Les députés européens ont adopté une résolution par 610 voix contre 34 (et 39 abstentions) dans laquelle ils expriment leurs préoccupations face à l’actuelle situation en Afghanistan. Ils invitent l’Union européenne à maintenir son soutien à la population afghane.
Ouvrant les discussions, le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a laissé entendre qu’il n’y avait “pas beaucoup de place pour l’optimisme”, tout en rappelant l’importance de rester politiquement impliqué dans la région. “Le désengagement n’est tout simplement pas une option” a-t-il estimé, réitérant la volonté de l’UE de “tout mettre en œuvre pour soutenir le processus de paix et rester un partenaire engagé”. Outre l’aspect humanitaire et démocratique du processus, le Haut représentant a également rappelé que la stabilité politique du pays est essentielle à la sécurité des Européens. “Il ne peut y avoir de tolérance pour que l’Afghanistan redevienne un paradis pour le terrorisme international”, a-t-il prévenu.
Sur les droits des femmes, des avancées saluées mais qui restent fragiles
De l’optimisme sinon de l’espoir, les députés ont réussi à en trouver. A l’instar du Haut représentant, de nombreux eurodéputés ont tenu à souligner le chemin parcouru en matière de droits humains. Petras Auštrevičius (Lituanie, Renew) s’est ainsi félicité que “depuis 2002, 9 millions d’enfants afghans ont pu aller à l’école”. Sur la même période, l’amélioration du système de soins a permis “de réduire la mortalité néonatale de plus de moitié”. Sa compatriote du PPE, Rasa JUKNEVIČIENĖ a tout de même précisé que le nombre de filles présentes dans les écoles afghanes était passé “de 0 en 2001 à 3 millions en 2021”, ajoutant que “les femmes Afghanes sont celles qui m’impressionnent le plus”. Considérant que ces dernières représentent l’avenir de leur pays, l’UE se doit de les aider “à [le] reprendre en main”. Néanmoins, tous ont conscience de la fragilité des droits acquis notamment tant que le processus de paix ne sera pas terminé.
L’Espagnole María Soraya RODRÍGUEZ RAMOS (Renew) a cité à cet effet les mots d’une militante politique afghane Fawzia Koofi, qui aurait appelé, lors d’un cycle de négociations à Doha, à “ne pas sacrifier notre liberté pour un accord !", rejetant par là les propositions des Talibans. Pour Erik MARQUARDT (Allemagne, Verts/ALE), la situation sur place “reste inquiétante” sur le plan humanitaire, notamment depuis la pandémie de Covid-19.
Une paix qui reste à construire
A gauche de l’hémicycle, certains eurodéputés ont insisté sur le fait que la guerre n’était pas terminée pour autant et que la violence pouvait resurgir à tout moment. Pour Pedro MARQUES (Portugal, S&D), “le retrait des troupes annoncé par l’ONU et l’OTAN risque d’accroître la violence”. Il estime qu’il est primordial de rester engagé dans un processus de paix, notamment avec l’aide d’acteurs régionaux dans un cadre multilatéral. “La communauté internationale ne peut pas fermer les yeux sur l’Afghanistan et l’abandonner à son sort”, a-t-il réaffirmé. Pour la Bulgare Elena YONCHEVA (S&D), “la guerre en Afghanistan est déjà de retour avec les Talibans conquérant de nouveaux bastions et parties du pays” et continue d’être une menace pour la sécurité européenne. “L’UE ne peut se limiter à une aide économique mais se doit d’être un acteur global dans la région”, a-t-elle plaidé.
Du côté du groupe Identité et Démocratie, Bernhard ZIMNIOK (Allemagne, ID) a martelé que la situation est “désastreuse” et que “les Talibans vont prendre le contrôle du pays dans un futur proche”. Il a ainsi appelé l’UE à conditionner son aide au développement dans la région, notamment la promesse de dons de 1,5 milliards d’euros en demandant de manière ironique si les Européens croient vraiment “que les Talibans affecteront l’argent aux projets auxquels il est destiné, comme l’accès des filles à l’école” ? Point sur lequel était déjà intervenu Josep Borrell au début du débat. Reconnaissant qu’il s’agissait là “du levier le plus important pour l’UE”, le Haut représentant avait précisé que l’aide financière octroyée serait soumise à conditions, à savoir “la protection des droits de l’hommes et des progrès démocratiques tangibles”. Pour lui, c’est cela même qui rend nécessaire pour l’UE de poursuivre son engagement dans la région “afin d’empêcher de perdre tous les progrès effectués en la matière sur les vingt dernières années”.
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