L’Union européenne, fait à multiples facettes

, par Jean-Louis Hanff

L'Union européenne, fait à multiples facettes
Tombe de Robert SCHUMAN, l’un des Pères fondateurs de l’Union européenne, est décédé le 4 septembre 1963. Source : Parlement européen

Si l’on peut naturellement s’interroger sur l’Europe que nous souhaitons, il est nécessaire de réconcilier son histoire avec son avenir, d’oser orienter notre destinée commune en filiation de ce qui nous a rassemblé et nous rassemble encore aujourd’hui. Il est temps, plus que jamais, de réenchanter l’Europe !

Actuellement, le mot « Europe », s’il est cher à la majorité d’entre nous, recouvre des significations diverses. Qu’on soit de « gauche » ou de « droite », « fédéraliste », « europhile » ou « eurosceptique », chacun se dit néanmoins attaché à une certaine idée de l’Europe. Pour alimenter cette réflexion, Sébastien Maillard, directeur de l’institut Jacques Delors, distingue pertinemment trois Europe (1) : L’Europe civilisationnelle (l’Europe solide), l’Europe institutionnelle (l’Europe liquide) et l’Europe de projet (l’Europe gazeuse).

L’Europe solide

L’Europe civilisationnelle, dont l’héritage est façonné en grande partie par la pensée classique grecque, le droit romain, le christianisme, l’humanisme et la Raison des Lumières. La tentation fréquente, en évoquant cette Europe, revient soit à ignorer (voire nier) une partie de son existence, soit à instrumentaliser politiquement à des fins identitaires au lieu de simplement l’assumer comme une partie de notre histoire qui continue de vivre à travers nous. D’où l’importance de familiariser les jeunes générations avec l’héritage européen commun, notamment à travers des cours d’histoire de l’Europe, ou avec des initiatives comme l’édification d’une Maison de l’Histoire de l’Europe. Car comme le disait si bien Jacques Delors, « on ne tombe pas amoureux du marché commun ».

L’Europe liquide

Le fameux « Bruxelles » : c’est l’Europe institutionnelle. Pointé du doigt par les mouvements populistes, ce sont les quelques 30.000 fonctionnaires qui travaillent dans les diverses institutions européennes au service de l’Europe dans son ensemble : ses citoyens, ses États, leur futur. Pour ne pas céder au Brussels bashing et afin de mieux valoriser le travail de l’Europe dans notre quotidien, il est crucial de mieux informer les citoyens des réalisations faites au niveau de l’Union européenne et surtout d’améliorer la communication des institutions.

L’Europe gazeuse

L’Europe c’est aussi un projet commun qui incarne son devenir, une volonté commune à chacun de « faire l’Europe », véritable nécessité aux vues des défis sociétaux qui se révèlent (notamment géopolitiques , socio-économiques et climatiques) et qu’il faut anticiper. Car on l’oublie souvent : la construction européenne fut en premier lieu établie comme une réponse audacieuse, pratique et concrète, à l’absence de valeurs humanistes dont notre continent a pu faire les frais au travers des guerres mondiales, des dérives manifestes du fascisme, du national-socialisme et du communisme. C’est l’audace presque « surnaturelle » du pardon et de la réconciliation entre la France et l’Allemagne, qui a été le moteur de l’intégration européenne. Le devenir de l’Europe (de tout temps et encore aujourd’hui) dépend de cette audace, celle d’oser transformer les peurs en espoir partagé.

L’idéal des Pères fondateurs

Ces trois Europe doivent impérativement se conjuguer pour opérer l’idéal des pères fondateurs. Pour cela, le projet européen a besoin de visionnaires au service du bien commun. Herman Van Rompuy, ancien premier ministre belge et président du Conseil, aimait à dire que la politique est un « équilibre entre l’idéalisme éthique et un réalisme politique ». Cette vision, pragmatique et raisonnée, fait défaut actuellement alors qu’elle est vitale pour porter l’Europe de demain.

Plutôt que d’opposer les Européens, il est primordial de les rassembler autour d’un projet commun et de l’animer, au-delà des idéologies et dans l’esprit de ses pères fondateurs. Aux États-Unis, il est coutume d’évoquer les founding fathers, les Pères fondateurs pour inspirer les politiques à mener. Chez nous aussi, des personnages emblématiques tels que Schuman, Adenauer, De Gasperi, Spinelli ou Spaak doivent demeurer des sources d’inspiration face aux simplismes, à la recherche de l’immédiateté et à la quête de notoriété qui gangrènent la politique contemporaine. Nous avons nos propres pères fondateurs : soyons-en fiers.

(1) Inspiré de la conférence de Sébastien Maillard au Collège St Michel « L’Europe, quelle identité ? », 28 mars 2019

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