D’une longue revendication…
En 2005, la JEF Europe s’était alors félicitée de la disposition prévue par le Traité établissant une Constitution pour l’Europe qui prévoyait qu’une pétition signée par un million de citoyens européens pouvait être présentée devant la Commission européenne.
Après les non au référendum en France et aux Pays-Bas, la JEF Europe avait soutenu la campagne pour l’établissement d’une ICE, la fameuse « Initiative pour l’initiative », afin de donner aux citoyens européens et aux organisations de la société civile la possibilité d’influencer directement l’agenda politique de l’UE. Cette campagne fut efficace puisque le Traité de Lisbonne a introduit dans son article 11.4 l’ICE en renvoyant à la Commission européenne le soin de déterminer dans un règlement les procédures et les conditions requises pour la mise en oeuvre d’une telle initiative citoyenne.
La JEF Europe a alors contribué au livre vert et à la consultation publique lancée par la Commission européenne fin 2009 insistant sur la nécessité de conditions souples de mise en oeuvre. Margot Wallström, alors Commissaire européen, avait d’ailleurs souligné lors du lancement de la consultation publique, que « le nouvel outil démocratique devait être accessible, transparent et convivial ». De même, Maroš Šefčovič, le Commissaire européen chargé des relations institutionnelles et de l’administration, responsable du suivi de l’ICE, soulignait que l’ICE ne devait « pas être trop difficile, pas trop technique ou compliquée pour les citoyens ».
Pourtant, le projet de règlement publié par la Commission européenne le 31 mars 2010 contenait de trop nombreux obstacles à la mise en oeuvre effective de l’ICE. La JEF Europe s’est alors engagée dans une campagne pour une ICE accessible en publiant plusieurs communiqués de presse et lettres ouvertes destinées aux Ministres des affaires étrangères et aux parlementaires européens qui devaient discuter la proposition de la Commission selon la procédure de co-décision. Les principales revendications de la JEF portaient sur le nombre de pays de l’UE que devait représenter le million de signatures (1/4 au lieu d’1/3), le seuil d’examen de la recevabilité, le délai de collecte des signatures (18 mois au lieu de 12) et l’aide technique que devait apporter la Commission (la traduction de l’ICE dans toutes les langues officielles de l’UE et la mise à disposition d’un site permettant la collecte de signatures électroniques).
Suite à cette mobilisation, l’eurodéputé Gerald Haffner, rapporteur pour l’ICE de la Commission PETI, a invité le président de la JEF Europe, Philippe Adriaenssens, à présenter les arguments de la JEF, qui a également pris part à différentes auditions organisées par les Verts, le groupe ADLE, la Commission européenne, le Mouvement Européen-France… La JEF Europe a ainsi pu dialoguer avec les principaux décideurs impliqués dans l’adoption de la réglementation sur l’ICE. Grâce au soutien de ses sections, plus de la moitié des députés européens ont été contactés dans leur propre langue maternelle.
Les efforts de la JEF n’ont pas été en vains car le règlement définitif, voté par le Parlement européen et le Conseil, est plus démocratique que les premières propositions de la Commission et du Conseil, notamment la réduction des seuils nationaux, la possibilité de recueillir des signatures en ligne, un contrôle de recevabilité précoce et une garantie de suivi par la Commission.
… à une formidable opportunité
Après avoir milité pour une approche souple et conviviale de l’ICE pendant toute l’année 2010, les Jeunes Européens Fédéralistes (JEF-Europe) ont commencé à réfléchir aux thèmes et aux méthodes pour lancer une ICE qui contribue à l’achèvement d’une Europe fédérale.
Certes la JEF est capable de mobiliser plusieurs organisations européennes, au rang desquelles le Forum européen de la jeunesse, et peut s’appuyer sur ses différentes sections nationales, régionales et locales dans presque tous les pays de l’UE où les jeunes peuvent facilement mobiliser les masses par des actions de rue traditionnelles et l’activisme en ligne. Mais les expériences passées, comme la campagne conjointe UEF - JEF pour un référendum consultatif européen sur la constitution en même temps que les élections du Parlement européen de 2009, ont montré qu’il n’est pas si facile de recueillir 1 million de signatures en un an. Il est donc indispensable que toute l’organisation soit mobilisée et s’engage pour une ICE. C’est pourquoi la JEF Europe a diffusé à tous ses membres un questionnaire portant sur des potentiels sujets et alliances nécessaires au lancement d’une ICE afin de déterminer collectivement l’éventuelle ICE à lancer.
La plateforme politique de la JEF ainsi que ses résolutions politiques constituent un excellent réservoir d’idées du sujet pour une ICE même s’il faut garder à l’esprit que la proposition doit relever de la compétence de la Commission afin de passer le contrôle de recevabilité. Le sujet devra refléter les priorités de la JEF Europe tout en étant clairement défini, facile à comprendre et avec un impact direct sur tous les citoyens. Les premiers résultats du questionnaire montrent que les membres de la JEF sont sensibles aux sujets environnementaux, sociaux et budgétaires.
La JEF Europe est également consciente qu’une ICE peut se heurter aux limites de ses capacités. C’est pourquoi afin de rendre possible de recueillir un million de signatures dans toute l’UE, la JEF Europe devra être unie et déterminée à réussir. Il faudra trouver des ressources financières. Jusqu’à son accomplissement, l’ICE devra être une priorité pour la JEF Europe et toutes ses sections nationales, qui devront contribuer substantiellement à la campagne. En ce sens l’ICE sera également l’occasion de renforcer la coordination au sein des sections de la JEF, entre sections et entre les différents niveaux de la JEF. L’ICE permettra également d’étendre le réseau de la JEF au sein de la société civile européenne et nationale.
Après avoir mené une campagne vigoureuse pour une ICE accessible, flexible et démocratique, la JEF doit maintenant saisir cette opportunité pour traduire dans la pratique son propre agenda fédéraliste en s’appuyant sur un outil de démocratie directe, que nous avons toujours réclamé. Si les fédéralistes ne se saisissent pas pleinement de cet instrument, nous pouvons être sûrs que les eurosceptiques le feront conformément à leurs propres priorités.
L’ICE constitue également une belle opportunité de resserrer les liens entre la JEF, et d’autres organisations pro-européennes ou fédéralistes, au premier rang desquelles l’UEF et le Mouvement Européen International. Cette coopération est une condition importante pour le succès d’une ICE qui doit être fondée sur un équilibre géographique et générationnel. Les Jeunes Européens Fédéralistes ne seront pas là uniquement pour recueillir sur le terrain les signatures mais doivent pouvoir participer à la définition d’une ICE commune. Les prochaines réunions statutaires de ces organisations à l’automne 2011 seront l’occasion de définir l’opportunité de lancer une ICE.
Au-delà du succès ou non d’une future initiative citoyenne, le lancement d’une ICE constituera déjà une victoire en soi si elle bénéficie d’une visibilité importante. Car elle permettra de parler de l’UE autrement qu’à travers les messages simplistes dont elle est souvent l’objet. Une initiative citoyenne contribuera au débat transfrontalier et donc à la création d’un espace public européen, dont l’existence dépendra de son interaction avec les espaces publics nationaux. Avec l’entrée en vigueur de l’ICE en avril 2012, l’UE introduit l’un des premiers outils démocratiques supranationaux au monde. Cette innovation a d’ailleurs été soulignée par le New York Times, qui titrait en juillet 2010 « Europe Turns Ear Toward Voice of the People ». L’ICE ouvre la possibilité pour les citoyens de s’impliquer dans une manière nouvelle, permettant un accès direct au processus de prise de décision au niveau européen. L’expérience montre également que des outils de démocratie directe comme le droit d’initiative ont tendance à renforcer la démocratie représentative. L’ICE devrait ainsi aider les parlementaires à se rapprocher du choix des électeurs et encourager la collaboration positive entre les citoyens et leurs représentants.
Avec l’initiative citoyenne européenne, transformons l’Europe des Etats en l’Europe des citoyens.
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