Le Taurillon : Vous êtes la Présidente de l’Assemblée des Régions d’Europe (ARE). Quel est son rôle dans l’Europe actuelle ?
Michèle Sabban : L’ARE a été créée par Edgard Faure en 1985 dans le but de faire connaître l’Europe aux citoyens en passant par les régions. Au commencement, elle réunissait 47 représentants de régions pour maintenant en rassembler plus de 250 venant de 35 pays.
L’ARE a pour but de permettre les échanges d’expériences et de bonnes pratiques entre ses membres. Jusqu’à la présidence de Riccardo Illy, ces échanges tournaient autour des faits de société comme la culture ou l’éducation. C’est ce dernier qui a introduit l’économique dans nos réflexions. Pour ma part, j’y ai associé la thématique du développement durable car c’est un chantier qui ne peut se mettre en place sans les régions.
Par exemple, sur le changement climatique, nous avons organisé une grande enquête pour connaître les expérimentations en la matière. En Suède, dans la région de Göteborg a été mis en place un système de collecte et de stockage de la glace qui permet une climatisation de leurs hôpitaux durant l’été. C’est une initiative qui peut être reprise dans différentes régions d’Europe.
Le Taurillon : Quelle est la place des régions dans la construction européenne ?
M.S : Au vu de l’échec des gouvernements dans la gestion de la crise, la place des régions s’impose. Elles jouent un rôle de plus en plus important dans le développement économique et ce n’est pas pour rien que notre récent sommet sur la crise, premier d’une série de trois sommets dont le dernier se tiendra à Paris en mai 2013, s’est intitulé « Les Régions au chevet de l’Europe ». Aujourd’hui, le fait régional est entré dans le quotidien de nos gouvernements et nous sommes devenues un acteur clé de la construction européenne.
Cependant, les leaders régionaux ont tendance à uniquement regarder ce que fait la Commission européenne, ce qui est une erreur. Seuls nos gouvernements sont habilités à négocier avec José-Manuel Barroso. Nous devons donc nourrir nos dirigeants avec nos solutions pour qu’ils puissent eux-mêmes porter et mettre en place nos propositions.
Nous avons par exemple initié le programme éducatif Eurodyssée. C’est un projet créé par Edgard Faure visant à favoriser les échanges pour les jeunes européens demandeurs d’emploi. Il vise à apporter une aide à des individus de 18 à 30 ans non diplômés ou faiblement diplômés. Par exemple, si une région souhaite recevoir un certain nombre de stagiaires pour travailler dans des institutions publiques ou privées, elle contacte une autre région d’Europe qui les sélectionne. La région d’origine du stagiaire finance le voyage et la région d’accueil prend en charge l’hébergement. C’est un système qui permet à des jeunes non diplômés de disposer d’une expérience professionnelle et de renforcer ses compétences linguistiques.
Le Taurillon : Est il difficile pour les régions européennes de coopérer entre elles alors qu’elles n’ont pas les mêmes prérogatives ?
M.S : Effectivement les régions ont des statuts différents, certaines ont même des mini gouvernements. Mais ce n’est en rien un obstacle à notre travail. Nous cohabitons et dialoguons sur des sujets communs car notre fil conducteur est l’échange de bonnes expériences.
D’ailleurs, une de mes priorités est de constituer des Assemblées identiques à la notre sur les cinq continents. En Asie, l’Association des gouvernements régionaux d’Asie du Nord Est (NEAR) réunit 70 gouvernements régionaux de Chine, des deux Corées, du Japon, de Russie et de Mongolie. Je suis également en train d’influencer la création d’une Assemblée des Régions d’Afrique.
En effet, si nous avions ce type d’assemblée sur les cinq continents, nous serions beaucoup plus forts. Lors du Sommet de Pescara, j’ai lancé les « Régions Unies d’Europe » pour que nous puissions appuyer nos gouvernements. L’ARE est une force de propositions.
Le Taurillon : On assiste dans certaines régions d’Europe à une forte demande d’autonomie comme en Ecosse, en Catalogne ou en Italie du Nord. Est-ce un phénomène auquel vous assistez dans les autres régions d’Europe ?
M.S : Les périodes de crise sont toujours des périodes difficiles où les tentatives de repli sur soi sont très fortes. Il est cependant important de conjuguer nos moyens et nos efforts pour pouvoir en sortir le plus rapidement possible. En Italie, beaucoup de régions considèrent la crise comme une « guerre » et ont tendance à vouloir s’enfermer. En Espagne, les régions disposent d’un très grand pouvoir sur le plan législatif et économique. Ce sont des pays ayant une histoire particulière que l’on peut difficilement retrouver ailleurs. L’Espagne et l’Italie sont d’ailleurs deux Etats où les régions sont très politisées, ce qui explique cette plus forte tendance à l’autonomie.
C’est donc un phénomène que je ne constate pas ailleurs.
Le Taurillon : Pensez-vous que l’avenir de l’Europe réside dans « l’Europe des régions » ?
M.S :Je suis pour un Sénat des régions d’Europe qui porterait une voie spécifique dans le concert européen. Je défends le concept des régions unies d’Europe car je pense que c’est un échelon nécessaire pour sortir notre continent de la crise. Nous avons des propositions à amener au vu de notre proximité avec les acteurs économiques.
Les Régions doivent se coordonner avec les gouvernements pour apporter des solutions crédibles et efficaces. Cependant elles ne doivent pas se substituer aux Etats mais collaborer avec eux.
1. Le 14 octobre 2012 à 05:22, par Xavier En réponse à : Michèle Sabban : « Je suis pour les Régions unies d’Europe »
Idéalement, il nous faudrait avoir une Fédération européenne des régions, où la plupart des pays actuels seraient un échelon totalement inutile. Donc plutôt que d’avoir une UE où le poids de la France et de l’Allemagne est malsain, on aurait une FE avec Catalogne, Normandie, Bavière, Écosse, Estonie, etc. Un ensemble de petits et moyens pays.
Aucun ne pèserait trop. La région est l’échelon idéal pour bon nombre de missions (éducation, santé, police, une partie de la justice, une partie du transport), tandis qu’on en confierait d’autres, clairement, dans une Constitution, à la Fédération : armée, diplomatie, une partie police fédérale, quelques infrastructures, les douanes, la BCE indépendante et la défense du consommateur (avec quelques normes communes).
Ce serait incroyablement plus claire (et efficace) que l’usine à gaz qu’est l’UE d’aujourd’hui, où elle s’occupe de tout, sauf de l’essentiel.
Enfin il faut souligner que ce n’est pas parce qu’une région veut l’autonomie qu’elle se ferme sur l’extérieur ! On peut très bien imaginer une Alsace autonome (donc en-dehors de la France, ce pays hyper-centralisé), mais parfaitement intégrée en Europe.
2. Le 12 mars 2019 à 13:35, par JB Pichancourt En réponse à : Michèle Sabban : « Je suis pour les Régions unies d’Europe »
Les Nations ont montré leur inutilité pour affronter les problèmes du XXIeme siècle.
– D’un côté trop les nations sont trop déconnectées et peu démocratiques face aux préocupations du cotidien des citoyens, et peu respectueuse des cultures et langues intra-nationales (par rapport à l’échelle régionale),
– De l’autre elles sont trop peu influentes pour affronter les enjeux internationaux (parrapport à l’échelle européenne).
Ce qui serait révolutionnaire c’est de créer enfin un parti politique Français « Régions Unis d’Europe » appelé à avoir un candidat à la présidentielle Frannçaise. Projet ayant pour objectif de désinguer les états Nations et reconstruire l’Europe à partir des régions. La stratégie, Négocier ce changement contre le la place de membre au conseil de sécurité pour l’Europe + relocaliser le parlement Européen depuis Strasbourg à Bruxelle.
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