Le 8 mai 1945, le Troisième Reich signe un acte de capitulation en présence des Alliés, mettant fin à la guerre sur le sol européen. Si le 8 mai est férié en France depuis 1981, de l’autre côté du Rhin, il représente une journée commémorative mais qui reste travaillée. Cette date a longtemps été perçue comme une honte pour le peuple allemand, rappel d’un passé sombre et douloureux. En 1985, alors que l’Allemagne est toujours divisée en deux, le président de la République Fédérale d’Allemagne Richard von Weizsäcker, brise cette image en qualifiant cette date de “jour de libération” (Tag der Befreiung).
Le 8 mai férié seulement à Berlin
En Allemagne, les jours fériés varient en fonction des États fédérés. À l’exception des grandes fêtes catholiques et de la fête nationale le 3 octobre, chaque Land (État fédéré) peut décréter un ou plusieurs jours fériés supplémentaires. Le 8 mars, journée internationale des droits des femmes est par exemple férié dans le Land de Berlin et est rejoint cette année par le 8 mai, pour la deuxième fois de l’histoire.
En 2025, pour commémorer les 80 ans de la libération du nazisme et de la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe, le 8 mai a été déclaré férié à titre exceptionnel. Cette mesure émane d’une proposition du Sénat berlinois au milieu de l’année 2023, qui souhaitait rendre un hommage à cette date particulière. La proposition a été adoptée en juillet 2024 par le Landtag (parlement régional) de Berlin, actant la décision de rendre ce 8 mai férié. La même décision avait été prise en 2020 pour le 75ème anniversaire de cette date.
Cette décision sert à “faire prendre conscience que la cohabitation pacifique ne va pas toujours de soi”, comme l’indique le Sénat berlinois pour justifier sa proposition. Si le 8 mai n’est férié qu’exceptionnellement cette année, des manifestations commémoratives sont organisées chaque année dans toute l’Allemagne.
Une semaine thématique à Berlin
Le 8 mai revêt d’un caractère particulier cette année à Berlin car l’ensemble de la semaine du 2 au 11 mai est placée sous le thème des “80 ans de la fin de la guerre et de la libération de l’Europe du national-socialisme”. L’évènement est organisé par la ville de Berlin et le Kulturprojekte Berlin, une société à but non lucratif, dont le but est de promouvoir la culture et l’histoire. C’est cette même société qui est à l’origine de l’organisation des 35 ans de la chute du mur de Berlin en novembre dernier, évènement qui s’est clôturé par un concert grandiose rassemblant près de 700 musiciens dans toute la ville : la fête de la liberté (“Fest für Freiheit”).

Pas de concert de cette envergure prévu pour le 8 mai, mais de nombreuses manifestations. La plus notable est l’exposition éphémère installée sur la Pariser Platz devant la porte de Brandenbourg qui retrace l’histoire de la Seconde Guerre mondiale et de l’après-guerre. Cette exposition en 12 chapitres met en lumière les obstacles dans la construction de la paix et les difficultés des personnes survivantes des camps de se sentir appartenir à nouveau à une nation. Au-delà de cette exposition, des projections de films, lectures, visites guidées ou encore pièces de théâtre sont organisées dans toute la ville. De quoi (re)découvrir Berlin avec un œil historique et rendre hommage aux 80 ans de la libération de l’Europe du national-socialisme.
Et ailleurs ?
La France, où le 8 mai n’est définitivement férié que depuis 1981, est l’un des seuls pays à ne pas travailler ce jour-là. Seule la République Tchèque et la Slovaquie ont également fait du 8 mai un jour férié permanent. La fête de la Victoire est certes commémorée dans de nombreux pays, mais elle n’est pas pour autant fériée de partout. C’est le cas par exemple du Royaume-Uni et des États-Unis, qui faisaient pourtant partie des forces alliées.
D’autres pays ont choisi d’autres dates pour commémorer la fin de Seconde Guerre mondiale en Europe, plus adaptées à leur histoire nationale. Par exemple, en Italie, une “fête de la liberté” (Festa Della Liberazione) a lieu le 25 avril, en référence à une offensive de la Résistance en 1945, libérant plusieurs villes du Nord du pays comme Milan et Gênes de l’occupation nazie. En Pologne, la fin de la guerre était célébrée le 9 mai, comme en Russie qui la célèbre toujours à cette date, en raison du décalage horaire, l’acte de capitulation ayant été signé aux alentours de 23h. En 2015, le décret soviétique officialisant cette date est abrogé par le Parlement polonais et remplace par une loi qui instaure le 8 mai comme date de la commémoration.
Aujourd’hui, la désignation du 8 mai comme férié, à Berlin, comme dans tous les pays européens, contribue à lever le tabou et à renforcer l’unité européenne, plus que jamais menacée au sein même de ses frontières.
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