Les élections présidentielles en Finlande ont lieu tous les 6 ans pour élire le chef d’État du pays. Le président a une fonction essentiellement cérémoniale en Finlande. Constitutionnellement, il est tenu de renoncer à son appartenance partisane dès son entrée en fonctions. Sauli Niinistö, en particulier, a cultivé l’image d’un "père de la nation" apolitique et a bénéficié d’une grande popularité, remportant plus de 62 % des voix au premier (et unique) tour en 2018. L’issue des élections de 2018 fut évidente, 2024 sera donc la première élection véritablement compétitive depuis 2012. Le nombre de mandats étant limité, le populaire Niinistö ne pouvait se représenter cette année.
De nombreux candidats pour de nombreuses visions
Les autres candidats « stars » du premier tour étaient Olli Rehn, gouverneur de la Banque de Finlande et candidat du parti agrarien du Centre (Suomen Keskusta), Jussi Halla-aho, président du Parlement et candidat du parti d’extrême droite des Vrais Finlandais (Perussuomalaiset), Pekka Haavisto, homme politique de la Ligue verte (Vihreä liitto), ancien ministre des affaires étrangères et candidat indépendant, et Alexander Stubb, professeur, ancien premier ministre et candidat du parti de centre-droit de la Coalition nationale (Kokoomus).
Olli Rehn était un candidat relativement neutre et inoffensif qui aurait probablement été similaire à ce qu’incarnait Sauli Niinistö et dont peu de gens avaient quelque chose à redire, mais qui, peut-être pour la même raison, n’a pas réussi à susciter l’enthousiasme ou à mobiliser les électeurs. Il a obtenu un score respectable de 15% des voix au premier tour.
Jussi Halla-aho était le candidat le plus clivant de ces élections, populaire à l’extrême droite, mais entaché de remarques et controverses. Il était un candidat honni par les électeurs de gauche, encourageant alors le vote stratégique à son encontre. S’il était parvenu au second tour, il aurait probablement perdu en raison du nombre de personnes prêtes à voter pour pratiquement n’importe qui pour empêcher l’extrême droite de se saisir de la présidence. Son soutien au premier tour était toutefois de 19 %.
Mika Aaltola, qui n’avait aucune expérience politique préalable mais dirigeait l’Institut finlandais des affaires étrangères, un institut public, a gagné en visibilité depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Certains estimant qu’il convenait parfaitement au rôle de président, notamment en ce qui concernait la situation géopolitique actuelle. Malgré l’embelli médiatique initiale dont il a fait l’objet, le scepticisme l’a finalement emporté : il n’a obtenu que 1,46 % des voix.
Haabisto – Stubb : duel et duo
Haavisto et Stubb ont donc atteint le second tour avec respectivement 26% et 27% des voix. Tous deux sont considérés comme des candidats aux programmes relativement semblables, notamment sur le plan de la politiques européennes et internationales. Haavisto pourrait être décrit comme une option plus apaisant sur le plan intérieur que Stubb. Sur le plan extérieur, c’est l’inverse, Stubb est considéré comme plus pacifique que Haavisto. Toutefois, il s’agit ici de différences relativement mineures pour des objectifs, au final, similaires. Les deux candidats ont donc été largement consensuels pour la plupart des Finlandais. Une minorité non négligeable a toutefois exprimé le sentiment qu’aucun d’entre eux ne les représentait vraiment.
L’homosexualité affichée de Haavisto a attiré l’attention et a probablement contribué à sa défaite au second tour. Beaucoup de ceux qui ont voté pour Stubb ont déclaré que la sexualité de Haavisto faisait partie de leurs considérations, ce qui témoigne d’une homophobie persistante dans la société finlandaise et ce que de nombreux partisans des deux candidats ont considéré comme décevant et quelque chose qui n’aurait pas dû être considéré comme décisif dans une élection.
Le soir de l’élection, lors du dépouillement et alors que les résultats étaient serrées, les deux candidats ont insisté sur le fait que l’autre candidat était tout aussi compétent que leur personne et que, dans les deux cas, la Finlande aurait un bon Président. Finalement, Alexander Stubb a remporté l’élection de justesse, avec 51,62% des voix, et une différence de moins de 100 000 voix avec Haavisto. Stubb a félicité son adversaire pour la qualité de sa campagne et l’a remercié d’avoir été un adversaire honorable. Un moment de civilité démocratique aussi rare que rafraîchissant.
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