L’état des lieux de la situation française
Face à la pandémie, des restrictions soient nécessaires. Mais elles ont un coût dont les répercussions sont désormais clairement visibles. Sur le plan économique, le produit intérieur brut a chuté de 13.8% lors du second semestre et le taux de chômage devrait prochainement atteindre la barre historique des 10% [1]. Sur le long-terme, on peut également envisager une dégradation des finances publiques.
Selon des prévisions formulées par la Cour des comptes, la dette publique devrait s’élever à 120.9% du PIB en 2020 et le déficit à 11% [2]. Ces derniers chiffres peuvent paraître anodins, mais pourtant, ils montrent un éloignement de la France vis-à-vis des critères de convergence fixés par l’Union Européenne. Plus grave, le risque est un abaissement de la note financière de la France par les agences de notation telles que Standard and Poor’s. En effet, la dégradation de cette note pourrait conduire à un alourdissement de la charge de la dette en raison de taux d’intérêt toujours plus hauts, auxquels l’Etat français emprunte.
Face à cette situation critique, l’heure est désormais à la relance économique. Dans ce contexte, émerge une institution parfois délaissée voire critiquée qui œuvre en faveur de cette reprise : La Banque centrale européenne (BCE). Institution de l’Union Européenne, la Banque Centrale Européenne est en charge de la politique monétaire au sein de la Zone Euro. Par son action, elle influe sur la quantité de monnaie en circulation (« masse monétaire ») afin de garantir la stabilité des taux d’intérêt, la stabilité des taux de change et la stabilité des prix. De plus, associé à la stabilité des prix, l’institution européenne vise une inflation tempérée, proche de 2%. Enfin, on attend également de la BCE que sa politique produise des externalités positives sur l’économie telles que la croissance et l’emploi [3].
Les mesures de la Banque Centrale Européenne pour renouer avec la croissance économique
Aujourd’hui, en réaction à cette phase de récession économique provoquée par le COVID-19, l’institution a récemment annoncé des mesures fortes. En premier lieu, La Banque Centrale Européenne a maintenu ses taux d’intérêt au plus bas. Le taux de refinancement, désignant le taux d’intérêt appliqué aux emprunts temporaires des institutions bancaires auprès de la BCE, est de 0%. Pour ce qui concerne les « réserves obligatoires », c’est-à-dire les dépôts obligatoires des banques auprès de la BCE, le taux d’intérêt est négatif (-0.50%). En bref, au lieu d’être rémunérées sur leur dépôt, les banques font l’objet de prélèvements et sont incitées à ne pas déposer davantage.
En parallèle de de ces actions, la Banque Centrale a lancé le 18 mars 2020, le Programme d’Achats d’Urgence Pandémique (PEPP), un programme dont le montant atteint 1350 milliards d’euros et qui est censé se poursuivre au moins jusqu’en juin 2021 [4]. Derrière cette formulation obscure, le PEPP s’apparente en réalité à de « l’assouplissement quantitatif », consistant en un rachat massif par la BCE d’actifs détenus par les banques (obligations d’Etat,…). Intervenant seulement dans des circonstances économiques particulières telles qu’une récession économique, l’assouplissement quantitatif se fait rare et vise à pallier l’inefficacité des instruments conventionnels. Tout comme les taux d’intérêt négatifs, l’assouplissement quantitatif est un moyen d’augmenter les liquidités des structures bancaires et les inciter à prêter.
Par ces différentes initiatives, l’objectif est le même : une expansion de la masse monétaire afin de stimuler l’inflation et diminuer les taux d’intérêt bancaires. Ces objectifs poursuivis sont importants car ils peuvent avoir une incidence positive sur « l’économie réelle ». À titre d’exemple, une diminution des taux d’intérêt bancaires est susceptible d’aboutir à une augmentation des prêts accordés aux ménages et aux entreprises. Puis, cette augmentation est censée stimuler la demande et l’investissement et soutenir la croissance économique.
Cependant, Il n’y a aucune certitude sur le fait que la politique monétaire aura les effets escomptés car la transmission des mesures au sein de l’économie réelle n’est qu’hypothétique. Cette incertitude est notamment soulignée par Christian De Boissieu, Professeur émérite d’économie à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne : « Il n’y a rien de mécanique : tout dépend du comportement et des anticipations des banques et des agents financiers » [5]. De plus, il faut se montrer lucide car les politiques monétaires sont impuissantes si isolées. Ces dernières devront s’accompagner de réformes structurelles adéquates pour que la France puisse renouer avec la croissance économique. Cette fois, tout est entre les mains de Jean Castex et de son gouvernement, dont on attend le plan de relance pour l’économie, programmé pour la première semaine de septembre [6].
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