Pendant les quarante-six années sous influence soviétique, l’Europe de l’Est a accumulé un retard de développement conséquent face à une Europe occidentale bénie par les « Trente Glorieuses » et les différents progrès techniques et sociaux. L’Europe occidentale, à travers divers traités, commence à former ce que l’on n’appelle pas encore l’Union européenne. Les différences entre les pays issus des deux blocs sont tellement criantes que l’on parle alors, avec l’élargissement de l’Union européenne, de la « réunion de deux mondes ».
Un retard de développement
En 2004, le PIB en parité de pouvoir d’achat des pays d’Europe de l’Est était en moyenne deux fois, voire trois fois moins élevé que la moyenne de l’Union européenne. Un retard dû notamment au passage brutal de l’économie collectiviste à l’économie de marché, à la suite de la chute du mur de Berlin.
De plus, le taux de chômage supérieur à la moyenne de l’Union (environ 9%) dans certains pays entrants, notamment en Pologne où il était de presque 20%, a provoqué la peur d’une recrudescence du chômage dans les pays de la « Vieille Europe ». En effet, certains partis politiques (comme les communistes) argans que le marché commun du travail créerait une concurrence dommageable pour les travailleurs occidentaux, se sont fermement opposés à l’élargissement.
Enfin, l’Europe de l’Est connaît en 2004 un retard de développement industriel, notamment dû à l’entrée brutale de cette région dans le marché occidental où règne la libre concurrence. Les machines vieillissantes ne sont plus assez productives pour le marché ouvert européen, provoquant un véritable choc pour les industriels est-européens.
Une jeunesse institutionnelle et juridique
Alors que la démocratie règne en Europe depuis un demi-siècle, à l’exception notable de l’Espagne et du Portugal, qui étaient alors de jeunes démocraties trentenaires, les pays candidats à l’élargissement en 2007 ont effectué leur transition démocratique moins de quinze ans avant leur adhésion. Ainsi, certains critères à l’entrée dans l’Union, comme la lutte contre la corruption et l’indépendance de la justice, ont complexifié le processus. Difficulté supplémentaire : les pays d’Europe de l’Est ont dû adapter leurs législations aux décennies de droit communautaire élaborées par l’Union européenne et ses prédécesseurs, à commencer par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne de 2000, qui lutte notamment contre les discriminations.
En parallèle de toutes ces procédures, les pays entrants doivent aussi se soumettre à la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE), ce qui cause alors un problème constitutionnel dans certains pays candidats, pour qui la souveraineté nationale prime avant le droit européen. De fait, des pays membres refusent encore aujourd’hui de reconnaître certaines décisions de la CJUE - c’est notamment le cas le 15 février 2023, lorsque la Cour sanctionne la Pologne pour non-respect de la primauté des traités européens.
Enfin, la différence majeure entre l’Europe de l’Ouest et de l’Est est d’ordre historique, et s’attaque aux fondements même de l’organisation de l’État : l’opposition entre le capitalisme et le communisme. L’Est a en effet connu presque cinquante ans de domination soviétique, tandis que l’Europe de l’Ouest a observé, durant la même période, un développement économique et social croissant. L’Europe de l’Est, semble-t-il, fut quasiment figée pendant cinquante ans. Ainsi, le Mur construisit un fossé entre les deux Europes.
C’est pourquoi l’Union européenne eut le rôle d’une passerelle entre ces deux mondes trop longtemps séparée, confirmant ainsi sa devise : In varietate concordia (Unis dans la diversité).
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