Après le Brexit, les sociaux-démocrates ne peuvent plus prétendre à la présidence de la Commission

Comment le Brexit a cimenté le pouvoir du Groupe PPE au Parlement européen

, par Tobias Gerhard Schminke, Traduit par Caroline Iberg

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Après le Brexit, les sociaux-démocrates ne peuvent plus prétendre à la présidence de la Commission
Le Parti populaire européen (PPE) serait certainement élu à la présidence de la Commission si le vote se tenait aujourd’hui. Les élections européennes auront lieu en mai 2019. Photo : Filip van Laenen, Europe Elects (May 2018)

Du 23 au 26 mai 2019, les électeurs de l’Union européenne éliront un nouveau Parlement européen. La plateforme d’analyse électorale « Europe Elects » a réalisé une enquête exclusive pour Treffpunkteuropa.de sur les intentions de vote dans l’Union et fait régulièrement des prévisions sur la répartition attendue des sièges.

La composition du Parlement changera de manière significative en raison du Brexit et de la forte participation des 27 autres Etats membres de l’UE. Selon Europe Elects, la faction libérale-conservatrice du Parti populaire européen (PPE) autour du président de la Commission en exercice Jean-Claude Juncker resterait la plus forte dans la législature européenne. Globalement, une grande majorité d’environ 80% des Européens soutiennent les partis pro-européens.

Le PPE serait sur le point de présenter un nouveau président de la Commission

La projection actuelle de Europe Elects montre que le groupe parlementaire PPE libéral-conservateur autour de Jean-Claude Juncker serait la force dominante si l’élection avait lieu aujourd’hui malgré une perte massive de sièges. Selon la projection actuelle de l’Equipe d’Analyse Electorale Internationale, sur les 217 députés européens actuels au Groupe PPE, seuls 179 membres seraient réélus.

Dans ce cadre, et avec le système du « Spitzenkandidat », le président de la Commission proviendrait des rangs du PPE. Cependant, l’actuel président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker (PPE), ne sera pas candidat aux élections européennes de 2019. Les candidats potentiels dans les rangs du PPE sont l’actuel négociateur en chef de l’UE dans les négociations sur le Brexit, Michel Barnier, et l’ancien Premier ministre finlandais et commissaire par intérim au travail, Jyrki Katainen.

Les sociaux-démocrates (S&D) et le Brexit : la fin du rêve de la première place

Selon les prévisions, le groupe S&D subirait une perte massive et passerait de 189 à seulement 141 députés européens. La perte de voix en Europe continentale (actuellement 28 députés) et la disparition des mandats du Parti travailliste britannique avec le Brexit (actuellement 20 députés) sont les résultats les plus significatifs. Sans le Brexit, et compte tenu de la force du parti travailliste de Jeremy Corbyn, le groupe S&D aurait eu une chance de dépasser le PPE en tant que force dominante au Parlement européen et de présenter un candidat pour la présidence de la Commission. Le Brexit a rendu cela impossible, car le PPE n’est représenté ni au Royaume-Uni ni en Irlande du Nord et n’a donc pas à craindre de perte directe de sièges due au Brexit.

L’ADLE libéral près de la scission ?

L’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ADLE) entourant Guy Verhofstadt fait face à un avenir incertain. Si le parti d’Emmanuel Macron "La République En Marche !" décidait de rejoindre le groupe ADLE, et malgré la disparition des eurodéputés libéraux britanniques (actuellement 1), le nombre de membres de l’ADLE doublerait presque : ils passeraient de 68 à 113 membres. Toutefois, il n’est pas certain que le parti du président français rejoigne réellement la faction ADLE. Il semble en effet possible qu’Emmanuel Macron tente de fonder son propre groupe politique au Parlement européen, auquel appartiendrait l’aile eurofédérale du groupe ADLE actuel. Selon la classification du scientifique européen Manuel Müller, les partis libéraux de France, d’Espagne, de Roumanie (USR, mais pas ADLE), des Pays-Bas (D66, mais pas VVD), de Belgique, de Suède (L, mais pas C), d’Autriche et du Luxembourg appartiendraient au groupe d’Emmanuel Macron. Suite à cette évaluation, Europe Elects évalue à 56 les députés qui entreraient dans une faction Macron. Cependant, cette conclusion n’inclut pas les députés qui ont déjà indiqué un changement de groupe du S&D, des VERT/ALE et du PPE à une faction d’Emmanuel Macron. Parmi eux, le Parti démocrate italien, qui fait actuellement encore partie du groupe S&D. L’aile modérée anti-fédérale de l’ADLE serait alors laissée pour compte avec des partis tels que l’ANO tchèque, le FDP allemand et le VVD néerlandais avec seulement 57 députés européens.

Le Brexit porte un sérieux coup au groupe nationaliste ECR en éliminant les Tories

Le groupe des Conservateurs et réformistes européens (ECR), nationaliste et conservateur, se compose principalement d’ultra-conservateurs, de chrétiens-fondamentalistes et d’anti-fédéralistes comme Bernd Lucke. Le groupe perdrait son statut de troisième force au Parlement. Au lieu de 73 députés, comme en 2014, seuls 42 seraient détachés à Bruxelles et à Strasbourg. Le groupe ECR souffrirait principalement de la disparition des conservateurs britanniques suite au Brexit.

Il n’est pas exclut que les fractions conservatrices et eurosceptiques disparaissent complètement du Parlement européen. Pour qu’un groupe politique au Parlement européen soit reconnu comme tel, il doit être composé de 25 parlementaires provenant de sept pays. La répartition actuelle de la projection sièges donne certes 42 sièges et dix pays à l’ECR, mais selon les enquêtes récentes, il n’est pas certain que les députés de cinq de ces pays soient détachés à Bruxelles. Cela signifie que le groupe ECR doit s’attendre à un échec en raison du nombre de pays requis pour un groupe politique.

Le populiste EFDD est proche de la fin

Le groupe populiste Europe de la liberté et de la démocratie directe (EFDD) (58 sièges, plus 14 par rapport à la répartition actuelle des sièges) et le groupe GUE/NGL (61 sièges, plus 9) seraient bien plus fort que l’ECR. Derrière les libéraux, ils se battent actuellement pour la quatrième place, aux côtés de la gauche qui a réussi à étendre son avance d’un siège sur l’EFDD ces derniers mois. Contrairement à la faction de gauche qui pourrait envoyer des députés de 13 pays, l’EFDD de Beatrix von Storch ne peut actuellement compter que sur le soutien de sept pays. Cela semble techniquement suffisant, mais il est en fait peu probable que le Mouvement Cinq Etoiles italien soutienne une nouvelle fois une faction de droite. Idéologiquement, Cinq Etoiles a approché des positions manifestement plus favorables à l’euro que ce que laissait suggérer leur appartenance à l’EFDD. Cela a été également démontré par la tentative avortée de Cinq Etoiles à faire partie du groupe ADLE. D’après la projection de mai d’Europe Elects, l’Estonie ne donnerait qu’un seul siège à l’EFDD. Par conséquent, il est peu probable que l’EFDD reste dans sa forme actuelle après les élections européennes en 2019. Un grand nombre de députés EFDD ont déjà la faction de droite de Marine Le Pen dans le viseur. Celle-ci comprend, entre autres, l’AFD allemande et les démocrates suédois (SD).

Le groupe de droite ENL ne disparaît pas

Le groupe de droite de Marine Le Pen, Europe des nations et des libertés (ENL), atteindrait 47 sièges au lieu des 37 actuels, selon les dernières prévisions. Ceux-ci proviendraient de huit pays au total. Il est supposé que l’Espagne et la Slovaquie envoient chacune un représentant à l’ENL. Mais même si ces deux candidats échouent, la fin de l’EFDD pourrait sauver l’ENL, car certains des députés sans groupe à partir de 2019 pourraient rejoindre le groupe le plus proche idéologiquement – à savoir l’ENL.

Les VERT/ALE restent une petite fraction

Les partis pirates, les partis régionaux séparatistes, le parti paysan lituanien LVS et les Verts forment au Parlement européen un groupe parlementaire « VERT/ALE ». La fusion pourrait se poursuivre avec 32 sièges (-14) de 12 pays, malgré la perte de six députés du Royaume-Uni après le Brexit. Ainsi, le groupe compterait 26 délégués de neuf pays du parti vert, trois membres des pirates de la République tchèque, trois membres du Parti paysan lituanien et un député de l’ERC catalan.

Douze députés (-8) resteraient dans le groupe NI sans groupe parlementaire. Celui-ci comprend des partis de gauche ou de droite et le parti satirique de Martin Sonneborn Die PARTEI avec un siège.

Au total, 20 députés ne sont actuellement affectés à aucun groupe politique parce que leurs partis n’ont aucun lien clair avec l’un des groupes politiques représentés au Parlement européen. Concrètement, ce sont les députés des partis « Zivi Zid » et « MOST » (tous deux en Croatie), fDi en Italie, Kukiz’15 en Pologne, USR en Roumanie, PME Rodina en Slovaquie et LMS en Slovénie. MOST, USR et LMS sont des partis du centre. En revanche, FdI, Kukiz’15 et SME Rodina se situent plutôt à droite sur l’échiquier politique.

Vote : L’ADLE en chasse record

Si l’on considère la répartition des voix au Parlement européen, le groupe libéral-conservateur PPE ne serait que la deuxième force avec une part de 20,5% des voix en Europe (inchangé par rapport au mois précédent), sachant que, dans cette répartition, le Royaume-Uni est toujours pris en compte. Le groupe socialiste S&D regagnerait la première place dans le nombre de votes. 21% (+1,5) des électeurs en Europe voteraient pour la faction de centre-gauche au Parlement européen.

La faction libérale ADLE, qui comprend ici la République en Marche d’Emmanuel Macron, est actuellement à 13% (-1). Le groupe conservateur national ECR obtient lui 10,5% (+0,5). La faction populiste EFDD entourant le Mouvement Cinq Etoiles et UKIP reste, en termes historiques, forte à 8%. Le succès électoral de la Lega en Italie continue d’inspirer le groupe populiste de droite ENF de Marine Le Pen qui obtient 7% (+0,5%) des voix dans toute l’Europe. La fraction de gauche GUE/ NGL atteint 8%. Le groupe VERT/ALE reste stable (4,5%). Les parties du groupe NI atteignent 2%.

PS : L’Europe grandit de plus en plus. Des phénomènes politiques tels que le chômage ou la réaction des citoyens à un accident atomique comme celui de Fukushima se produisent de plus en plus dans plusieurs pays de l’UE simultanément. Cela affecte également le comportement de vote, créant un comportement de vote paneuropéen. Par conséquent, il est logique de rédiger un baromètre du sentiment politique pour les 28 membres de l’UE (UE28). Les résultats sont basés sur des enquêtes représentatives nationales de tous les pays de l’UE28. La date limite est le 30ème jour de chaque mois. Statistiquement, cela présente des lacunes car il n’existe parfois des sondages que sur les élections nationales et non les élections européennes.

Allocation des sièges aux groupes : les partis déjà représentés au Parlement européen sont attribués à leur groupe actuel. Les partis nationaux qui ne sont pas représentés au Parlement européen mais appartiennent à un parti européen sont affectés au groupe de la partie européenne correspondante. Les partis qui ne sont pas représentés au Parlement et dont l’affectation à une faction particulière n’est pas claire sont mis dans la catégorie « autre ». La formation d’un groupe politique nécessite au moins 25 députés d’au moins sept États membres.

Base de données : dans la mesure du possible, les calculs de sièges pour chaque pays sont basés sur la moyenne des enquêtes les plus récentes ou la projection la plus récente de la répartition des sièges sur les intentions d’élection pour le Parlement européen. Dans les pays où il n’y a pas de sondage électoral européen spécifique ou où le dernier sondage a eu lieu il y a plus de trois semaines, le sondage utilisé a plutôt été celui de l’élection au parlement national. Si aucun vote n’a été organisé dans l’État membre depuis les dernières élections législatives, le résultat de chaque élection est utilisé. La répartition des sièges est déterminée en fonction de la loi électorale européenne correspondante. En France, l’enquête la plus récente sur les élections présidentielles sera utilisée si aucun autre sondage sur les élections parlementaires ou européennes n’a été publié au cours des trois dernières semaines. Des informations générales sur les sondages utilisés peuvent être obtenues sur demande à l’adresse tobias.schminke chez gmail.com

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