C’est parti pour la Présidence belge du Conseil de l’UE !

, par Samuel Touron

C'est parti pour la Présidence belge du Conseil de l'UE !
Alexander de Croo, Premier ministre belge, sera à la tête de la Présidence tournante pour les 6 mois à venir. © Présidence belge du Conseil de l’Union européenne / Vlad Vanderkelen

« Protéger, renforcer, regarder vers l’avenir », c’est le triptyque de la présidence belge du Conseil de l’UE qui est entrée en fonction en ce début d’année. La Belgique aura à gérer de nombreuses urgences, des crises qui perdurent et le futur élargissement de l’Union. Elle passera le témoin de la présidence tournante à la Hongrie, le 30 juin 2024.

Depuis le 1er janvier 2024, la Présidence espagnole du Conseil de l’UE a cédé la place à la Présidence belge qui prend le relais pour 6 mois. Une présidence qui risque d’être éreintante pour la Belgique avec la poursuite de la guerre en Ukraine et dans la bande de Gaza, la crise énergétique et climatique, l’inflation qui demeure à un niveau élevé et l’augmentation de la désinformation. Surtout, la Belgique aura à dépasser ces crises sur fonds d’élections européennes et d’élections fédérales et régionales qui se tiendront toutes deux en juin et qui s’annoncent décisives à la fois pour l’avenir de l’Europe et de la Belgique.

Quel bilan pour la précédente Présidence belge du Conseil de l’UE ?

La Belgique endosse la présidence tournante pour la treizième fois, la dernière présidence belge du Conseil s’était déroulée au second semestre 2010, dans un contexte de crise économique et financière mondiale et de politique d’austérité. La Belgique avait une fois de place eu à traiter avec l’élargissement et avait validé l’adhésion prochaine de la Croatie à l’Union européenne, délivré le statut de candidat au Monténégro et échoué à garder tenace la volonté de l’Islande d’entamer des négociations d’entrée dans l’Union européenne. Surtout, la présidence belge avait mis en place le Service européen d’action extérieur (SEAE) dont la conception avait été portée sous présidence espagnole. La recherche et le développement ainsi que l’innovation avaient été au cœur de l’action de la Présidence belge qui avait cherché à mettre en place une nouvelle politique en la matière avec notamment le projet de brevet européen.

Quelles priorités pour la Présidence belge du Conseil de l’UE de 2024 ?

En 2024, la Belgique aura une nouvelle fois à batailler dans un contexte politique intense et devra une nouvelle fois travailler sur l’élargissement de l’Union, six priorités ont été identifiés par la Présidence belge :

  • Défendre l’Etat de droit, la démocratie et l’unité ;
  • Renforcer la compétitivité de l’UE ;
  • Poursuivre une transition écologique juste ;
  • Renforcer le programme social et sanitaire ;
  • Protéger les individus et les frontières ;
  • Promouvoir l’Europe mondiale

Le contexte de crise géopolitique mondiale et de recomposition de l’ordre géopolitique transparaît largement dans les priorités identifiées par la Présidence belge qui a souhaité faire de la défense de l’Etat de droit, de la démocratie et de l’unité, la première de ses priorités. Le renforcement de la compétitivité de l’UE, la protection des individus et des frontières ainsi que la promotion de l’Europe mondiale viennent toutes trois dessiner la nécessité de proposer un nouveau modèle européen, résilient face aux crises et capable de s’imposer dans un système multilatéral mis à mal. La Belgique souhaite notamment faire adopter l’ensemble des dossiers législatifs bloqués sur le nouveau Pacte européen sur l’asile et les migrations. Elle ambitionne de travailler plus étroitement avec les Etats africains sur ce dossier afin d’apporter une « réponse commune rapide aux crises migratoires et améliorer les voies légales d’accès à l’UE (…) dans le respect du droit international  ». Le «  Plat Pays » aura fort à faire pour faire adopter ce nouveau Pacte sur l’asile et les migrations tant ce sujet reste sensible politiquement et divise les Etats membres. Le 20 décembre 2023, le Parlement européen et le Conseil étaient tombés d’accord sur un certain nombre de paquets législatifs qui avaient été dénoncés par de nombreuses associations humanitaires. La Belgique devra faire adopter les paquets législatifs les plus sensibles avant les élections européennes pour ne pas mettre en péril l’ensemble du texte, il faudra donc agir vite et juste.

Autre priorité au cœur de la Présidence belge, l’avenir industriel de l’UE. La Belgique entend consolider le marché intérieur notamment sur le numérique tout en garantissant l’accès équitable aux marchés à l’ensemble des PME. Elle entend ainsi achever les travaux sur l’union des marchés de capitaux et l’union de l’énergie tout en renforçant les investissements public-privé et la politique de cohésion. En toile de fond, la transition écologique et énergétique constituera évidemment l’essentielle variable à prendre en compte pour assurer un avenir industriel durable au continent.

Enfin, la Présidence belge entend favoriser une société européenne plus inclusive, plus égalitaire et plus juste pour toutes et tous. L’approfondissement du Dialogue social, l’accès à une protection sociale universelle, l’approfondissement du Semestre européen et l’accès à un logement décent constitueront les axes d’action de la Belgique sur le volet social. La santé, également, avec la sécurisation de l’approvisionnement européen en médicaments et une meilleure gestion des besoins médicaux non-satisfaits sera à l’agenda de l’action belge.

Les élargissements à venir, au cœur de la Présidence belge ?

Au-delà des priorités et du programme de la Présidence belge du Conseil, ce sont les questions liées aux négociations d’adhésion, à la politique de voisinage et aux affaires étrangères qui risquent de grandement occuper la Belgique.

En effet, en cette année de commémoration des 20 ans de l’élargissement de 2004 qui avait vu dix nouveaux pays entrer dans l’Union européenne, l’Union européenne doit préparer son futur élargissement vers les Balkans Occidentaux puis plus tard vers l’Est et le Caucase. Neuf pays sont actuellement candidats reconnus : la Macédoine du Nord, l’Albanie, le Monténégro, la Serbie, la Bosnie-Herzégovine, la Turquie, la Moldavie, l’Ukraine et la Géorgie. Or, sans nouveau traité et sans réforme institutionnelle de l’Union, celle-ci deviendrait presque ingouvernable, compromettant son fonctionnement institutionnel. La Belgique devra donc préparer la réforme de l’Union, repenser ses stratégies politiques, ses budgets et ses institutions, dans la perspective des élargissements à venir.

Pays habitué aux compromis du fait de son propre fonctionnement institutionnel, la tâche s’annonce donc de taille pour la Belgique, elle-même confrontée à des difficultés institutionnelles et structurelles profondes à l’approche de l’échéance des élections fédérales et régionales. Néanmoins, qui mieux que la Belgique sait agir en intermédiaire neutre (honest broker), capacité essentielle pour mener à bien une présidence du Conseil de l’UE ? Le Premier ministre belge, Alexander de Croo, son gouvernement et les équipes mobilisées sur la Présidence belge auront à le prouver durant les six prochains mois. En attendant, se tient actuellement à Namur, la première réunion informelle des ministres de l’emploi et des affaires sociales, en même temps qu’une réunion de préparation du prochain Conseil de l’UE (COREPER) à Bruxelles. La Présidence belge est ainsi belle et bien lancée.

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