Parlement européen

Mobilisons nos eurodéputés

Tribune publiée dans Libération le 9 juin 2004

, par Guillaume Klossa, Jessica Chamba

Mobilisons nos eurodéputés

Du 10 au 13 juin prochain se tiendront les premières élections du Parlement européen élargi à 25 Etats membres. Ces élections seront pour nous, citoyens européens résidant en France, l’occasion d’élire 78 députés européens qui devront, pendant les cinq prochaines années, fournir un travail considérable sur tous les sujets d’actualité européenne.

En effet, l’Europe se situe à un moment historique de sa construction : l’élargissement de l’Union européenne, rappelons-le, a converti cette Union en un espace de consommation et de libre circulation parmi les plus importants de la planète, devançant même les Etats-Unis. Nous formons désormais un ensemble économique intégré, mais il s’agit maintenant d’aller plus loin. L’Union européenne ne peut se satisfaire d’être un simple espace de libre-échange. Il lui faut aujourd’hui affirmer une réelle ambition politique et sociale, et définir une stratégie d’action permettant le développement de chacun de ses Etats membres tout en respectant leur diversité. La définition de cette vision, de ces ambitions passera désormais par le Parlement européen. Les députés européens élus dans quelques jours auront donc un rôle crucial à jouer. Or, il serait fort regrettable que ce grand débat se fasse sans les députés européens d’origine française.

Malheureusement, pour l’instant, c’est bien ainsi que les choses risquent de se passer. Deux récents rapports soulignent de nouveau la faible participation des députés européens français aux réunions du Parlement européen, sans parler de leurs positions très peu stratégiques au sein des Commissions et des groupes de travail de cette assemblée au dépens de l’influence de la France en Europe.. Les causes en sont multiples, mais semblent pouvoir se regrouper en une seule : le peu de place accordée au débat européen dans la vie et dans le débat politiques hexagonaux. Des progrès ont été faits et il existe des exceptions. Pour autant, à l’heure où il s’agit de construire cette nouvelle Europe politique, cette « Europe puissance » que tant de citoyens appellent de leurs vœux, les efforts menés par les partis politiques dans le sens d’une européanisation de leurs débats et de leurs candidats semblent bien faibles au regard des enjeux.

La réforme du mode de scrutin, découpant désormais la France en 8 grandes circonscriptions régionales, est censée rapprocher l’élu du citoyen. Soit ! Mais pour que les élus puissent parcourir ces grandes circonscriptions afin d’expliquer les positions prises au Parlement européen et d’écouter les revendications de leurs administrés en plus de tous les débats et de toutes les réunions qui auront lieu à Strasbourg, Bruxelles ou ailleurs, encore faut-il qu’ils en aient le temps ! Le mandat de parlementaire européen est un travail à temps plein et pas un job à mi-temps pour maire désœuvré ou ministre déchu. A ce propos, il serait souhaitable que les partis politiques s’engagent avant le 13 juin sur un code de bonnes conduites visant à garantir l’assiduité de leurs élus au Parlement européen. Parallèlement, seule une réelle européanisation du débat électoral semble pouvoir permettre de sortir du débat « pour ou contre le gouvernement ». Le projet de Constitution élaboré par la convention sur l’avenir de l’Union propose d’ailleurs que le futur Président de la Commission soit issu des élections au Parlement européen et non de marchandages entre Etats, comme cela semble être de nouveau le cas aujourd’hui. Une telle réforme permettrait peut-être de donner aux partis européens une véritable assise de campagne. Unis derrière un candidat, ils pourraient mettre en valeur leur vision de l’Europe de demain et fournir un choix clair pour les électeurs. La constitution de listes transnationales dans des grandes régions européennes viendrait souligner cette européanisation du débat déjà amorcée par la possibilité pour un ressortissant d’un autre Etat membre de l’Union d’être candidat sur une liste en France.

L’Union européenne qui doit aujourd’hui se construire ne se fera plus sur les bases de celles d’hier. Une nouvelle génération fonde de nombreux espoirs dans cette Europe politique naissante, ce qui impose de revoir la façon de faire et de concevoir la politique dans notre pays. La France n’est plus isolée : économiquement, on le sait depuis bien longtemps. Cela est également vrai sur tous les autres sujets de politique publique : sécurité, affaires étrangères, recherche, enseignement supérieur.... Des délégations de pouvoir ont eues lieu successivement et, aujourd’hui, seule une union intime avec nos partenaires européens peut nous permettre de peser sur la scène mondiale. Cette Europe se construit sur le mode fédéral. Ce mot fait encore peur aux Français, car peu savent exactement ce qu’il signifie. Il ne s’agit nullement de construire un super-Etat centralisé à Bruxelles sur le modèle français. Le modèle de la France est justement l’inverse d’une construction fédérale. Il s’agit au contraire, de transférer au niveau européen une partie des compétences que l’Etat ne parvient plus à gérer seul de manière optimale, là où elles y seront gérées de façon plus efficace. Le reste demeure toujours du ressort national ou régional le cas échéant et il ne s’agit nullement de priver nos Etats de leurs prérogatives. Toutes ces délégations de compétences sont des délégations volontaires ! Le fait est que plus de 70% des lois qui s’appliquent à nous au quotidien proviennent aujourd’hui du niveau communautaire. Parmi celles-ci, une part de plus en plus importante est approuvée en codécision par le Parlement européen. Ce Parlement a donc de réels pouvoirs et, a fortiori, de vraies responsabilités.

Les citoyens ne peuvent donc pas se désintéresser de ces élections qui marqueront le début d’une nouvelle Europe. Si l’on veut que la France participe pleinement à ce débat et soit le moteur de ces ambitions nouvelles, il nous faut des Hommes et des Femmes qui portent haut cette volonté ! Mesdames et Messieurs les candidats aux élections européennes, soyez ce « nouveau député européen » ambitieux, motivé et dévoué à ce bel avenir que nous, citoyens européens de la nouvelle génération, pressentons pour cette grande Union européenne de demain.

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