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USA : Le fédéralisme dans tous ses États

Un discours sur l’État de l’Union...

, par Ronan Blaise

USA : Le fédéralisme dans tous ses États

Comme on l’a déjà examiné dans les colonnes de ce webzine, c’est en Amérique - aux États-Unis - à la fin du XVIIIe siècle qu’a vu le jour la première fédération, le premier État fédéral des temps contemporains : les États-Unis d’Amérique, État fédéral pionnier, État fédéral remarquable entre tous.

Souvent décriés par certains - de ce côté-ci de l’Atlantique en tout cas - comme étant l’ « abomination de la désolation » centraliste, ces États-Unis sont en fait très probablement le pays le plus décentralisé (et le plus complexe...) du monde.

En effet, les 50 différents États de l’Union [1] n’ont certes pas le droit d’émettre leur propre monnaie, ou des passeports, ni de conduire une politique étrangère autonome ou de posséder une armée (toutes compétences "régaliennes" dévolues à l’État fédéral...). Mais il n’en s’agit pas moins d’une fédération composée d’États ayant gardé un certain nombre de pouvoirs plus que substantiels.

United States...

Les États-Unis sont aujourd’hui une « Union fédérale » solide où - après les turbulences de la guerre d’indépendance (1776-1783), de la seconde guerre anglo-américaine (de 1812) et la cruelle "civil war" ou "guerre de sécession" (de 1861-1865) - existent néanmoins encore bien des mouvements sécessionnistes (au Vermont), dans le "Vieux Sud", au Texas, en Alaska, aux îles Hawaii, à Porto Rico, etc) [2] même si leur audience politique reste - somme toute - relativement confidentielle...

Un État fédéral où - pour rendre plus évidente encore et plus "palpable" aux simples citoyens la séparation entre l’État fédéral et les États fédérés - on a alors eu recours, lors de la naissance de la fédération, à la création (en 1787) d’un "District autonome" [3] : le « (federal) District of Columbia ».

Il s’agissait là d’un territoire "neutre" chargé d’abriter - en toute neutralité à l’égard des États fédérés - la capitale fédérale [4], ses institutions politiques (la Présidence de l’État fédéral, le Congrès), judiciaires (la Cour suprême), économiques (la « Réserve fédérale »), militaires (le Pentagone) ainsi que son administration "centrale".

On the road, again...

Mais, en fait de pays prétendument centralisé, les États-Unis sont en fait un pays décentralisé à l’extrême. Un pays qui - par exemple - compte autant de modèles de permis de conduire et de codes de la route différents qu’il compte d’États. Mais où ceux-ci ont la bonté de reconnaître la validité des permis délivrés dans les autres États de l’Union...

Un pays où - dans certains États, comme l’Ohio (mais pas tous...) - on peut passer au rouge... si on tourne à droite (alors que dans certains États, c’est formellement interdit). Un pays où, avant d’aller passer vos éventuelles prochaines vacances en Arizona, vous prendrez donc bien soin de réviser attentivement les sept exceptions locales à la règle du "right turn on red" énumérées dans le code de la route de cet État...

Les États-Unis : un pays sans permis de conduire « national » en tant que tel (ni carte d’identité, d’ailleurs...) où le seul moyen qu’a astucieusement trouvé l’État fédéral - pour essayer d’harmoniser dans toute l’Union les lois de limitation de la vitesse (autorisée pour automobilistes...) - a été de conditionner l’octroi de ses "aides fédérales à l’entretien de la voirie" au strict respect de la norme fédérale décidée à Washington (soit - aujourd’hui - environ 105 km/h [5]).

Dans le même esprit, rappelons qu’en 1866, l’État fédéral - alors soucieux de moderniser le pays - a promulgué une loi qui permet à chaque État de l’Union d’adopter le système métrique européen. Or, il convient de remarquer qu’aujourd’hui - presque 150 ans plus tard - on attend encore le premier État qui osera se jeter à l’eau... de l’harmonisation. Quant au pouvoir fédéral, il ne légifère pas sur le sujet, ne voulant pas perturber le consommateur. Du coup, c’est donc aux fournisseurs étrangers (qui crient au scandale de ces "mesures protectionnistes déguisées"...) de s’adapter, tant bien que mal, au marché américain...

Money, Money, Money...

Un pays où l’impôt fédéral sur le revenu (créé par le XVIe Amendement à la Constitution, adopté en 1913 à l’initiative de l’administration démocrate du président Woodrow Wilson...) recouvre un taux étonnamment bas... mais où vous devrez également remplir une déclaration d’impôt sur le revenu pour l’État où vous résidez (comme c’est aujourd’hui le cas dans 49 des 50 États...). Sans parler de votre impôt municipal à régler... (ne serait-ce que pour financer un système scolaire public local souvent rigoureusement autonome...).

Soit - au minimum - au moins trois déclarations d’impôts à faire chaque année ! Sans parler des impôts à payer... en fonction du lieu de travail ! Comme ces lois « scélérates » qui imposent, à l’heure, le salaire de tout travailleur « temporaire » dans un État.

Comme par exemple ces taxes (et non pas seulement péages routiers...) - que doivent, depuis peu, payer à la municipalité de New York City - les habitants des États voisins du New Jersey et du Connecticut qui - chaque jour - viennent y travailler, au cours de leurs quotidiennes « migrations pendulaires de travail ».

Un pays où chaque État de l’Union peut ainsi librement décider de mettre en place sa propre fiscalité directe ou indirecte - sur la consommation (comme notre « T.V.A. »), sur les bénéfices ou l’implantation géographique des entreprises (comme notre « Taxe professionnelle », par exemple), sur la pollution générée par les outils de travail (comme notre principe juridique « pollueur / payeur »), etc - pour, par exemple, faire face à d’éventuelles difficultés budgétaires.

Business is Business...

Un pays où - pour tout ce qui touche très spécifiquement au commerce du tabac ou de l’alcool - vous avez affaire à cinquante réglementations différentes (une par État...) avec taxes d’importation à payer (à l’État de provenance ; et ce, sans même rien payer à l’administration fédérale !) voire formulaires administratifs à remplir ! Sans parler des États (voire Comtés...) qui vivent aujourd’hui encore sous un régime de stricte prohibition, comme l’ensemble des États-Unis entre 1919 et 1933 [6] !

Si bien que même les vendeurs de vin californiens n’arrivent, paradoxalement, pas toujours - aujourd’hui, dans leur propre pays (ce pays souvent décrit comme étant celui du « libre-échange » et du « laisser faire » libéral...) - à s’ouvrir un « marché intérieur » de l’Union en fait vraiment bien loin d’être réalisé !

Les États-Unis : un pays où vous pouvez donc être poursuivi par la justice pour le « crime fédéral » de « contrebande » et de « non respect » de certaines frontières commerciales internes (mais invisibles...), dignes du bon vieux temps de nos oubliées « douanes intérieures » et autres « gabelles » d’Ancien régime ! [7].

Justices pour tous

Un pays où la peine de mort existe - ou pas - selon les États. Et où, quand elle y est inscrite dans la loi (soit pour 36 d’entre eux...) s’y applique d’ailleurs souvent fort différemment selon les États : injection létale dans la quasi totalité d’entre eux à l’heure actuelle (mais avec la chaise électrique - voire le "gazage" - comme second recours proposé aux condamnés par certains États...).

Un pays où la police de chaque État (de chaque comté, de chaque municipalité, de chaque zone hors municipalité...) ne peut pas opérer hors de sa juridiction... Mais où traverser une "frontière" entre deux États après un délit non sanctionné par la Justice est un « crime fédéral » relevant alors de la compétence du très célèbre F.B.I., police fédérale de l’Union.

Un pays continent où tout truand qui se respecte est donc - comme en leurs temps Al Capone ou Bonnie et Clyde - recherché dans au moins une bonne vingtaine d’États différents : recherchés par une police fédérale qui n’a là d’équivalent dans le monde actuel qu’Interpol.

Et nous ne parlons là que des compétences clairement délimitées entre État fédéral et États fédérés. Car, pour le reste, la justice américaine - souvent solicitée sur ces questions - n’a jamais fini de trancher, au cas par cas, sur les pouvoirs respectifs de l’administration fédérale de Washington et celles des États fédérés. Soit le plein emploi garanti pour longtemps pour les cabinets d’avocats de tout le pays et de la capitale fédérale [8]...

États-Unis ou État-Uni ?

Les USA sont une « Union fédérale » formée d’États et de citoyens, dimension citoyenne renforcée (en 1868) par l’adoption (vraiment effective depuis les années 1960, avec la politique de "déségrégation" alors entreprise par l’administration démocrate « Kennedy-Johnson ») du XIVe Amendement instituant une citoyenneté américaine commune aux Blancs et aux Noirs (alors qu’auparavant "être américain" n’était qu’une appelation culturelle et identitaire, mais sans aucun véritable statut légal) [9].

Les États-Unis sont donc une fédération où les pouvoirs sont - selon les compétences concernées - partagés entre les autorités de Washington, les deux chambres du Congrès fédéral, les 50 différents États de l’Union, leurs législatures respectives, les autres pouvoirs locaux "autonomes", etc. La « Cour suprême » de Washington ayant la délicate mission (Cf. Arrêt « Marbury v. Madison », adopté par la « Cour suprême » en février 1803...) d’arbitrer les éventuels conflits de compétence pouvant opposer l’État fédéral aux États fédérés [10].

Le bon fonctionnement de l’ « Union » est régi selon les stipulations de l’actuelle « Constitution des États-Unis d’Amérique » de septembre 1787. Et, depuis cette date, elle n’a subi là que 27 "très légères" modifications (les fameux "vingt-sept amendements").

En pratique, cette Constitution a néanmoins considérablement évoluée : ayant vu l’élargissement des droits civiques à des catégories de populations entières jusque là discriminées (noirs, femmes, autochtones amérindiens, etc) [11], l’accroissement des pouvoirs de l’exécutif présidentiel (au détriment du Congrès) et l’extension des pouvoirs de l’Union (au détriment des États formant l’Union) [12].

D’ailleurs une très sanglante guerre civile [13] - la « Guerre de sécession » (en 1861-1865) -, des décisions très politiques de la Cour suprême (comme l’arrêt « Texas v. White » de 1868-1869) ou l’adoption du XIVe Amendement (instituant là, véritablement, la citoyenneté de l’Union, également en 1868...) ont par la suite durablement sacralisé l’unité de la Nation.

Si bien qu’à la fin du XIXe siècle, on ne dit plus "the US are" mais bien "the US is". Une évolution politique et sémantique essentielle, par la suite consacrée par la mise en place - au XXe siècle - des politiques fédérales d’interventionisme économique (Cf. « New Deal » rooseveltien des années 1930...), d’extension des droits civiques et/ou de déségrégation raciale (Cf. politique de « New Society » poursuivie par l’administration démocrate « Kennedy-Johnson », dans les années 1960).

Cinquantes élections présidentielles...

Dans un tel dispositif, l’élection du chef de l’État, tous les quatre ans, est l’occasion d’une grande "célébration démocratique" qui ne rassemble guère plus de 50 à 65% des... inscrits sur les listes électorales [14] !

Des élections où s’affrontent régulièrement « partisans de l’État minimal » (républicains), soucieux d’éviter au pays qu’à force de politiques étatiques "solidaristes" en faveur des plus nécessiteux, il ne tombe dans les affres du "socialisme"...

Et partisans d’un « interventionisme étatique » des plus modéré (démocrates), surtout soucieux de mieux encadrer les excès du marché (et de lutter contre les injustices sociales les plus criantes...).

Deux partis à côtés desquels on trouve aussi le petit mais pittoresque (car très américain...) « Libertarian party », expression d’un courant individualiste typiquement américain prônant encore moins d’État que les républicains :

Hostilité à l’impôt (voire à l’État fédéral...) sous absolument toutes ses formes et opposition stricte à tout contrôle de l’État sur le commerce (de l’alcool et du tabac, mais aussi des drogues douces, etc) ou à l’ingérence de tout pouvoir - quel qu’il soit - sur la sexualité des simples particuliers.

C’est dans un tel pays que se dérouleront, en novembre prochain, les prochaines élections présidentielles devant désigner - nous dit-on - le plus puissant chef d’État de la planète. Soit, en fait, cinquantes élections présidentielles différentes, une par État : chacun d’entre eux disposant de ses propres listes électorales, de ses propres modalités de vote, de ses propres machines de vote et de son propre système de "scrutateurs-observateurs" (n’ayant aucun lien "organique" avec l’administration fédérale...).

Ce qui n’est pas sans représenter un certain nombre d’inconvénients, surtout si on se remémore exactement ce qui s’est passé, lors des élections présidentielles de novembre 2000, dans l’État de Floride : où le mauvais fonctionnement des machines à voter des seuls comtés de Miami Dade et de Palm Beach avait alors rendu possible l’élection - alors tant controversée - du Républicain Georges W. Bush à la Maison Blanche [15].

Une élection au « Suffrage universel indirect pondéré »...

Des élections présidentielles américaines où il ne faut donc tout de même pas oublier que le vainqueur final est désigné par un système de suffrage indirect, universel certes, mais pondéré en fonction du poids démographique des États (et des majorités politiques qui s’y dégagent).

Un système de pondération "inter-étatique" où - via les « Grands Électeurs » - le caractère autonome des États fédérés (dont les plus petits sont - à l’évidence - politiquement sureprésentés...) trouve là une reconnaissance politique suprême, et pèse encore de tout son poids.

Des élections présidentielles dont on se souvient - qu’en 2000 - on n’avait pu proclamer le résultat final qu’à l’issue d’une bien longue procédure juridique (plus d’un mois...), arbitrairement tranchée par une décision très contestable de la Cour suprême [16] : en faveur d’un candidat à l’évidence pourtant très largement battu au seul suffrage universel (puisque ayant recueilli environ 500 000 voix de moins que son concurrent à l’échelle de l’Union...) mais majoritaire de très peu en terme de « Grands électeurs »...

Un pays qui - sans être nécessairement un modèle organisationnel - reste aujourd’hui le prototype historique et l’étape fondatrice de toute l’expérience fédéraliste de l’époque contemporaine.

Et un pays dont le fonctionnement « interne » (ainsi que les moeurs institutionnelles et politiques...) méritent, rien que pour cela, d’être très attentivement examinées...

- Illustration :

Le visuel d’ouverture de cet article est une carte représentant - État par État - les résultats de l’élection présidentielles américaine de novembre 2004 :

 États "blue", gagnés par le candidat démocrate à la présidence John Kerry (et son colistier, John Edwards).

 États "red", gagnés par le président républicain sortant ("incumbent") Georges W. Bush (et son "running mate", Dick Cheney).

- Sources :

 « La Saga de la Maison-Blanche » : Ouvrage du journaliste Jean-Luc Hees, ancien Correspondant de « Radio-France » aux États-Unis ; document publié à Paris, en 2006, aux « Presses de la Renaissance » (420 pages).

 « Sacrés Américains » (Nous les Yankees, on est comme ça) : Ouvrage du journaliste Théodore Stanger, Correspondant de presse à Paris de l’hebdomadaire américain « NewsWeek » ; document publié à Paris, en 2004, aux éditions « Michalon » (310 pages en format de poche, chez « Folio documents » ; ici : pp. 44-52 et pp. 76-86).

 « Sacrée Maison-Blanche ! » (Obama, Hillary, McCain et les dessous de la folle politique américaine) : Ouvrage du journaliste Théodore Stanger, Correspondant de presse à Paris de l’hebdomadaire américain « NewsWeek » ; document publié à Paris, en 2008, aux éditions « Michalon » (235 pages).

 « Le petit livre des Élections américaines ! » : Ouvrage de l’universitaire française Nicole Bacharan, Spécialiste de la vie politique aux États-Unis ; document publié à Paris, en 2008, aux éditions « Panama » (190 pages ; ici : pp. 43-44-45-46).

 « Fédéralisme et antifédéralisme » (« Que-sais-Je ? » n°3751) : Ouvrage de l’universitaire François Vergniolle de Chantal, Maître de conférences à l’Université de Bourgogne et spécialiste des États-Unis à l’ « IFRI / Institut français des relations internationales » ; document publié à Paris, en 2005, chez « P.U.F » (130 pages, ici : pp. 13 à 45).

Notes

[1Puisqu’ils sont effectivement 50, depuis qu’en 1959 - sous le second mandat du président (républicain) Eisenhower - les États d’Alaska et des îles Hawaii soient respectivement devenus les 49e et 50e États de l’Union...

[2A ce propos, on lira attentivement — entre autres — les articles de l’encyclopédie Wikipédia consacrés à la « Second Vermont Republic", » (fondée en 1994-1997) ou aux indépendantistes du groupe « Republic of Texas, » (fondé en 1995), de l’ « Alaskan Independence Party » (fondé en 1982…) ou du « Puerto Rican Independence Party » (fondé en 1946) ainsi qu’aux diverses formations appartenant aujourd’hui à la nébuleuse de l’ « Hawaiian sovereignty movement ».

[3Territoires « prélevés » (177 km²) sur celui du Maryland voisin.

[4« Washington city » : 21e conurbation du pays avec ses actuels près de 600 000 habitants (citoyens disposant - enfin ! - du droit de vote aux élections fédérales - législatives et présidentielles - depuis seulement 1961 : via l’adoption du XXIIIe Amendement...).

[5A comparer aux 130 km/h de nos autoroutes françaises...

[6Prohibitition légalisée - puis supprimée - par les XVIIIe et XXIe Amendements de 1919 (à la fin du second mandat présidentiel du démocrate Woodrow Wilson) et 1933 (au tout début du premier mandat présidentiel du démocrate Franklin D. Roosevelt).

[7Notamment depuis la récente relance du débat tant controversé portant sur la « clause de commerce » ; i. e : sur le droit ou non des Etats fédérés à contrôler - voire à limiter - le commerce inter-Etats ; prérogative du seul Congrès fédéral (Cf. Arrêt de la Cour suprême « Gibbons v. Ogden » de 1824 ; confirmé en 1937, lors du New Deal « rooseveltien »...) ; ou relevant des Etats (Cf. Arrêt de la Cour suprême « United States v. Lopez »), comme semble donc à nouveau l’indiquer, depuis peu, un récent renversement de la jurisprudence, proclamé en 1995.

[8Avocats qui fournissent d’ailleurs aujourd’hui plus de la moitiée des membres du Congrès ; et qui ont même régulièrement fourni de nombreux présidents aux États-Unis : dont les célèbres présidents Abraham Lincoln, Richard Nixon, Bill Clinton, etc. Et dont les trois principaux récents candidats (démocrates) à la présidence : Barack Obama, Hillary Rodham Clinton et John Edwards.

[9XIVe Amendement (1868) : « Toutes personnes nées ou naturalisées aux États-Unis, et soumises à leur juridiction, sont citoyens des États-Unis et de l’État où elles résident, (etc) ».

[10C’est en 1803, sous l’autorité du « Chef Justice » John Marshall que fut proclamé cet arrêt - « Marbury v. Madison » - par lequel la Cour suprême s’octroyait là le pouvoir de "Judicial review" (i. e : droit d’interprétation de la Constitution ; "compétence de la compétence" ; droit de pouvoir juger et décider de la constitutionnalité des lois).

D’après cet arrêt célèbre - dont le contenu est implicitement inscrit dans le « Fédéraliste » d’Hamilton, Jay et Madison (dès 1789) - « La Constitution (des États-Unis) est ce que la Cour suprême dit qu’elle est » (The Constitution is what the Supreme Court says it is), pour reprendre là les célèbres propos tenus en 1908 (à Elmira, État de New York) par le Gouverneur de l’Etat et alors futur « Chef Justice » Charles Evans Hugues (par la suite candidat républicain - malheureux - lors des élections présidentielles de novembre 1916).

[11La jurisprudence fédérale en la matière passant donc de la servilité officiellement assumée (Cf. Arrêt de la Cour suprême « Scott v. Sandford » de 1857) à la citoyenneté enfin reconnue (Cf. XIVe Amendement ; adopté en 1868).

Puis de la ségrégation assumée (Cf. Arrêt de la Cour suprême « Plessy v. Ferguson » de 1896 : Doctrine « separate but equal », i. e : « Les État peuvent autoriser - ou même imposer - des mesures de ségrégations raciales, pourvu que les conditions offertes aux deux races soient égales ») à l’égalité des droits enfin reconnue (Cf. Arrêt de la Cour suprême « Brown v. Board of Education of Topeka » de 1954 ; organisant la « déségrégation scolaire » : décision rendue célèbre par les fameux événements survenus - à Little Rock (Arkansas) - en 1957-1959, durant le second mandat présidentiel du président républicain Eisenhower).

[12Notamment autour du débat tant controversé portant sur la « clause de commerce » : sur le droit ou non des Etats à contrôler voire à limiter le commerce inter-Etats, prérogative du seul Congrès fédéral (Cf. Arrêt de la Cour suprême « Gibbons v. Ogden » de 1824 ; confirmé en 1937, lors du New Deal « rooseveltien »...) ou relevant des Etats (Cf. Arrêt de la Cour suprême « United States v. Lopez », récent renversement de la jurisprudence datant de 1995).

[13La « Guerre de sécession » : Une très sanglante guerre civile qui, en tout, aura tout de même fait plus de 600 000 morts.

[14Avec un record de 62.8% de participation lors de l’élection présidentielle de novembre 1960 ayant opposé le ticket républicain sortant « Richard Nixon (ancien vice-président) / Henry Cabot-Lodge Jr (colistier) » au ticket démocrate "challenger" « John Fitzgérald Kennedy / John Baines Johnson », finalement vainqueurs.

[15Rappelons également que les États membres de l’Union ont aussi la possibilité de coupler ces élections présidentielles « fédérales » (qui coïncident avec le renouvellement partiel des deux chambres du Congrès fédéral) avec tout un tas de scrutins et autres consultations électorales diverses et variées : élection du Gouverneur et des Législatures de l’État, désignation des officiers publics des autorités judiciaires (attorney) et policières locales (shériff), consultations - voire référendums - portant sur des questions d’intérêt local, etc.

Ainsi, juste souligner que l’État de Californie - traditionnellement acquis aux Démocrates mais actuellement dirigé par un gouverneur républicain (Arnold Schwarzenegger, pour ne pas le nommer...) - organise, ce 4 novembre, un référendum à propos du « mariage gay » (possibilité juridique légalisée pat l’État de Californie, le 15 mai dernier...).

Un référendum portant sur une question de société controversée, et susceptible - donc - de mobiliser l’électorat républicain et conservateur lors d’un scrutin présidentiel présumé disputé (même en Californie...).

[16Arrêt - de la Cour suprême - « Bush v. Gore » du 12 décembre 2000.

Vos commentaires
  • Le 4 octobre 2008 à 14:13, par Ronan Blaise En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    - Complément d’information :

    Dans cet article, on aurait pu également revenir un moment sur l’homme qui "inventa" l’expression « Etats-Unis d’Amérique », un personnage à la vie fertile en aventures et rebondissements : Thomas Paine (1737-1809) :

    Sujet anglais (fils d’un artisan quaker de Londres), émigré en Pennsylvanie (en 1774) où il sera patron de presse ; devenu citoyen américain, penseur républicain et fédéraliste, co-rédacteur (en 1776) de la Constitution de l’Etat de Pennsylvanie (hostile à l’esclavage, il en avait fait voter l’abolition), précurseur de l’idée d’indépendance pour les treize colonies (dans son fameux ouvrage "Commonsense", 1776).

    Vétéran de la guerre d’indépendance, ami de Washington et de la Fayette, sous-secrétaire aux affaires étrangères du nouveau gouvernement fédéral, à l’origine de l’inscription des dix premiers amendements ("Bill of Rights") dans la Constitution américaine de 1787.

    Revenu en Europe, en Angleterre (en 1787), expulsé d’Angleterre (où il est alors condamné à la peine capitale pour propagande révolutionnaire...), réfugié en France (en 1791) où on lui donne la nationalité française, élu à la Convention comme Député girondin (en 1792), il vota contre la mort de Louis XVI (proposant - plutôt - son exil à vie aux Etats-Unis...).

    Arrêté par les jacobins - comme espion anglais - et jeté en prison (au Palais du Luxembourg) pendant la Terreur, libéré en 1795 (par l’ambassadeur James Monroe, le futur président...), avant de repartir aux Etats-Unis (en 1802) où il mourra dans l’oubli, de manière "misérable et solitaire" (en 1809) dans sa ferme de New Rochelle qui lui avait été offerte par la ville de New York.

    Cf. « Tom Paine : La triste et véritable histoire du parrain des Etats-Unis d’Amérique qui finit dans un placard », article de l’universitaire Joseph Monchamp (membres de l’UEF Rhônes-Alpes) publié dans le trimestriel fédéraliste « Fédéchoses » n°125 du 4e trimestre 2004 (pp. 20-21).

  • Le 2 septembre 2010 à 13:08, par Valéry-Xavier Lentz En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    Les caricatures de nos nationalistes, quand on parle d’Etats-Unis d’Europe, on t en effet bien peu à voir avec la réalité. Il faut croire qu’ils furent tous cancres à l’école. Ou qu’ils font semblant d’être sots.

    La réalité est plus complexes avec quelques rares domaines ou l’Union européenne est plus centralisées, pour le plus grand bonheurs des citoyens (comme pour le permis de conduire) et la plupart où il n’existe en Europe aucun pouvoir fédéral digne de ce nom là où, toutes les enquêtes d’opinion le démontre, les Européens attendraient de l’Europe qu’elle puisse agir enfin efficacement.

  • Le 29 décembre 2010 à 10:32, par Rec En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    Comme on l’a déjà examiné dans les colonnes de ce webzine, c’est en Amérique - aux États-Unis - à la fin du XVIIIe siècle qu’a vu le jour la première fédération, le premier État fédéral des temps contemporains : les États-Unis d’Amérique, État fédéral pionnier, État fédéral remarquable entre tous.


    Ce que vous écrivez n’est pas exact. C’est en Suisse que le fédéralisme moderne a vu d’abord le jour et non aux USA :

    « Toutefois le fédéralisme au sens moderne du terme vient d’abord de la Suisse, puis des USA. »

    http://www.wikiberal.org/wiki/F%C3%A9d%C3%A9ralisme

  • Le 30 décembre 2010 à 08:36, par Ronan En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    Le premier État fédéral des temps contemporains ...

    USA : 1787. Suisse : 1848. Allemagne : 1949.

  • Le 30 décembre 2010 à 09:50, par HR En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    « Ce que vous écrivez n’est pas exact. C’est en Suisse que le fédéralisme moderne a vu d’abord le jour et non aux USA : »


    Comparer la Suisse, qui a une population inférieure à celle de la ville de New-York, aux USA, est une absurdité sur le plan politique.

  • Le 30 décembre 2010 à 10:43, par HR En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    "Et un pays dont le fonctionnement « interne » (ainsi que les moeurs institutionnelles et politiques…) méritent, rien que pour cela, d’être très attentivement examinées…"


    Plutôt qu’une comparaison entre les USA et la Suisse, on peut remarquer, à postériori, que dans le "rien que pour cela", et c’est valable aussi bien pour la Suisse que pour toute l’Union Européenne, il y a dans "cela" quelque chose qui manque parce que c’est carrément strictement interdit de le penser.

    Parce que la principale raison pour les Européens d’examiner attentivement les institutions américaines, c’est parce que ce sont elles qui commandent la manière dont nous, les Européens, sommes toujours militairement occupés. Et ce sont elles qui commandent notre seul système de défense véritablement opérationel, comme on a pu le constater lors de la dernière guerre des Balkans.

    Dans un sens, ce non dit explique la défaite du fédéralisme, qu’on peut espérer provisoire en Union Européenne. Cette défaite vient du refus que je n’hésiterais pas à qualifier d’"hystérique" à reconnaître que l’Union Européenne, encore aujourd’hui, comme tous ses Etats membres, ne peuvent toujours pas avoir accès à la souveraineté. Comme les USA, ou la Chine, sont des Etats véritablement souverains, pour parler d’Etats à dimensions et puissances comparables.

    Evidemment, inutile de mentionner que "rien que pour cela", cet article devrait être intégralement réécrit....

  • Le 31 décembre 2010 à 12:38, par Ronan En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    Se permettre ce genre de commentaire, c’est finalement bien démontrer qu’on ne comprend décidément rien à ce qu’est le fédéralisme.

    A ce savoir - pour ce qui est de ses « objectifs » - d’unir, dans le respect des diversités et dans le respect du Droit, des entités dissemblables, pour la Paix.

    Ce qu’est bien la Suisse - si petite soit-elle - avec ses 26 cantons, ses quatre langues officielles, ses traditions religieuses et références culturelles (voire politiques) souvent antagonistes. Et même aussi sa « war between the states » : le « guerre du Sonderbund », en 1847. Qui aura, certes, fait beaucoup moins de morts que l’autre, mais tout de même...

    (Cf. http://www.taurillon.org/La-Suisse-Etat-paradoxal-la ).

  • Le 31 décembre 2010 à 15:00, par Valery En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    De quoi est-ce que vous parlez au juste ?

  • Le 31 décembre 2010 à 17:44, par Ronan En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    Arthurh, sors de ce corps !

  • Le 2 janvier 2011 à 12:52, par HR En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    "ce qu’est le fédéralisme. A ce savoir - pour ce qui est de ses « objectifs » - d’unir, dans le respect des diversités et dans le respect du Droit, des entités dissemblables, pour la Paix."

    Des entités. Ce qui est bien, avec les "entités", c’est qu’on put y mettre tout ce qu’on veut. Pourquoi pas d’ailleurs.

    J’avoue alors ne rien comprendre à ce que vous voulez démontrer à propos de ce fédéralisme là.

    Quand au fédéralisme dont je parle, c’est le fédéralisme hérité de l’humanisme, qui choisit de reposer d’abord et avant tout sur les gens, les individus. Les citoyens, si on veut utiliser un vocabulaire plus politique.

    Et ce fédéralisme là, contrairement à ce que prétend démontrer la Suisse, ne peut pas être "neutre". Il ne peut qu’être profondément engagé, et être capable de se projeter avec force vers l’extérieur.

    Mais bon, il est vrai aussi que le fédéralisme suisse a su donner une véritable leçon que le monde entier à retenu sur l’engagement à respecter le secret bancaire et le paradis fiscal. Je suis d’ailleurs un peu surpris que vous ne la mentionnez pas quant à ses "objectifs". Parce que ce sont quand même les objectifs suisses qui sont les mieux connus dans le monde entier.

    Quand à la contribution à la "Paix", pour s’en tenir à l’Europe, soyons sérieux. Les Suisses aujourd’hui, comme tous les Européns, s’en remettent aux Américains.

  • Le 2 janvier 2011 à 13:09, par HR En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    J’ai déjà mentionné à propos de plusieurs articles récents de le Taurillon sur la « Défense européenne » à quel point les auteurs font des efforts méritoires pour éviter de mentionner que l’Europe est encore, sinon militairement occupé, en tous les cas « agrémentées » de très nombreuses bases militaires non-européennes.

    Vous l’ignoriez ?

    Je suggérais donc que parler de « souveraineté » dans ce contexte, que ce soit en Suisse ou en Union Européenne est superfétatoire.

  • Le 2 janvier 2011 à 15:10, par HR En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    Je ne sais si vous êtes l’auteur de l’article, mais au lieu de commentaires désobligeants, vous auriez pu utilement ajouter que :

     On the european road, again…

    Le système métrique est appliqué aux USA. Les scientifiques l’utilisent couramment. Il est le système officiel de la principale armée fédérale, les Marines, qui ne comptent qu’en kilomètres (kliks dans leur jargon militaire), par exemple (voir l’excellente série Génération Kill, où les sous-titreurs en français n’ont manifestement pas compris le sens de l’expression). La résistance au système métrique, résumé par le mouvement populaire informel "Stop de metric madness", est la preuve vivante que sur ce plan comme bien d’autres, les Américains sont restés des conservateurs chauvins Européens comme les autres. Bref, des gens comme les autres. Des gens humains, en quelque sorte.

     Money...

    Ce n’est pas seulement sur l’impôt sur le revenu, mais sur l’ensemble des impôts que le taux est "étonnamment bas". Evidemment, profondément bien éduqué au système "taxation preferably without representation", l’auteur de l’article ne pouvait pas relever que la différence fondamentale des impôts US, c’est que l’essentiel des revenus des taxes aux USA provient des impôts directs. Alors que l’essentiel des revenus des taxes en UE provient de l’impôt le plus injuste qui soit, les taxes sur la circulation des marchandises. Décidément, en Europe, dès notre naissance on est biberonné aux octrois, gabelles, Tea Tax et autres TVA. A méditer quand de soi-disant fédéralistes, y compris sur le Taurillon, après avoir honteusement soutenu le traité de Lisbonne, soutiennent maintenant la proposition honteuse d’un "impôt européen" qui serait, bien entendu, un impôt indirect. Alors que seul un impôt européen direct sur le revenu serait digne d’un "no taxation without representation" fédéraliste européen et fier de l’être.

     Justice pour tous.

    Oui, mais, chose probablement unique au monde, Justice comme pouvoir suprême, complètement séparé des pouvoir législatifs et exécutifs, en ce qu’il est pour l’essentiel, comme les deux autres, élu au suffrage uninominal direct dans chacune des circonscriptions, soit les "magistrats du parquet" (les procureurs sont très majoritairement élus), et les "magistrats du siège" (les juges sont également très majoritairement élus). Révélateur, d’ailleurs, que parlant de la "Justice", l’article parle principalement de la police, qui se confond, sous nos yeux européens, avec notre justice inquisitoriale sous la tutelle du pouvoir exécutif. Puisque la police, c’est le pouvoir exécutif, il est utile de le préciser dans l’Europe des jerômes kerviels.

     Etats-Unis

    Là aussi il est révélateur que cette description européenne du pouvoir politique US commence par le sommet, le pouvoir fédéral, en s’arrêtant en chemin (les autres pouvoirs locaux « autonomes », etc.) C’est la logique en Europe, avec "le souverain" qui, en quelque sorte, consent à déléguer des pouvoirs mineurs à des niveaux dénués d’importance politique véritable. Alors que l’esprit des USA est exactement l’opposé. Tout commence au niveau local, par des circonscriptions (les districts) parfaitement définies : la ville (City), le comté (County), l’Etat (State), l’Etat fédéral (Washington). L’idée étant que la démocratie, c’est d’abord la souveraineté de la majorité des voix des citoyens sur leur ville, puis leur comté, etc, dans cet ordre.

     Cinquante élections ou Cinquante millions d’élections ?

    Bien entendu, cet article, qui prétend couvrir les plus anciennes institutions politiques significatives encore inchangées dans le monde aujourd’hui, en offre là aussi une vision très européenne. Bien entendu sur la question cruciale des élections. C’est bien excusable. Après tous, nous, les citoyens de l’Union Européenne, n’avons toujours pas le droit d’élire directement le moindre individu à Bruxelles, et avons tout juste le droit de voter pour une "liste" concoctée par la direction d’une bureaucratie politique nationale une fois tous les cinq ans. Alors qu’un citoyen américain, si on compte les votes aux "primaires", rien qu’au niveau de l’Etat fédéral, a le droit de voter en moyenne entre six et huit fois (en fonction de l’élection sénatoriale) sur une période de quatre ans ! Sans parler des innombrables (en fait on peut parfaitement les compter, mais j’y renonce) élections locales de maire, conseiller, président du conseil, district attorney, juge, sénateur de l’Etat, sherif du comté, gouverneur de l’Etat, et j’en passe, sans oublier le médecin légiste (mon élection préférée :-) . Et je précise que ce n’est pas parce que je suis "fan" de la série Les experts-CSI) !!!

    C’était là qu’il fallait mettre le point d’exclamation plutôt qu’à la participation à l’élection présidentielle.

    Enfin bref, comme je le mentionnais dans ma première remarque, plutôt que décrire les USA sous l’angle d’une bande d’étonnants cow-boys, cet article méritait d’être réécrit pour éclairer une conception profondément, comment dire, démocratique(?) ou anti-européenne(?), de ce que signifie la souveraineté au cours des deux derniers siècles en Occident.

    Ce serait incidemment une manière plutôt appropriée d’expliquer la présence de très nombreuses forces militaires américaines en Europe et expliquerait pourquoi, après "Cinquantes élections présidentielles…", le Président des USA se retrouve, selon l’article II toujours inchangé depuis l’origine de la Constitution Américaine, "Commandant en Chef" des seules forces armées européennes opérationnelles, les armées européennes de l’OTAN....

    Mais est-il encore possible de penser la souveraineté en Europe ?

  • Le 2 janvier 2011 à 18:05, par Cédric En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    Mais Arturh aborde une vraie question : peut-on vraiment mettre sur un même plan le fédéralisme américain et le fédéralisme helvétique d’avant 1848 ?

    De la démocratie en Amérique, Alexis de Tocqueville, 1830, « Ce qui distingue la constitution fédérale des États-Unis d’Amérique de toutes les autres constitutions fédérales »

    “Les États-Unis d’Amérique n’ont pas donné le premier et unique exemple d’une confédération. Sans parler de l’antiquité, l’Europe moderne en a fourni plusieurs. Le Suisse, l’Empire germanique, le République des Pays-Bas, ont été ou sont encore des confédérations.

    Quand on étudie les constitutions de ces différents pays, on remarque avec surprise que les pouvoirs conférés par elles au gouvernement fédéral sont à peu près les mêmes que ceux accordés par la constitution américaine au gouvernement des États-Unis. [...]

    Cependant le gouvernement fédéral, chez ces différents peuples, est presque toujours resté débile et impuissant, tandis que celui de l’Union conduit les affaires avec vigueur et facilité.

    […] Il se trouve dans la constitution actuelle des États-Unis quelques principes nouveaux qui ne frappent point d’abord, mais dont l’influence se fait profondément sentir. […]

    Dans toutes les confédérations qui ont précédé la confédération américaine de 1789, les peuples, qui s’alliaient dans un but commun, consentaient à obéir aux injonctions d’un gouvernement fédéral ; mais ils gardaient le droit d’ordonner et de surveiller chez eux l’exécution des lois de l’Union. Les États américains qui s’unirent en 1789 ont non seulement consenti à ce que le gouvernement fédéral leur dictât des lois, mais encore à ce qu’il fît exécuter lui-même ses lois.

    […] En Amérique, l’Union a pour gouvernés, non des États, mais de simples citoyens. Quand elle veut lever une taxe, elle ne s’adresse pas à l’État du Massachusetts mais à chaque habitant du Massachusetts. Les anciens gouvernements fédéraux avaient en face d’eux des peuples, celui de l’Union a des individus.

    […] En Amérique, chaque État a beaucoup moins d’occasion et de tentations de résister ; et si la pensée lui en vient, il ne peut la mettre à exécution qu’en violant ouvertement les lois de l’Union, en interrompant le cours ordinaire de la justice, en levant l’étendard de la révolte ; il lui faut, en un mot, prendre tout d’un coup un parti extrême, ce que les hommes hésitent longtemps à faire.

    Dans les anciennes confédérations, les droits accordés à l’Union étaient pour elle causes de guerre et non de puissance, puisque ces droits multipliaient ses exigences, sans augmenter ses moyens de se faire obéir.

    Il n’en est pas ainsi dans l’Union américaine ; comme la plupart des gouvernements ordinaires, le gouvernement fédéral peut faire tout ce qu’on lui donne le droit d’exécuter.

    […] Ici le pouvoir central agit sans intermédiaire sur les gouvernés, les administre et les juge lui-même, comme le font les gouvernements nationaux, mais il n’agit ainsi que dans un cercle restreint. Évidemment ce n’est plus là un gouvernement fédéral, c’est un gouvernement national incomplet. […] C’est pour n’avoir pas connu cette nouvelle espèce de confédération, que toutes les [autres] Unions sont arrivées à la guerre civile, à l’asservissement, ou à l’inertie. ”

  • Le 3 janvier 2011 à 16:52, par Ronan En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    Mais enfin, Cédric, soyons sérieux cinq minutes (si possible...) :

    Qui a suivi les épisodes précédents (et aura lu les articles mis en ligne sur ce même webzine...) sait déjà très bien :

    (1) que la Suisse d’avant 1848 n’est précisément pas une fédération (mais une confédération).

    (2) que cette Suisse là fut réformée par la Constitution de 1848 précisément pour devenir une fédération.

    (3) que cette évolution se fit précisément avec, pour modèle institutionnel, les Etats-Unis.

    D’ailleurs, qui aura lu l’article ci-dessus (et les commentaires d’Arthurh) aura d’ailleurs parfaitement compris :

    ... que l’essentiel du propos n’est certainement pas d’y comparer les Etats-Unis d’après 1787 de la Suisse d’avant 1848. Tout le reste n’étant décidément qu’audacieuses (et souvent bien étonnantes...) surinterprétations, chaque jour plus étonnantes les unes que les autres...

  • Le 3 janvier 2011 à 16:56, par Ronan En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    Neutralité, citoyenneté, secret bancaire (et puis quoi encore ?!).

    J’avoues avoir bien du mal à vous suivre tant vous mélangez un petit peu tout.

    Sérieusement, tout comme VXL sur cette même page, je m’interroge : par-delà tout ce charabia confus, à vrai dire vous voulez nous dire quoi de vraiment intelligible, très « exactement » ?!

  • Le 3 janvier 2011 à 17:18, par Ronan En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    Tout ça est très intéressant mais néglige néanmoins un petit détail : la participation de la plupart de nos partenaires européens à l’alliance militaire « OTAN » a été validée par la sanction démocratique. Ce, qu’il est vrai, les français ont décidément bien du mal à admettre (anti-américanisme « hexagonal » basique décidément pas mort...).

    Et si la Pologne, l’Italie, l’Allemagne fédérale, les Pays-bas, la République tchèque, le Portugal et bien d’autres encore font aujourd’hui partie de l’OTAN, c’est bien parce que leurs citoyens le veulent bien (voire l’exigent, du fait de la « menace russe »...). Et non pas parce que les méchants « cow boys » le leur auraient arbitrairement imposé de l’extérieur.

    D’ailleurs, certains de nos partenaires européens, ne leur parlez surtout pas d’ « Europe de la défense » autonome, idée essentiellement française (et France décidément bien solitaire pour porter, quasi seule, cette idée...) : déjà consultés à ce sujet ils n’en veulent massivement tout simplement pas (puisque s’obstinant à porter incessament au pouvoir des « Atlantistes » pourtant ouvertement déclarés). Préférant sans doute la protection effective du parapluie nucléaire étasunien aux mirages d’une hypothétique protection européenne qui, à ce jour, n’existe tout simplement pas. Et ce, de par l’abdication pure et simple des européens à se prendre vraiment en main sur ce dossier (entre autres...).

    Ce qui est sans doute fort dommage pour le « nationaliste » européen qu’on pressent vaguement en vous (?!). Mais force est de constater que tel est le monde réel et qu’on en construit rien sur des chimères...

    Cela dit, une défense européenne autonome, ça se finance : or il semble que nos chers européens préfèrent se délester de cette responsabilité (et des coûts induits) au profit du grand allié « américain » ... et de consacrer tout ce pognon au financement de leurs Etats-providences... Somme toute, c’est un choix de vie ; pas vraiment celui de l’indépendance, il est vrai : plutôt celui de l’alliance atlantique, dans laquelle vous ne voyez décidément que protectorat US. Mais c’est un choix. Et c’est leur choix. Celui d’une communauté de destin « EurAtlantique » de libertés et démocratique.

  • Le 3 janvier 2011 à 19:16, par HR En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    « Intéressant » ! Much obliged...

    Donc après vous, oublions le fédéralisme et parlons d’autre chose.

    Je concluais qu’il fallait se demander si on peut encore parler de souveraineté en Europe, vous évitez la question, mais mal :

    Voyons comment vous y répondez indirectement. Vous voyez chez moi un nationaliste, erreur. Je suis un fédéraliste en Europe, tendance « Répuplicain-Démocrate ».

    Parlant de « Démocrate », vous me dites que la participation à l’OTAN a été « validée » par la sanction démocratique. Je serais bien curieux de savoir de quelle sanction vous parlez. Vous voulez dire que c’est démocratiquement que la majorité des citoyens de Belgique, France, Luxembourg, Pays-Bas et Royaume-Uni ont sanctionné leur participation à l’OTAN en 1949 ? Ou même en Allemagne en 55 ? Ce n’était pas plutôt une proposition que les Européens ne pouvaient pas refuser ? C’était pas un peu comme un référendum sur la « Constitution Européenne » où on avait le choix entre dire oui ou oui ?

    Et quelle était la valeur « démocratique » de l’adhésion de le Roumanie à l’OTAN ?

    Mais soit, va pour « adhésion démocratique », la question n’est pas là pour moi, parce que je suis de ceux qui considèrent que de toute façon, nous, les citoyens européens, n’avons pas le choix, même aujourd’hui. Et pas parce que nous préférons payer l’Etat providence, mais parce que nous avons été vaincus et que nous ne sommes toujours pas remis de cette défaite. Dont acte.

    Notez au passage que je n’écris pas « nous et »nos partenaires européens«  ». Non(je suis noniste), j’écris « nous, les citoyens européens ». Et oui. Moi, pour ce qui est de la « valeur démocratique », comme je suis Républicain-Démocrate, je me fie à la majorité des citoyens. Ceci pour vous faire remarquer qu’en ne mentionnant que « nos partenaires », par lesquels vous ne désignez que des nations, vous indiquez involontairement que s’il y a un nationaliste ici, ce n’est pas moi.

    Concernant la nature de l’OTAN, je ne choisirais pas le mot « protectorat ». Il a une connotation européenne qui ne s’applique pas vraiment à l’esprit dans lequel les Américains envisagent l’Otan. Ce n’est pas le lieu d’en faire un débat. Je mentionnais juste que pour s’en tenir à un point, qui résume tout : les USA se réservent, naturellement, le commandement. Et nous, les citoyens de l’Union Européenne, « démocratiquement », l’acceptons.

    Je remarque aussi au sujet de ce « choix de vie » que vous semblez vous en tenir à distance(leur choix).

    Même si vous le faite très habilement, on voit que vous faites ainsi le choix d’éviter d’émettre la moindre opinion sur la question de savoir si, dans ce contexte, on peut considérer que nous, les Européens, sommes souverains. Je ne cherche pas à prolonger le débat, mais vous voulez vraiment suggérer, dans votre dernier paragraphe, que c’est « démocratiquement » qu’on peut décider de la présence de forces militaires étrangères supérieures sur son propre territoire ?

    Je le prends comme une réponse à la question que je posais : « Mais est-il encore possible de penser la souveraineté en Europe ? ».

    Je prends votre réponse pour un non.

    Promis, je ne vais pas développer ici la question de savoir si un Etat, des Etats, fussent-ils unis, peuvent être considérés comme démocratiques dans ce contexte là. Je vais me contenter d’observer les commentaires sur « la démocratie » à propos des récentes élections en Côte d’Ivoire. C’est plus drôle.

  • Le 3 janvier 2011 à 21:36, par Cédric En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    J’ai mal lu l’enchaînement des posts... Désoléééé !!!

  • Le 6 janvier 2011 à 10:40, par HR En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    @ Ronan

    J’en conclus aussi que vous êtes l’auteur de l’article, raison pour laquelle vous avez suivi les commentaires.

    A propos de l’idée qu’on ne peut pas parler ici de la question de fond de la souveraineté, elle se décline sous plusieurs formes. La plus inquiétante, c’est qu’on ne peut pas discuter non plus d’articles comme celui-ci : http://www.taurillon.org/Quel-role-pour-l-UE-en-cas-de-scission-de-la-Belgique-1-2

    A vrai dire, de quoi peut-on discuter ici sur l’Union Européenne aujourd’hui ? Après 10 ans de débats sur ses institutions politiques, sans vouloir jouer les cassandres, on peut légitimement y voir la hantise d’une cassure. On ne peut plus tenir que des discours totalement creux, qui tentent d’accréditer l’idée du « succès » de l’échec de la Constitution européenne ressortie sous le nom de traité de Lisbonne.

    Tous les ingrédients sont là, avec la crise de la dette « souveraine », qui en est, comme on nom l’indique, le meilleur diagnostic d’une Union Européenne arrivée sur une crête qui la menace de la cassure.

  • Le 7 janvier 2011 à 10:48, par Ronan En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    Il est très étonnant que quelqu’un qui se dise « fédéraliste » accorde à ce point et autant d’intérêt au concept de souveraineté étatique et à la seule force militaire.

    Ce que vous appelez « fédéralisme » (qui n’est jamais que le transfert de l’idéal centralisateur « national-souverainiste » sur des ressorts géographiques plus vaste...) ne correspond décidément en rien à ce que je crû apprendre et comprendre du fédéralisme.

    Comme on peut parfaitement estimer que l’échelon géographique pertinent et efficace pour assurer la sécurité de l’Europe n’est finalement pas la seule Europe, mais l’alliance atlantique. Or c’est n’est pourtant rien d’autre que cela, le fédéralisme : la recherche de l’échelon pertinent et efficace.

  • Le 7 janvier 2011 à 16:10, par Cédric En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    “Or c’est n’est pourtant rien d’autre que cela, le fédéralisme : la recherche de l’échelon pertinent et efficace.”

    ... et le fonctionnement démocratique de ces échelons.

  • Le 8 janvier 2011 à 08:10, par Ronan En réponse à : USA : Le fédéralisme dans tous ses États

    Et - surtout - le contrôle démocratique (par les citoyens) de ces différents échelons (et de ceux là même qui nous gouvernent...).

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