La paire de dames socialistes pour la bataille du Sud-Est

Les candidates socialistes Sylvie Guillaume et Farida Boudaoud interviewée par les Jeunes Européens - Lyon pour le Taurillon

, par Jeremy Perez

La paire de dames socialistes pour la bataille du Sud-Est

Les Jeunes européens – Lyon ont rencontré Sylvie GUILLAUME et Farida BOUDAOUD, 2ème et 4ème sur la liste du Parti Socialiste emmenée par Vincent PEILLON dans le Sud-Est pour les élections européennes du 7 juin.

JE – Lyon : Comment concevez-vous le rôle d’une eurodéputée ?

Sylvie Guillaume et Farida Boudaoud : L’eurodéputé(e) est aujourd’hui le lien démocratique nécessaire entre l’Europe et les citoyens. En plus d’un travail de fond, le travail de terrain est indispensable afin de rester en phase avec les évolutions de la société. Cela implique une présence en commission et en session, mais aussi d’être active en dans la circonscription pour répondre aux demandes des citoyens, mais aussi pour parler, informer et expliquer aux citoyens les actions menées par l’Union européenne.

JE-L : Cette campagne européenne est-elle celle du PS français ou celle du PSE ?

SG : C’est une campagne résolument européenne, avec un programme européen, le Manifeste, élaboré par l’ensemble des socialistes européens, et donc défendu par les 27 partis socialistes européens. Ce programme commun traduit une volonté de changement politique qui va au-delà des bonnes intentions. Cela passe par exemple par la défense d’une directive cadre sur les services publics au niveau européen. Cette campagne est donc d’abord celle du PSE, et le PS français y participe très activement en défendant des propositions qui précisent et complètent le Manifeste.

Un programme européen élaboré par l’ensemble des socialistes européens

FB : La dimension européenne de cette campagne est d’autant plus forte que l’issue du vote du 7 juin prochain déterminera la majorité au Parlement européen et le Président de la Commission européenne. Cette dimension politique de l’Europe est parfois difficile à appréhender, mais elle est aujourd’hui nécessaire. Et pour cela, le PSE souhaite qu’une majorité progressiste se forme au Parlement européen, pour une Commission de gauche qui serait dirigée par Poul Nyrup Rasmussen, actuel président du PSE.

JE-L : Les Jeunes Européens - France ont élaboré un pacte à destination des candidats. Par ce pacte, ceux-ci s’engagent à réaliser une campagne vraiment européenne, à une assiduité au parlement, etc. Acceptez-vous de signer ce pacte ?

SG : J’accepte de signer ce pacte. Il est évident que les enjeux européens doivent être au centre de cette campagne, mais il ne faut pas pour autant nier l’existence du local. Au contraire, je pense que les enjeux européens, nationaux et locaux sont fortement liés, et c’est une façon de rapprocher les citoyens de l’Union européenne que de leur montrer la force d’action de l’Europe près de chez eux. Ainsi, en Rhône-Alpes, les fonds européens pour les programmes 2007-2013 représenteront de façon certaine 1,2 milliards d’euros pour les crédits affectés. Ces investissements témoignent de l’importance de l’action de l’Europe pour le développement des territoires.

FB : J’accepte également de signer. L’Europe aujourd’hui a besoin d’un Parlement fort qui puisse lui donner une visibilité démocratique et une réelle puissance d’action. Pour cela il faut que les Députés européens soient visibles, audibles et donc présents. Donc je m’y engage évidemment. Et pour souligner notre ancrage européen, le PS français adhère automatiquement à un parti européen, le PSE. Ce qui n’est pas le cas de tous les partis, à l’exemple de l’UMP.

JE-L : La Conférence dite DURBAN II des Nations Unies s’est achevée sur un constat d’échec. Les représentants des pays européens ont quitté la salle, unis, lors de l’intervention controversée du Président Iranien. N’est-ce pas l’occasion pour le Parlement européen d’affirmer son rôle sur le plan des valeurs et des Droits humains ?

FB : L’Europe est un continent porteur de valeurs et si l’on souhaite continuer à peser dans ce domaine le Parlement européen doit prendre toute sa mesure et s’affirmer sur ce plan en tant qu’assemblée élue par le peuple européen. D’ailleurs, le PSE considère que la démocratie et les droits de l’Homme sont des valeurs communes qui font de l’Union européenne un acteur majeur sur la scène internationale. Au-delà, ces valeurs engagent notre responsabilité pour soutenir concrètement les processus démocratiques et lutter contres les violations des droits humains. Ainsi, pour seule réponse à ces problèmes, la droite a voté la « directive de la honte ». La droite a refusé notre proposition de créer une taxe éthique basée sur le respect de la dignité humaine face aux conditions de travail. Le PSE s’est lui battu pour l’inclusion d’une clause relative au respect des droits de l’Homme dans tous les accords commerciaux de l’Union. Mais les valeurs et les droits humains, nous devons aussi les défendre dans l’Europe. Nous ne voulons pas sacrifier la liberté sur l’autel de la sécurité comme le font actuellement le PPE et l’UMP.

Le PSE veut agir pour que l’Union européenne soit un espace de liberté et de justice dans lequel les droits de chacun sont garantis, sans distinction d’origine, de sexe, de religion, d’âge ou d’orientation sexuelle. En fait, un espace dans lequel les violations de ces droits seraient enfin sanctionnées. Le PSE souhaite également étendre l’applicabilité de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, texte essentiel en matière de respect des droits et des valeurs puisqu’il évoque notamment le clonage reproductif et son interdiction sur sol de l’Union, et il aborde des sujets essentiels, comme l’interdiction des discrimination par exemple. Nous souhaitons aussi que la prise en compte des positions du Parlement européen soit systématique sur les questions touchant aux droits fondamentaux et aux libertés individuelles. En étant la seule institution élue directement par les citoyens, il est le mieux à même de donner toute leur légitimité aux décisions qui affectent ces derniers dans leur vie quotidienne.

JE-L : Concernant les Droits humains justement, quel doit être le rôle de l’Union européenne en matière d’immigration ?

SG : Nous souhaitons une politique européenne d’immigration donnant davantage de place à l’immigration légale afin de favoriser l’intégration et de respecter les droits fondamentaux. Cela nécessite d’engager un véritable dialogue avec les pays tiers. Face à cette question, on voit la droite française, UMP en tête, défendre l’idée d’une « Europe forteresse », avec des dérives graves : en votant pour la directive « retour », les députés européens du PPE (alliance dont est membre l’UMP) ont cautionné des mesures attentatoires à la dignité humaine, liberticides, disproportionnées et dangereuses pour les personnes vulnérables. Il est inadmissible de pouvoir mettre en rétention, jusqu’à 18 mois, des personnes qui n’ont commis aucun crime ! Ou encore de vouloir expulser des mineurs non accompagnés vers des pays de transit dans lesquels ils n’ont aucune attache ! Et cela est d’autant plus inacceptable quand on sait que des députés UMP ont pu constater les conditions inhumaines dans lesquelles de nombreuses personnes sont détenues.

JE-L : Une Europe de la Défense peut-elle exister et serait-elle une réponse pertinente aux problèmes liés au terrorisme mondial ?

FB : Aujourd’hui il est évident que l’Union européenne doit avancer dans le sens d’une défense mieux intégrée, mieux coordonnée afin d’être justement plus pertinente face aux nouvelles menaces telles le terrorisme ou les restrictions de circulation et d’expression. Sans retomber dans la politique nationale, la réintégration de la France dans l’OTAN a des incidences majeures sur ce dossier. A l’inverse de ce que Nicolas Sarkozy a prétendu, la création d’une véritable politique européenne de sécurité et de défense n’est pas permise par le retour de la France dans le commandement intégré de l’OTAN. Au contraire. On peut aujourd’hui craindre un abandon de la perspective d’une défense européenne, voire une Politique européenne de sécurité et de défense limitée à des actions subalternes. Le pire serait de faire de la défense européenne une simple filiale de l’OTAN. Pour éviter cela, le Président Mitterrand avait, en 1990-1991, testé l’hypothèse d’une réforme de l’OTAN avant un éventuel changement de position de la France. Nicolas Sarkozy ne l’a pas fait et a pris le risque de noyer ce dossier majeur.

JE-L : Les citoyens européens sont de plus en plus attentifs à leur environnement, comment souhaiteriez-vous utiliser votre mandat d’eurodéputée pour construire une Europe durable ?

SG : L’Europe durable est aujourd’hui une nécessité que l’on doit retrouver dans l’ensemble des politiques que nous menons. Il faut l’appuyer sur quatre piliers essentiels : les politiques agricole et de la pêche, l’élaboration d’une politique énergétique européenne commune, la lutte contre le changement climatique et le développement d’une croissance verte. J’insisterais sur la PAC. Nous souhaitons promouvoir une agriculture qui continuerait à nourrir quantitativement et qualitativement l’Europe, et nous voulons dans ce domaine réaffirmer l’importance des instruments de régulation et de gestion des marchés indispensables en temps de crise. Nous désirons aussi engager une « révolution verte » qui conduira à l’adoption de modes de production écologique et économe, en accord avec des critères de performance sociale, environnementale et économique. Dans ce sens, l’agriculture biologique doit être fortement soutenue.

Accélérer la transition vers une plus grande sobriété énergétique

FB : L’intégration européenne s’est faite par le charbon et l’acier. Aujourd’hui le défi du changement climatique nous impose de réduire au plus vite nos émissions de gaz à effet de serre. Pour cela, il faut accélérer la transition vers une plus grande sobriété énergétique et encourager l’utilisation collective et concertée d’énergies renouvelables. D’autant plus que la question énergétique impacte non seulement la dimension interne, avec la question de l’accès et du prix de l’énergie, mais aussi externe concernant la sécurité et la diversification de l’approvisionnement. La droite ne se montre pas à la hauteur sur cette question. Sur le paquet climat, le PPE a refusé de mettre à l’amende les Etats membres qui ne respecteraient pas les objectifs de développement des énergies renouvelables et s’est montré très frileux sur les objectifs en matière de rejet de gaz à effet de serre. C’est pour cela que nous défendons l’élaboration d’une politique énergétique européenne fondée sur le développement durable, la sécurité et l’indépendance énergétiques, mais surtout sur la solidarité entre Etats européens en cas de crise de l’énergie.

JE-L : D’ailleurs, nous sommes aujourd’hui confrontés à une crise économique mondiale d’une ampleur exceptionnelle. Selon-vous, comment l’Union européenne peut-elle répondre à cette crise ?

FB : La crise financière que nous vivons a des effets dévastateurs sur l’économie et l’emploi. Les Etats membres ont mis en œuvre des plans de relance inégaux en taille et dans leurs objectifs, sans réelle coordination. La Commission européenne a présenté, fin 2008, un « plan européen pour la relance économique » qui manque clairement d’ambition et de pouvoir contraignant. D’ailleurs, la mesure principale, injecter 5 milliards d’euros supplémentaires dans le budget communautaire en 2009 et en 2010, est loin d’être actée.

Le plan européen pour la relance économique manque d’ambition

Face à ces situations d’urgence, le PPE ne réagit pas et prône inlassablement une application stricte de la rigueur budgétaire et des règles de la concurrence. Il lance aussi des appels à plus de flexibilité sur le marché du travail. Cette politique aurait pour conséquence de faciliter les licenciements et les plans sociaux et la réduction des acquis sociaux. Le PSE demande la mise en œuvre de mesures de bon sens au regard du contexte socio-économique. Il faut plus de coordination entre les politiques économiques des Etats membres de l’Union ainsi qu’une plus grande solidarité économique entre les Etats membres. Cela nécessite aussi davantage d’investissements publics et privés ciblés et des facilités de crédit, notamment à destination des PME les plus durement touchées par la crise. Un autre élément essentiel pour pouvoir sortir de la crise, il faut que les politiques de recherche menées à l’échelle de l’Union soient plus ambitieuses. Pour cela, alors que nous sommes à moins de 1% du PIB européen pour l’effort de recherche, il nous faut atteindre les 3%. Si l’Europe investit plus dans l’innovation, la recherche et le développement, elle créera les emplois de demain et relancera son économie.

JE-L : Et dans tout ça, l’Europe sociale, imparfaite, conditionnelle ou future ?

SG : L’Europe sociale ne doit en aucun cas être conditionnelle, car elle est nécessaire. Je dirais d’abord qu’elle est imparfaite parce qu’elle n’a jamais été réellement mise en place. En plus de ça, l’ensemble de la droite française et européenne a régulièrement porté des attaques sévères aux acquis sociaux en proposant de réduire les charges sociales sans contreparties en termes de création d’emplois. Cela induit une concurrence néolibérale et conservatrice entre les Etats membres qui nivelle les droits sociaux par le bas. Ainsi, au niveau européen, l’UMP a voté pour contraindre les travailleurs à une activité au-delà de l’âge légal de retraite. Cette même droite qui préfère le dumping salarial et la généralisation des salaires de misère puisqu’elle a refusé la proposition du PSE visant à l’instauration d’un salaire minimal. Mais j’ose croire encore en l’Europe sociale. Pour cela, le PSE a des propositions.

D’abord, la stratégie européenne pour une croissance écologique, innovante et riche en emplois qui créera 10 millions de nouveaux emplois à l’horizon 2020. En parallèle, nous proposons un Pacte européen pour le développement de l’emploi qui comprend notamment un plus large accès au Fond Européen d’Ajustement de la Mondialisation, très peu utilisé notamment par la France qui n’en a utilisé que moins de 0,4%, soit moins de 4 millions d’euros sur le milliard potentiel. Nous souhaitons aussi la mise en place d’un Accord européen sur les salaires. Pour une réelle effectivité de ces propositions, il faut que les droits sociaux priment sur les droits économiques, et nous nous y engageons.

Propos recueillis par Jérémy PEREZ, pour le Taurillon

Sylvie GUILLAUME est Conseillère régionale Rhône-Alpes depuis 1998 et Adjointe au Maire de Lyon (69) en charge des affaires sociales, de la santé et du handicap depuis 2001.

Farida BOUDAOUD est Conseillère régionale Rhône-Alpes depuis 2004, déléguée à l’apprentissage depuis 2007. Elue municipale à Décines (69) depuis 1997, elle est aujourd’hui Adjointe au Maire en charge du logement et des relations internationales.

Illustration :Meeting européennes à Paris

Source : © philippe grangeaud / solfé communications ; via Flickr

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