Les antagonismes devinrent passionnés : des amis de longue date ne s’adressèrent plus la parole, des familles se trouvèrent divisées et Hitler continua de vociférer de plus belle. La politique d’apaisement de Chamberlain était le produit d’un gouvernement dominé par une génération d’hommes qui avaient été trop vieux pour se battre en 1914. Ils avaient pensé restaurer leurs propres valeurs victoriennes d’avant-guerre ; le droit de séparer les nationalités, le droit de chaque nation de décider de sa propre politique étrangère appuyée par ses propres forces armées pour défendre cette indépendance. La souveraineté individuelle de chaque nation était considérée comme sacro-sainte ; c’était le devoir de ses jeunes citoyens mâles de mourir pour elle si nécessaire. Tout conflit d’intérêt entre nations serait résolu raisonnablement par des diplomates des parties concernées.
Les fils de cette vieille génération s’étaient battus dans les tranchées. Mais ceux qui avaient survécu n’avaient pas pris la relève. Ils s’étaient repliés sur eux mêmes et dans les cauchemars que leurs anciens leur avaient demandé de vivre, sur ce qu’ils avaient vu et fait. C’était une génération qui prenait peu de part au gouvernement ; ils laissaient à des hommes vieux, et à des « profiteurs » qui avaient fait de bonnes affaires pendant la guerre « le soin de poursuivre leur oeuvre ». Ceux d’entre eux qui participaient au gouvernement, comme Eden et Macmillan, que Neville Chamberlain surnommait ironiquement « la Brigade des jeunots » avaient été élevés dans les valeurs de leurs pères : ils pouvaient ne pas être d’accord avec leurs aînés, mais ne trouvaient pas le courage de rompre avec eux. Ils pouvaient approuver l’idée d’une Société des Nations (SDN), liées par une alliance commune, mais pas aux dépends de la diplomatie entre des Etats individuels et la formation d’alliances et de contre-alliances ; ces choses là restaient dans l’ordre du jour. Le cordon ombilical resta trop fort, et il devint mortel. L’idée que la SDN pouvait l’emporter sur la diplomatie de l’affrontement entre les nations en son propre nom et en représentant toutes les autres, de la façon que le Traité de la Ligue nouvellement créée semblait rendre possible, n’entrait pas dans leur façon de penser.
La SDN, en fait n’avait ni l’autorité ni le pouvoir de le faire. Sa constitution établissait que chaque Etat restait libre de conduire sa propre diplomatie, soutenue, si nécessaire par ses propres forces armées. C’était une porte de sortie pour ceux qui voulaient se renier et refuser l’action collective. Cette génération fut suivie par une autre qui avait été trop jeune pour se battre en 1914, mais qui avait juste l’âge qu’il fallait pour être appelée, maintenant, en 1939.
C’était une génération qui avait grandi, nourrie des écrits de Norman Angell, H. G. Wells, Bertrand Russel et bien d’autres, avec des tas de publications, avec également des débats dans les associations de l’Union pour la SDN, dans tout le pays. Tous identifiaient la « souveraineté nationale » comme la menace et la racine d’où surgissaient les guerres. Ils en étaient venus à considérer la « sécurité collective » sous le Traité de la SDN comme la promesse solennelle que leurs pères n’avaient pas fait le sacrifice de leur vie pour rien. La Nouvelle alliance avec ses connotations bibliques était une expression appropriée. 10 Cité, dans, Hugo Young, This Blessed Plot, chapitre 1.
Bien qu’en âge de se battre c’était une génération qui n’avait pas assez d’expérience pour faire partie du gouvernement. Même Eden et Mac Millan, de la génération précédente, n’étaient traités que comme des apprentis prometteurs que leurs aînés pouvaient ignorer ou laisser sur la voie de garage. Cependant les anciens qui étaient aux commandes découvraient que la « sécurité collective » leur faisait gagner des électeurs, mais en privé ils n’avaient que mépris pour cette idée. Les jeunes étaient assez naïfs pour croire qu’ils prenaient au sérieux ce qu’ils disaient. Le moment de vérité survint en 1935 lorsque Mussolini commença de menacer d’envahir l’Abyssinie. En juin, 11 millions d’électeurs en Grande-Bretagne votèrent pour des sanctions contre Mussolini s’il mettait ses menaces à exécution ; 9 millions votaient pour des sanctions militaires. « C’est terriblement méchant » dit Neville Chamberlain, qui avait soixante six ans et attendait son tour d’être Premier ministre. On peut citer une paraphrase du compte-rendu de ce qui suivit dans Le vent du changement d’Harold Macmillan. Le onze septembre le Secrétaire aux affaires étrangères, Samuel Hoare, fit ce qu’il décrivit comme un « appel de renaissance à l’Assemblée de la SDN ». Au mieux, dit-il, cela pouvait commencer un nouveau chapitre dans le renouveau de la Ligue. Le discours cependant avait été soigneusement vérifié par le Foreign Office et Neville Chamberlain. Néanmoins, Hoare proclama hardiment « la Ligue approuve, et mon pays approuve avec elle, le maintien collectif du Traité dans son intégralité... S’il faut porter ce fardeau il faut le porter collectivement. Au nom du gouvernement de sa Majesté, je peux dire qu’en dépit de ces difficultés, ce gouvernement ne le cédera à personne dans ses intentions de remplir, dans la mesure de ses capacités, les obligations que le Traité lui impose » . Le jour suivant deux croiseurs lourds et une escadre de croiseurs arriva àGibraltar, pour confirmer ses paroles. L’effet produit, dans le monde entier, rapporte Macmillan fut sensationnel. Le représentant de la Belgique à la SDN, par exemple, souligna que « les Britanniques ont décidé d’arrêter Mussolini, même si cela implique l’usage de la force ».
Macmillan ajouta, « en Grande Bretagne » la réaction fut immédiate et impressionnante, la décision réveilla le sens de l’unité et de l’orgueil national ; « une fois de plus nous allions reprendre la place qui nous revenait dans l’ordre mondial. L’Amérique restait neutre, l’Allemagne était hostile ; les nations démocratiques se tournaient maintenant vers nous, et nous ne voulions pas les décevoir. La Grande-Bretagne, une fois encore montrait le chemin »... Mussolini ne se laissa pas bluffer ; il poursuivit son entreprise et envahit l’Abyssinie. Il y eut alors une pause pendant que Baldwin appelait à des élections générales ; cela eut pour effet de donner aux « vieillards » le temps de souffler et de se remettre de leur surprise. Baldwin fit campagne sur un programme politique qui comprenait le soutien à la SDN et le réarmement pour soutenir la sécurité collective. Pendant ce temps, les diplomates et Neville Chamberlain entre autres, poursuivirent doucement le travail pour effacer les dommages, qu’à leurs yeux, le discours de Hoare avait causés.
Ayant remporté l’élection sur une politique de soutien à la SDN, cependant le gouvernement comme l’écrivait Macmillan était engagé « sur son honneur », en dépit d’une phrase de réserve ici ou là, à arrêter Mussolini. Quand la Chambre des Communes se réunit en novembre, personne -au Parlement ou au dehors- ne doutait que c’était « leur ferme intention ». Le Secrétaire aux affaires étrangères et le Foreign Office pensaient tout autrement. Moins de quinze jours plus tard le Secrétaire aux Affaires étrangères, Samuel Hoare, en route pour prendre des vacances en Suisse, s’arrêta à Paris ; le chef du Foreign Office se trouvait, comme par hasard également à Paris, et l’accord avec Pierre Laval qui laissait Mussolini libre d’occuper presque toute l’Abyssinie fut conclu et signé sans aucune consultation avec Londres. Il ne resta à l’Abyssinie que ce que le Times décrivit dans une formule célèbre « un couloir pour les chameaux » pour rejoindre la mer.
Dans sa biographie de Neville Chamberlain, écrite environ un quart de siècle plus tard, Jan Macleod porta un jugement correct. « Historiquement », écrivait-il, « la crise abyssinienne a souvent été présentée comme un intermède comparé avec le drame principal de l’avance de l’Allemagne à la conquête du monde. En fait ce fut le tournant des années trente. Hitler s’empressa d’agir devant l’évidence de notre faiblesse ». Au bout de deux mois, à peine, ses troupes occupèrent la Rhénanie en violation du Traité de Versailles. Pas plus que Mussolini en Abyssinie, il ne rencontra d’opposition.
L’ignoble trahison de Hoare à l’égard de l’Abyssinie fut finalement l’arrêt de mort de la SDN ; il avait été démontré qu’elle était impuissante, sans autorité ni leadership. La Grande-Bretagne avait eu sa chance d’en prendre la direction mais elle n’en avait pas eu le courage. Hoare et ses associés vieillissants, avaient mis fin à toute son action future au nom de la SDN. L’illusion comme quoi on pouvait compter sur la « sécurité affective », et la trahison qui avait assuré qu’elle ne marcherait pas, avaient été mises en évidence. Le mémorial à la mémoire des millions d’hommes morts pendant la guerre de 1914 avait été démoli sans vergogne. Les « vieux » furent sérieusement surpris par la réaction publique et ils discutèrent désespérément pour savoir à qui faire porter les torts et finalement ils durent sacrifier Hoare en le remplaçant par Eden.
Mais au fur et à mesure que 1936 passait, toute l’attention se concentra sur l’accélération du rythme des évènements - l’occupation de la Rhénanie, la participation d’Hitler et de Mussolini à la guerre civile espagnole du côté d’un dictateur de leurs amis, la non-intervention de la Grande-Bretagne, l’assassinat de Dollfus et l’occupation de l’Autriche. Beaucoup de jeunes avaient déjà choisi leur camp et avaient été tellement scandalisés qu’ils étaient partis en Espagne pour lutter contre les dictateurs. Mais l’opinion publique en général commença seulement de ressentir un frémissement de crainte, tout en restant incrédule. Peu de gens étaient prêts à penser l’impensable : que les dictateurs pourraient avoir des idées qui iraient au delà des réparations de ce que le Traité de Paix n’avait pas arrangé en 1919. Bien qu’ils puissent se montrer utiles comme « un rempart contre le communisme » les dictateurs pourraient, après tout, être assez fous pour se diriger vers une répétition des horreurs passées : une guerre de revanche qui réaffirmerait leur orgueil national. Un clivage de l’opinion publique commençait de s’ouvrir, qui deviendrait un abîme à Munich. L’année suivante Neville Chamberlain, devenu Premier ministre, prit effectivement en main les relations avec les dictateurs, agissant dans le dos d’Eden : et inévitablement la déchirure ne fit que s’aggraver.
C’est sur cet arrière plan, et il ne faut pas s’en étonner puisque c’était leur avenir qui était en jeu, que beaucoup de jeunes se mirent à débattre entre eux des raisons de l’échec de la SDN dans laquelle ils avaient été encouragés par leurs aînés à placer tant de confiance.
En 1935, deux jeunes hommes, qui avaient fréquenté la même école et quitté Oxford seulement deux ans avant, se retrouvèrent à travailler pour le même homme ; l’un Derek Rawnslay quitta bientôt cet emploi pour lancer deux affaires personnelles, les deux ayant trait au cinéma. L’autre, Charles Kimber, resta dans la presse et dans les départements politiques de compagnies pétrolières, visant une carrière politique. Ils se mirent à déjeuner ensemble, pratiquement chaque semaine et ils furent bientôt rejoints par d’autres. Inévitablement ils soulevèrent la question et se trouvèrent d’accord sur le fait que, les chefs d’Etat, chacun agissant au nom de son pays (écho du principe « l’Etat c’est moi ») on ne pouvait pas leur faire confiance pour agir collectivement. La SDN elle-même aurait dû avoir le pouvoir d’agir, mais pour cela il lui fallait des forces sous son propre commandement ; elle aurait dû être composée de membres élus pour autoriser l’usage de ces forces, plutôt que de chefs d’Etats qui étaient des chefs de partis politiques, chacun prétendant représenter même ses opposants.
Munich c’était plus que ce que Rawnsley ne pouvait encaisser. Il appela Kimber, et lui dit « Charles, il nous faut faire quelque chose. Si tu quittes ‘ce vieux Mudlitup’ (notre surnom pour notre patron) tu peux prendre une pièce dans mon bureau de Gordon Square et nous lancerons une organisation ». Kimber, dont l’indignation était égale, démissionna immédiatement de son emploi et déménagea au bureau de Rawnslay au 44 Gordon Square. Là, il se mit tout de suite à écrire une brochure qui devait expliquer les buts de l’organisation ; tandis qu’il rédigeait, les deux amis furent présentés à Patrick Ransome, un journaliste indépendant qui avait une licence de première classe en droit international. Il leur dit que ce qu’ils proposaient étaient une fédération et leur proposa de se joindre à eux. Ils se mirent d’accord sur la brochure qui fut tirée à plusieurs exemplaires. Puis chacun des trois envoya des exemplaires à ceux de ses amis pouvant être intéressés et une réunion enthousiaste de soixante ou soixante dix personnes approuva ce qui avait été écrit. Qui plus est, ils collectèrent de l’argent pour que le document soit imprimé et distribué ; Kimber choisit quelques 400 noms dans le Who is who, qui s’intéressaient aux affaires internationales et il leur porta le document sous le titre Federal Union avec une lettre d’introduction manuscrite dans chaque enveloppe.
Les réactions furent étonnantes ; Kimber et Ransome (Rawnsley étant totalement pris par ses affaires) furent très occupés à interviewer ceux qui avaient répondu. Parmi ceux-là il y en eut qui proposèrent une aide personnell et une réunion avec eux fut organisée. Un Comité consultatif fut recruté, comprenant Lord Lothian, des membres du Kindergarten de Milner pour la reconstruction de l’Afrique du Sud après la guerre des Boers et secrétaire personnel de Lloyd George à la Conférence de la paix de Versailles ; également Lionel Curtis qui était un des « jeunes hommes » de Lord Milner et le fondateur de Chatham House (l’Institut Royal pour les affaires internationales), le professeur Barbara Wooton, directrice des Etudes sociales à l’Université de Londres, Wickham Steed ex-rédacteur en chef du Times, et Kingsley Martin, rédacteur du New Statesman qui était alors l’hebdomadaire obligé de tous ceux qui s’intéressaient à la politique.
Ils suggérèrent une courte profession de foi, brève déclaration, que chacun fit circuler parmi les personnalités haut placées et de bonne volonté de ses connaissances pour qu’ils la signent. Tout signataire exprimait son soutien pour une Assemblée supra-nationale plutôt qu’internationale ; mais ils ne se déclaraient pas membres de Federal Union bien que leurs signatures puissent être utilisées à des fins de propagande pour l’organisation. La liste des personnalités en vue parmi les signataires, quand le document fut publié, était impressionnante. Elle fut publiée sous forme de tract, on doit pouvoir en trouver des copies aux Archives de Federal Union (à la LES, la London School of Economics), avec beaucoup d’autres documents. Dans la même période, Gordon Square avait envoyé des lettres à la presse, aussi bien nationale que locale, ce qui déclencha une averse puis un flot de réponses. Une bonne partie disait, « c’est exactement ce que nous pensions » ; un nombre important envoyait de l’argent. En retour on leur conseillait de faire ce que les fondateurs avaient fait : organiser une réunion d’amis de la même opinion et créer une section. Federal Union était en route. D’abord il n’y eut qu’un secrétaire, puis un petit bureau soutenu par de nombreux jeunes qui prêtèrent leur concours bénévolement. Puis des statuts furent adoptés à une réunion des représentants des sections qui s’accompagna d’un Conseil général et d’un Comité exécutif.
Il est difficile de savoir combien de membres versèrent une cotisation. 14.000 est un chiffre, 60.000 en est un autre. On est en général d’accord sur le fait qu’il y avait plus de 200 sections dans tout le pays. Ce qui est certain c’est que moins de dix-huit mois après avoir envoyé la brochure d’origine, Federal Union était devenue tellement connue et soulevait tellement d’intérêt qu’un meeting dans l’Old Queens Hall, l’auditorium où avaient lieu les Concerts Promenade de Henry Wood (bientôt anéanti par les bombes) en remplit les deux ou trois mille places.
Au cours de l’année avant qu’Hitler ne déclare la guerre, et pendant une bonne partie de l’année suivante tandis qu’il se concentrait ailleurs, la Grande-Bretagne profita de la « drôle de guerre ». Lord Lothian écrivit The Ending of Armageddon et en fit don à Federal Union pour distribution à ses membres. De plus en plus de sections furent créées à mesure que le nombre de membres et l’argent augmentait. Federal Union n’eut jamais de très gros sponsors. D’autres organisations virent le jour, parmi elles le New Commonwealth de Sir Richard Acland, soutenu par le Picture Post de Edward Hulton -qui soutenait également Federal Union. Mais les mois passaient et la mobilisation commença à avoir de sérieux effets : de plus en plus de membres furent appelés pour le service militaire, les cotisations et le nombre de membres commencèrent de chuter. Au début de la guerre, Sir William Beveridge acheva une tâche qu’il avait confiée à Rawnslay ancien étudiant à l’University College à l’époque où Beveridge le dirigeait. Beveridge créa un Institut de Recherche de Federal Union, avec Ransome comme secrétaire en recrutant un certain nombre de personnalités éminentes, chacune dans son champ d’étude. Il forma des groupes pour discuter des effets d’une fédération européenne dans leurs spécialités respectives et pour faire rédiger des conclusions à un membre de chaque groupe. Federal Union publia las résultats dans une série de Federal Tracts. Les professeurs Lionel Robbins, Ivor Jennings, Barbara Wooton, le Dr. C.M. Joard et Lord Lugard figuraient parmi les auteurs. L’Institut survécut à la guerre et devint le Federal Trust (qui existe encore actuellement). Les sections et l’organisation telle qu’elle avait commencé n’y survécurent pas. Quand les bombes commencèrent de tomber, Federal Union, sous cette forme, comme toutes les autres associations volontaires faites de sections locales, furent parmi les victimes. Rawnsley avait été mobilisé. Il fut tué (accidentellement) et Kimber donna sa démission. R. W. G. Mackay, plus tard membre du Parlement prit le relais, mais mourut prématurément. Federal Union d’après-guerre, que John Pinder rejoignit il y a plus de 50 ans, était une organisation bien différente, inévitablement, de celle d’avant-guerre, fondée il y a soixante ans et bien qu’elle conserve le même nom.
Quels résultats avait eu Federal Union, en supposant qu’elle en ait eu ?
Les « grands et les bons » avaient été prêts à signer la Déclaration d’intentions avant la guerre, mais sans s’engager à adhérer à l’organisation. C’était, cependant, une contribution importante. Mais cela serait passé inaperçu, si Federal Union elle-même n’avait pas été là pour lancer l’opération et en assurer la publicité. Federal Union avait fait assez de bruit pour pouvoir revendiquer, avec quelque raison, qu’elle avait porté l’offre d’union avec la France jusqu’à « l’art du possible » (du moins dans un moment désespéré). Mais elle peut aussi prétendre avoir mis la fédération au premier rang de l’agenda des discussions publiques sur les « buts de guerre » -autant que le permettait l’insistance de Churchill sur « la reddition sans condition ».
« L’Europe doit se fédérer ou périr », dit Clément Attlee, en 1938. L’opinion étant maintenant divisée sur des lignes partisanes, en Grande-Bretagne, à l’heure qu’il est, les allégeances aux partis sont trop fortes pour permettre à ceux qui veulent une union véritable de se rassembler. A moins qu’ils n’y parviennent, Attlee aura raison et l’Europe restera un ramassis de petits Etats égoïstes, chacun exerçant sa « souveraineté nationale » en décidant de succomber à la corruption, aux pressions ou à la flatterie d’un Empire américain à la puissance écrasante.
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