L’initiative citoyenne européenne : pour une influence directe des citoyens de l’UE sur son agenda politique

, par Nathalie De Craecker

L'initiative citoyenne européenne : pour une influence directe des citoyens de l'UE sur son agenda politique
Des membres de Greenpeace et d’Avaaz posant devant les boîtes contenant le million de signatures récoltées demandant de cesser d’autoriser les OGM, constituant la toute première initiative citoyenne européenne remise à la Commission Services audiovisuels de la Commission européenne

L’initiative citoyenne européenne a été introduite par le Traité de Lisbonne en 2009, dans le but d’atténuer le fossé entre l’UE et ses citoyens. Depuis le 1er avril 2012, cet outil de démocratie participative offre aux citoyens de l’UE et aux organisations de la société civile l’opportunité d’une influence directe sur l’agenda politique européen.

Greenpeace et Avaaz précurseurs symboliques

En décembre 2010, Greenpeace et Avaaz avaient remis à la Commission une pétition d’un million de signatures. Cette pétition ambitionnait d’appeler à un moratoire sur les cultures OGM et à la création d’un organisme éthique indépendant, chargé de réaliser des analyses et d’organiser la régulation des OGM. Même si cette pétition rejoignait les caractéristiques de l’initiative citoyenne européenne dans les formes, celle-ci n’avait pu être considérée comme une ICE et donc traitée comme telle, car soumise trop tôt, c’est-à-dire avant l’adoption du règlement. Elle reste néanmoins, symboliquement parlant, la première ICE remise à la Commission.

Fraternité 2020 : première initiative validée

La toute première initiative citoyenne européenne : « Fraternité 2020 – Mobilité. Progrès.Europe » a été enregistrée par la Commission européenne lors de la journée de l’Europe le 9 mai dernier. Cette première initiative, proposée par un comité de citoyens de l’UE vivant en Autriche, en Belgique, en Hongrie, en Italie, au Luxembourg, en Roumanie et en Espagne, a pour vocation l’amélioration des « programmes d’échange de l’UE, afin de contribuer à une Europe unie, fondée sur la solidarité entre les citoyens ».

Pratiquement

Les auteurs de cette initiative disposent, à compter du jour de la validation, d’un délai de douze mois pour récolter par écrit ou en ligne, parmi les plus de 500 millions d’habitants de l’UE, le million de signatures ainsi nommées déclarations de soutien, provenant d’au moins 7 États membres. C’est à cette condition qu’ils pourront inviter la Commission européenne à proposer une législation, comme l’avaient réussi Greenpeace et Avaaz.

Depuis l’entrée en vigueur, le 1er avril 2012, du règlement relatif à l’ICE, les demandes d’enregistrement peuvent être introduites par des comités de citoyens, considérés comme organisateurs officiels de l’initiative.

Avant d’enregistrer une initiative, la Commission devra vérifier que l’initiative en question répond à certains critères juridiques minimaux, à savoir « qu’elle n’est pas manifestement abusive, fantaisiste, vexatoire, contraire aux valeurs européennes - comme le rétablissement de la peine de mort, ou en dehors du cadre des compétences de la Commission ». Est exclue par exemple, toute modification aux Traités ou la question de la sortie du nucléaire qui, formulée comme telle, relève des États membres.

Réponse de la Commission

La Commission répondra formellement et publiquement, dans les 3 mois suivant la présentation de la proposition, par le biais d’une description de l’action qu’elle compte prendre à l’égard de la proposition. Elle fera également mention des motifs afférents à sa décision. Cette réponse fera l’objet d’une communication publiée dans toutes les langues officielles de l’UE. A noter que les organisateurs auront la possibilité de présenter leur initiative publiquement lors d’une audition au Parlement européen. Même si cette possibilité reste tributaire de la décision de la Commission, qui peut refuser une proposition dès la procédure d’enregistrement, elle traduit une volonté d’échange avec les citoyens.

Quelles sont les garanties d’impact réel ?

David Campbell Bannerman (Groupe des conservateurs et réformistes européens) rappelle que « l’ICE n’est pas contraignante pour le Parlement et la Commission et que cette dernière peut opposer son veto. Par conséquent, on risque d’obtenir surtout des propositions sur lesquelles la Commission aimerait avancer ». Ce risque est, toutefois, légèrement compensé par la possibilité de l’audition publique devant le PE pour chaque comité organisateur ayant récolté un million de signatures. Le Parlement pourra alors encourager la Commission à avancer sur une proposition qui a du sens.

Quid du poids des groupes d’intérêts économiques ?

Hormis le bémol quant au pouvoir conféré à la Commission, cette ICE semble magnifique en termes d’avancée vers la démocratie participative. Cependant, au risque d’assombrir un tant soit peu le tableau, ne serait-il pas de bon ton de lancer une ICE pour une diminution de l’influence des lobbies n’agissant pas dans l’intérêt général ?

En effet, si les formalités à accomplir sont là pour éviter les propositions d’initiatives abusives, leur nombre augmente aussi les probabilités de refus. Or, considérant le pouvoir de la Commission, dont celui de rejeter une proposition d’ICE, et le poids des groupes d’intérêts économiques auprès des Institutions, il reste à espérer qu’elles parviendront à garder leur libre arbitre lorsqu’une proposition, comme celle de Greenpeace et Avaaz, ira à l’encontre des intérêts des groupes précités. A prendre en compte aussi : le fait que rien ne stipule qu’une ICE doit être dans l’intérêt général...

Vos commentaires
  • Le 27 juin 2012 à 10:11, par Matthhou En réponse à : L’initiative citoyenne européenne : pour une influence directe des citoyens de l’UE sur son agenda politique

    Tu parles d’un outil démocratique ! Déjà, il faut être 500 millions venus d’au moins 7 pays de l’UE, mais même en réussissant ça, la commission peut dire non ?! Et en plus, on ne peut pas faire modifier les traités alors même qu’on les avait refusés (CF le non au référendum sur la constitution qui n’a pas empêché la France de ratifier Lisbonne). Cet outil n’est qu’une poudre aux yeux. Et aujourd’hui, les dirigeants veulent « plus de fédéralisme » mais toujours sans demander leur avis aux populations. Je suis pro-européen, mais pas n’importe comment. A quand un référendum à 27 ?

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