L’Union européenne, attendue sur la scène mondiale
Le Président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a prononcé ce mercredi 12 septembre 2018, son quatrième et dernier discours sur l’Etat de l’Union (SOTEU), avant les élections européennes de mai 2019. Considérant la Commission actuelle comme un épisode d’une Histoire bien plus grande, se définissant comme le serviteur d’un grand dessein, Jean-Claude Juncker s’est refusé à tout exercice de bilan. Son discours a cependant révélé une forme de conclusion personnelle : le Président de la Commission n’a pu accomplir sa véritable volonté. Le 22 octobre 2014, lors de la présentation de son programme de travail pour les cinq années de son mandat, Jean-Claude Juncker souhaitait « passer à l’action », affirmant que sa Commission serait celle de la « dernière chance ». Il affichait alors, sa détermination à faire de l’Europe un ensemble politique légitime et crédible, se consacrant aux « grandes choses » [1].
Las, les réalités de l’Union et des institutions européennes ne lui ont pas permis d’aboutir à la fondation d’une Europe forte et souveraine, s’affirmant comme un acteur majeur des relations internationales. Il s’agit encore d’un projet, dont il trace perpétuellement les perspectives. Jean-Claude Juncker est donc un homme qui veut continuer à agir pour l’Europe, la grande affaire de sa vie. Une grande affaire qui ne peut s’achever. Jean-Claude Juncker a exprimé l’exigence de voir une Europe qui quitte les gradins du stade mondial, qui cesse d’être un spectateur, pour devenir un acteur global, un architecte du monde de demain. A cette fin, il a appelé l’Union à réaliser des progrès tangibles, notamment en instaurant par la voie de la clause passerelle du Traité de Lisbonne, un vote à la majorité qualifiée permettant au Conseil européen de statuer en matière de politique étrangère. L’action de la Commission européenne a notamment été marquée par une amélioration de la cohérence diplomatique de l’Union, ainsi que par des avancées dans le domaine de la Défense mais nous sommes encore loin de la finalité tant souhaitée. Dans le contexte d’un unilatéralisme américain exacerbé, d’un multilatéralisme menacé, d’une affirmation croissante de la Chine, d’un Moyen-Orient chaotique, l’Union européenne ne dispose pas des outils nécessaires pour devenir un acteur déterminant des relations internationales. Les Européens doivent se réveiller et s’organiser, alors qu’il existe dans le monde une « demande d’Europe » [2].
Les combats politiques se mènent à l’échelle du globe
Le mardi 11 septembre 2018, lors du neuvième débat sur l’avenir de l’Europe, le Premier Ministre grec, Alexis Tsipras, a lancé un appel pour une réforme ambitieuse de l’Europe. Le chef du gouvernement de la République hellénique, a notamment annoncé que les élections européennes de mai 2019 représenteront la plus importante des batailles. Alexis Tsipras a averti que le scrutin européen de 2019 entraînera un combat majeur des valeurs et des principes. Une collision qui, selon lui, devra unifier toutes les forces progressistes, démocrates et pro-européennes, afin de briser les nationalismes et les populismes et d’éviter ainsi une déflagration de l’Union qui deviendrait un espace fragmenté, sans cohésion, sans rôle, privé de toute perspective internationale.
En ce début de XXIème siècle, les combats politiques se mènent définitivement à l’échelle du globe. Pour se réinventer, l’Europe doit écrire une nouvelle histoire et conduire un projet de transformation pour le monde. C’est une vision de l’humanité que les progressistes européens doivent affirmer, pour contrer la violente et dangereuse offensive des régimes et des figures autoritaires. « Nous avons une meilleure histoire à raconter », déclarait Barack Obama le 17 juillet 2018 [3], tout en rappelant que les humanistes pouvaient perdre, dans leur combat pour la liberté et la défense des droits de l’Homme. Comme l’énonçait l’ancien Président des Etats-Unis, les progressistes devront travailler plus durement, apprendre des erreurs du passé récent et devenir plus habiles. Un nouveau modèle est à imaginer, un modèle innovant qui entraînera l’émergence d’un monde durable et l’émancipation des générations futures.
La France, réacteur incontournable de l’affirmation d’une nouvelle Europe, dans le monde
Dans des circonstances où l’Allemagne s’éloigne des grands enjeux européens et se focalise sur ses difficultés de politique intérieure comme sociétales, la France ne peut suivre la même évolution, elle est face à la nécessité de ne pas s’enfermer, de prendre l’initiative et d’assumer seule un rôle de moteur de la construction européenne. Le défi pour le Président français, Emmanuel Macron, est de démontrer son efficacité de Chef d’Etat, une efficacité dans la réalisation de sa politique intérieure, une efficacité dans la relance de la construction européenne, alors que les démocraties libérales voient leur efficience et leur légitimité contestées, notamment par les démocraties illibérales qui se veulent plus souveraines.
Le Président de la République française, a réaffirmé son ambition européenne, le 27 août 2018, lors de son discours devant les ambassadeurs. Son allié, le député européen Guy Verhofstadt, pourra l’aider à bâtir une dynamique progressiste et pro-européenne, au service d’un projet ambitieux et innovant, dans la perspective des élections européennes de 2019. Le centriste et européen, François Bayrou, est également un partenaire à écouter. Pour Emmanuel Macron, il est désormais crucial de construire un récit fort, pour la France et l’Europe, à la manière d’un Barack Obama. Mais contrairement à l’ancien Président américain, Emmanuel Macron devra trouver la juste déclinaison en actes et réaliser une action politique, aussi forte que l’élan de ses mots. Le Forum de Paris sur la paix, qui se déroulera du 11 au 13 novembre 2018, permettra à la France d’assumer un rôle moteur, dans l’environnement d’une diplomatie européenne partagée. Alors que nous assistons à une progression des flux migratoires, à l’émergence d’une nouvelle structure internationale de puissance, au risque réel d’un nouvel embrasement au Moyen-Orient, il est temps d’engager l’Europe et le monde dans la définition d’une gouvernance ambitieuse pour la planète.
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