La politique européenne de l’eau confrontée à une évolution constante
L’Europe a mesuré les enjeux liés à l’eau à partir des années 1970. Les premiers textes relatifs à la qualité de l’eau avaient pour objet l’alimentation humaine, la baignade ou encore la pisciculture. L’approche de l’Union européenne se concentrait ainsi sur la protection des eaux utilisée par l’homme. Par la suite, la législation communautaire s’est intéressée aux usages de l’eau et à la réduction de la pollution. Cette approche fut indispensable pour la gestion des cours d’eau, traversant plusieurs pays comme le Rhin, l’Escaut ou encore le Rhône.
Les années 1990 ont donc vu non seulement l’émergence des problématiques liées à la pollution, mais aussi l’apparition de nouveaux concepts tels que le développement durable. Ainsi, des directives ont été adoptées telles que la directive relative aux eaux résiduaires urbaines ou encore celle concernant la réduction de la pollution des eaux par les nitrates d’origine agricole. Couplées à la libéralisation du service public et au traité de Maastricht de 1992, ces années ont permis d’agir à la fois dans un cadre environnemental et dans le cadre du marché intérieur.
Plus récemment, les années 2000 ont été marquées par la directive cadre sur l’eau (DCE) visant à donner une cohérence à l’ensemble de la législation européenne. La directive tend à ressembler au système de gestion de l’eau en France, permettant une protection aux eaux de surface intérieure, côtière et souterraine. Il fallait ainsi prévenir les écuries, protéger l’environnement et atténuer les inondations. La Commission s’est notamment appuyée sur l’Agence européenne de l’environnement (AEE). Cependant, malgré de notables avancées, l’Europe doit faire plus.
La politique européenne de l’eau entre espoir et désenchantement
La directive cadre de 2000 a un bilan mitigé, bien loin d’avoir atteint ses objectifs. Si elle donnait l’obligation d’atteindre un bon état des eaux et des milieux aquatiques d’ici 2015, l’Union européenne constatait néanmoins en 2007 une « transposition médiocre », une coopération internationale insuffisante et une « absence d’analyse économique ». Si en France, le Grenelle II avait fait état de 66% de la masse d’eau du pays en bon état écologique, la France est aujourd’hui redescendue à 40%. Et récemment, si l’Irlande a du renoncer à sa gestion de l’eau gratuite, c’est davantage par la sévérité des mesures d’austérité que par une réelle politique européenne de l’eau.
En dehors de la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne ou l’Espagne ont développé des systèmes performants de gestion de l’eau depuis un certain temps. A ce titre, l’enjeu lié à l’harmonisation des Etats membre est capital. La politique de l’eau ne peut plus être contenue dans des secteurs. Son amélioration repose sur son intégration dans les diverses politiques européennes. Il faut l’intégrer dans les domaines de l’agriculture, de l’environnement ou encore de l’énergie. Par exemple, en matière énergétique, la place de l’eau est décisive. La question des gaz de schiste, l’utilisation abondante de l’eau et sa pollution posent problème. De même, le changement climatique entraine inondations et sécheresses auxquelles l’Union européenne doit faire face. Il faut davantage penser à restaurer le cycle de l’eau, rendre l’eau à la terre. Il faut l’intégrer dans l’ensemble des contraintes actuelles. Et même au-delà, il faut garantir l’eau comme droit humain.
L’Union européenne face à sa clarté et sa crédibilité
A la suite de la directive cadre de 2000, un nouveau plan de sauvegarde de l’eau en Europe est apparu pour 2015-2030, mais sans intégrer l’eau comme droit humain. Les citoyens européens ont du ainsi s’emparer de l’enjeu via l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE). La Commission a reçu la demande « Right to water » signée par 1,884 million de citoyens dans plus de sept Etats membres différents. Elle invite la Commission européenne à proposer une législation qui fasse du droit à l’eau et à l’assainissement un droit humain au sens que lui donnent les Nations unies, et à promouvoir la fourniture d’eau et l’assainissement en tant que services publics essentiels pour tous.
En effet, en 2010, et à l’inverse de l’Europe, les Nations unies ont reconnu l’eau en tant que droit humain. Ce fut un tournant majeur lié à des mouvements citoyens, d’associations dans le monde entier. Ce n’est pas un hasard si un pays tel que la Bolivie a proposé cette initiative. Le texte déclare que « le droit à une eau potable propre et de qualité et à des installations sanitaires est un droit de l’homme, indispensable à la pleine jouissance du droit à la vie. » La résolution pointe le fait que 884 millions de personnes dans le monde n’ont pas accès à l’eau potable et que plus de 2,6 milliards ne disposent pas d’installations sanitaires de base. Elle souligne également qu’environ deux millions de personnes, pour la plupart des jeunes enfants, meurent chaque année des suites de maladies causées par une eau impropre à la consommation et l’absence de sanitaires.
De fait, dans le cadre de l’année européenne du développement, l’Union européenne doit s’affirmer dans ce domaine en témoignant de son leadership sur les questions environnementales. En tant que premier pourvoyeur d’aides humanitaires au monde, l’Union européenne verse la moitié de l’aide internationale. Elle finance également son projet le plus important d’accès à l’eau en Mauritanie autour du forage et des puits qui a pour ambition que 100 000 personnes puissent disposer d’eau potable. Néanmoins, il existe encore des pays européens où la situation est catastrophique, résultant de divers choix politiques. 16% des Européens ne disposent pas de cette ressource vitale.
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