de ceux qui se mettent au diapason des plus frileux d’entre nos concitoyens : est-ce une tournure de caractère ou n’est-ce pas plutôt, finalement, parce que - dans le fond - ça les arrange bien ?!

Vos commentaires
modération a priori

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?

Pour afficher votre trombine avec votre message, enregistrez-la d’abord sur gravatar.com (gratuit et indolore) et n’oubliez pas d’indiquer votre adresse e-mail ici.

Ajoutez votre commentaire ici

Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Suivre les commentaires : RSS 2.0 | Atom