« L’Europe n’est pas suffisamment ni correctement enseignée en France »

Interview de Marie-France Mailhos, Présidente de l’Association Européenne De l’Education-France

, par Fanny Dubray

« L'Europe n'est pas suffisamment ni correctement enseignée en France »

A l’occasion de la semaine thématique dédiée à l’enseignement de l’Europe sur le Taurillon, Marie-France Mailhos, Présidente de l’Association Européenne De l’Education-France, présente les objectifs et projets de l’AEDE-France et les grands enjeux actuels pour l’Europe dans l’éducation.

Quelles sont les missions de votre association ?

Marie-France Mailhos : L’AEDE-France, dont la création a été inscrite au Journal Officiel le 1er février 1957, a pour principale mission de développer l’éducation à la culture de la citoyenneté européenne. Voir l’article 2 des statuts :

  • Approfondir dans le monde de l’éducation la connaissance de la construction européenne dans les domaines politique, économique, social et culturel, pour susciter des comportements européens communs
  • Travailler par des moyens appropriés à favoriser une prise de conscience des fondements et des points communs de la culture européenne dont le rayonnement apprendra aux adultes et aux jeunes à vivre ensemble dans une société démocratique et multiculturelle
  • Développer ces objectifs chez tous les partenaires du monde éducatif et dans tous les milieux où leur action peut s’exercer pour répandre la notion d’une réelle citoyenneté européenne, responsable et consciente de ses droits et devoirs
  • Chercher des voies et des méthodes de nature à soutenir toute initiative valable dans ces directions en respectant l’unité dans la diversité.
Marie-France Mailhos, Présidente de l’Association Européenne De l’Education-France

Pouvez-vous nous donner un exemple précis d’action en direction des jeunes ?

Marie-France Mailhos : En 2009, nous avons organisé un concours d’écriture de nouvelles sur la problématique du MUR, en direction des élèves depuis l’école primaire jusqu’au lycée, à l’occasion de la commémoration du 20ème anniversaire de la chute du Mur de Berlin. Environ 4500 élèves ont participé. Les lauréats, un groupe de 16 élèves et leurs enseignants, ont gagné une semaine à Berlin en novembre 2009 et 59 nouvelles ont été publiées « Un mur… Des murs… »

Logo de l’Association Européenne De l’Education-France

Marie-France Mailhos : En 2010, nous avons organisé un colloque européen «  L’école, avenir de l’Europe ? L’Europe, avenir de l’école ?  ». En 2011, nous sommes intervenus dans plusieurs établissements (Loudun, Beaune, Caen, Limours, Metz, etc.) soit pour des conférences « Etre citoyen européen aujourd’hui », soit pour aider à monter des projets européens de mobilité.

De juin à octobre 2011, nous lançons un concours de bandes dessinées «  L’Europe se bouge ! Bouge-toi avec l’Europe !  » sur le thème du bénévolat et de la solidarité en Europe. Le premier prix sera un séjour à Varsovie en décembre 2011, organisé en partenariat avec la section polonaise de l’AEDE et le Bureau de l’Éducation de Varsovie. Les 12 meilleures productions illustreront les 12 mois d’un calendrier 2012.

Nous publions sur notre site des ressources pédagogiques, des liens vers des sites utiles (dont celui de l’Europe à l’école).

L’Europe est-elle suffisamment et correctement enseignée en France ? Quel vous semble le meilleur moyen d’enseigner la matière « Europe » ?

Salon de l’éducation, Paris, novembre 2010

Marie-France Mailhos : Non, l’Europe n’est pas suffisamment ni correctement enseignée en France. Les enseignants ne sont pas formés pour enseigner la culture de la citoyenneté européenne ; c’est pourquoi nous travaillons surtout en direction des universités et des Instituts de formation d’enseignants. Il n’y a pas de matière « Europe ». Il y a des savoirs constitutifs de la culture européenne et des manières d’aborder les connaissances qui contribuent au développement de la citoyenneté européenne ; ce qui peut et devrait se faire dans toutes les disciplines scolaires.

Voir à ce sujet l’ouvrage « Apprendre à enseigner l’Europe », réédition 2009.J’ai aussi écrit un article « Enseigner l’Europe, jeu de piste à travers les disciplines », qui est téléchargeable dans l’espace adhérents du site de l’AEDE-France.

Avez-vous vous-même, en tant qu’enseignante, abordé cette question avec vos élèves ? Qu’en avez-vous tiré ?

Marie-France Mailhos : Oui, bien sûr. Les élèves sont toujours désireux d’en savoir plus sur l’union européenne et sur leur responsabilité en tant que citoyens européens et futurs électeurs. A partir de 1992 et jusqu’en 2007, j’étais formatrice à l’IUFM de Bretagne et j’ai mis en place des formations européennes [et internationales] pour les enseignants-stagiaires. Ces formations comportaient des périodes de stage dans des établissements partenaires de l’Union européenne. A l’issue de ces formations, ils déclaraient avoir été « trans-formés » !!

Et je me suis battue pour que ces formations, optionnelles, soient dûment reconnues et intégrées lors de la validation finale de l’année de stage.

La législation européenne en matière d’éducation se fait encore principalement par la voie de la coordination. Quel est son impact sur le fonctionnement de l’école en France ? Peut-on voir de nouvelles méthodes émerger grâce à cette évolution ?

Marie-France Mailhos : La première remarque à faire est de dire que les réformes de 2006 et 2007 (socle commun des connaissances ; cahier des charges pour la formation des enseignants) en France ont été la transposition des recommandations du Parlement et du Conseil européens sur le « Key Competences » et « Improving Teacher Education ».

Salon de l’éducation, Paris, novembre 2010

La régression actuelle dans ces domaines dans notre pays résulte de décisions nationales…

Deuxième remarque : tous les enseignants qui ont suivi des formations européennes ou qui ont participé à des projets européens ont modifié leurs pratiques pédagogiques suite à ces expériences. En tant qu’enseignant-chercheur, j’ai exploré ces domaines et publié quelques articles, dans des ouvrages collectifs, sur la dimension européenne de la formation des enseignants.

L’AEDE-France est membre du Comité National d’évaluation des programmes européens gérés par l’Agence 2e2f et membre du groupe de travail « reconnaissance des acquis de la mobilité » piloté également par l’Agence 2e2f.

Ci-dessous la Lettre ouverte que nous avons publié suite au colloque européen de novembre 2010 «  l’école, avenir de l’Europe ? L’Europe, avenir de l’école ? ».

Lettre ouverte aux instances éducatives de l’Union européenne et des Etats membres

De la nécessité d’une éducation à la culture de la citoyenneté européenne

L’Association Européenne De l’Education-France (AEDE-France) souhaite attirer l’attention des décideurs politiques des Etats Membres de l’Union européenne sur la nécessité d’intégrer une formation à la culture de la citoyenneté européenne dans les cursus des futurs enseignants, chefs d’établissement et autres personnels de la communauté éducative.

Il est urgent que les jeunes qui grandissent dans nos différents pays prennent conscience de leur appartenance à l’Union européenne.

Il est urgent que se construise l’Europe de la connaissance, l’Europe de l’innovation, l’Europe de la recherche de l’excellence… Cela ne peut se faire sans la médiation de tous les personnels de la communauté éducative. Une formation appropriée est indispensable, afin que les générations qui seront appelées à vivre, à travailler, à assumer leur citoyenneté européenne dans les années qui viennent aient acquis les savoirs et développé les compétences nécessaires pour que l’Union européenne défende ses valeurs, affirme sa place parmi les puissances mondiales et puisse faire entendre sa voix sur la scène internationale.

L’AEDE-France, 1er décembre 2010

AEDE-France 10, Place du Parlement de Bretagne 35000 Rennes

Présidente : Marie-france Mailhos contact chez aede-france.org

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Vos commentaires
  • Le 3 juin 2011 à 16:18, par HERBINET En réponse à : « L’Europe n’est pas suffisamment ni correctement enseignée en France »

    En effet, la citoyenneté européenne naît de l’apprentissage scolaire. Signé 1992, entré en vigueur en 1993, le traité de Maastricht apporte des droits à chaque citoyen européen, citons le droit de vote et le droit d’éligibilité. Additionnelle, la citoyenneté européenne s’ajoute à la citoyenneté nationale sans pour autant la remplacer. Par conséquent, un citoyen possédant la nationalité d’un Etat membre reçoit juridiquement la citoyenneté de l’Union européenne. Parfois jeté en pâture sans aucun chef d’inculpation, la citoyenneté offre aux Européens de nombreux droits tels que : circuler, séjourner, étudier et travailler avec liberté et fluidité, le droit d’initiative citoyenne, le pouvoir de demander des explications à l’administration, le bénéfice des politiques de l’Union, le libre accès aux documents de l’Union, l’utilisation de la monnaie commune, une protection à l’étranger par les représentants de n’importe quel autre pays de l’Union, etc.

    Un citoyen européen est actif, sa citoyenneté européenne résulte d’une âpre conquête, celle d’un droit nouveau. Elle est également la conséquence finale de l’excellence de son éducation. En adéquation avec le réseau citoyen ETAL - www.Reseau-etal.org - Pierre-Franck Herbinet, Secrétaire Départemental (39) du Mouvement Démocrate, membre de la commission sociale/santé du Mouvement Européen, a pris conscience de la nécessité d’une éducation à la culture de la citoyenneté européenne et il demande aux instances éducatives de l’Union européenne et des Etats membres a prendre des mesures préventives et curatives.

    Pierre-Franck Herbinet

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