Congé paternité : Où fait-il bon être père en Europe ?

, par Sophia Berrada

Congé paternité : Où fait-il bon être père en Europe ?
Crédit : Pixabay

L’Élysée n’est pas peu fier de « faire passer la France d’une position médiane au peloton de tête des pays européens les plus en avance » en matière de congé paternité. Le 23 septembre, lors d’un déplacement au centre de Protection maternelle et infantile de Longjumeau dans l’Essonne, Emmanuel Macron a annoncé que les pères auraient désormais droit à 28 jours de congés à la naissance de leur enfant, au lieu des 14 accordés aujourd’hui. Quid du peloton européen ?

Les disparités entre les pays du vieux continent sont considérables

Les pays scandinaves sont les grands champions du congé paternité. Le maillot jaune revient à la Norvège, nation créatrice de l’idée-même d’octroyer aux pères un congé à la naissance de leur enfant, en 1993. La loi permet aux couples de bénéficier de 3 semaines de congés, puis chacun a droit à 15 autres semaines. De surcroît, si le père décide de profiter de ses 15 semaines à lui, les parents pourront se répartir 16 semaines de congés supplémentaires. Pendant cette période, les parents norvégiens touchent la totalité de leur salaire, l’Etat versant l’argent nécessaire dans le porte-monnaie de l’employeur.

La Finlande propose aux pères 9 semaines de congés, rémunérées à hauteur de 70% de leur salaire. Le gouvernement de la première ministre Sanna Marin a par ailleurs annoncé qu’à partir de 2021 les pères auraient, comme les mères, droit à 7 mois de congé parental indemnisés. En Suède, les parents disposent chacun de 2 mois de congés obligatoires, et d’onze autres mois à se répartir.

Certains pays du Sud de l’Europe se distinguent aussi, notamment l’Espagne et ses 16 semaines de congé paternité, et le Portugal qui offre 5 semaines aux pères, auxquelles s’ajoutent 150 jours à se partager avec la mère. La France se place donc à la suite de ce quintette de tête, aux côtés de ses camarades slovène et lituanien, où le congé paternité dure déjà quatre semaines. C’est plus qu’en Irlande ou au Danemark, où il s’élève à deux semaines seulement, et qu’en Belgique et au Luxembourg qui n’offrent que dix jours.

En queue de peloton se situent l’Italie (7 jours de congé paternité), puis la Hongrie, la République Tchèque et les Pays-Bas qui accordent aux pères le nombre d’heures travaillées sur une semaine (par exemple, si ils travaillent 5x6h par semaine, ils disposent de 30 heures de congé, rémunérées à 100%). En Grèce, les pères ont droit à deux jours de congé, tandis qu’en Slovaquie et en Croatie le dispositif n’existe même pas.

Le cas de l’Allemagne est particulier, puisque les deux parents se partagent à leur guise un congé parental pouvant aller jusqu’à 14 mois. En comparaison, les Etats-Unis sont le seul pays de l’OCDE à ne proposer ni congé paternité, ni congé maternité.

La directive européenne adoptée en juin 2019 vise à harmoniser les dispositifs des Etats membres

Initialement proposée par la Commission Juncker au printemps 2017, la directive européenne concernant l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée a finalement été adoptée le 20 juin 2019. Le Conseil et le Parlement européens se sont accordés sur le principe d’un congé paternité d’une durée minimale de 10 jours à la naissance de l’enfant, dans tous les pays de l’Union européenne. Il devra être remboursé au moins à hauteur des prestations du congé maladie de l’État membre.

En outre, les pays européens devront proposer un congé parental (pour compléter les congés paternité et maternité) d’au moins quatre mois, dont deux ne seront pas transférables à la mère. Les Etats membres devront rendre leur copie le 2 août 2022.

Le processus législatif de cette directive a connu de nombreux remous après que certains Etats membres ont freiné les mesures les plus fortes et conséquemment les plus coûteuses. La France et l’Allemagne s’étaient en particulier opposées à ce que le congé parental soit, à l’instar du congé paternité, remboursé comme un congé maladie. « J’en approuve les principes, mais c’est une belle idée qui peut coûter très cher et finir par être insoutenable », avait déclaré Emmanuel Macron, lors d’un discours à l’hémicycle de Strasbourg en avril 2018. De l’eau a coulé sous les ponts puisque le secrétaire d’Etat français chargé de l’Enfance et des Familles, Adrien Taquet, a annoncé le 10 octobre dernier que « l’allongement du congé paternité serait une première étape d’une réforme ambitieuse du congé parental ».

Cette directive européenne de juin 2019 vise entre autres à lutter contre la répartition inégale des tâches au sein de la famille et à faciliter la reprise du travail pour les mères. Cependant d’après Hélène Périvier, économiste à l’OFCE Science Po et directrice du Programme de Recherche et d’Enseignement des Savoirs sur le Genre (PRESAGE), l’allongement du congé paternité « n’a que très peu d’effets en matière d’égalité professionnelle », ce serait davantage l’accueil des jeunes enfants jusqu’à leur scolarisation qu’il faudrait repenser. « Après le congé maternité-paternité, il reste encore deux ans et demi avant la scolarisation des enfants qui sont encore très insuffisamment pris en compte », explique Hélène Périvier au micro de France Culture.

Sans être révolutionnaire (la Commission Cyrulnik, présidée par le Boris du même nom, autrice du rapport sur les 1000 premiers jours de l’enfant, préconisait un allongement du congé paternité à 9 semaines), la réforme française évolue dans le bon sens et s’inscrit plus globalement dans une dynamique européenne timide, mais salutaire.

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