La consécration d’un droit européen à l’oubli sur internet
Le 13 mai 2014, la CJUE a rendu un arrêt qui a fait date pour l’encadrement d’internet par le droit et pour la protection des citoyens européens. Répondant à la demande d’un citoyen espagnol, la Cour de Luxembourg a jugé dans l’affaire Google Spain vs Gonzàlez que tout internaute européen pouvait demander le déréférencement de ses données personnelles sur internet. En pratique, sur simple demande par formulaire, toute page, y compris celles dont le contenu est parfaitement licite, peut désormais disparaître des écrans radars des moteurs de recherche. Même si la page source existe toujours, l’absence de référencement la rend introuvable sur internet. La Cour a donc créé de toute pièce un droit nouveau : le droit à l’oubli.
Comme souvent en Europe, cette évolution importante est advenue grâce à une construction jurisprudentielle, sans créer de polémiques sur les bancs des assemblées ou dans les médias. Elle garantit pourtant un niveau supérieur de protection pour plus de 500 millions de citoyens, potentiellement 500 millions d’internautes. Preuve que la décision de la Cour répondait à une demande des citoyens, 135 000 demandes concernant le référencement de 470 000 pages auraient été envoyées à Google à l’heure actuelle. La jurisprudence de la Cour ne s’adresse pour l’instant qu’aux moteurs de recherche, mais plusieurs observateurs, dont le Conseil d’Etat français, se sont interrogés sur la possibilité pour la CJUE d’étendre le droit à l’oubli aux réseaux sociaux. Si tel devait être le cas, le droit européen serait à l’origine d’un renversement total du mode de gouvernance d’internet en faveur de ses utilisateurs.
La proposition d’un règlement européen sur la protection des données
Au-delà du droit à l’oubli, les institutions européennes travaillent en ce moment à une refonte du droit européen relatif à la protection des données, qui repose à l’heure actuelle sur une directive de 1995. Le Parlement européen vient en mars dernier d’adopter une version préliminaire d’un règlement sur ce sujet, qui devrait considérablement renforcer les droits des internautes. Parmi les principales dispositions figurent un contrôle renforcé du transfert de données personnelles vers les pays tiers, l’obligation pour les entreprises d’exprimer dans un langage clair leur politique d’utilisation des données privées, ainsi que des amendes lourdes pouvant aller jusqu’à 5% du chiffre d’affaire annuel pour les entreprises contrevenantes. L’application sur tout le territoire de l’Union permettra également de clarifier le droit dans un secteur qui, par nature, dépasse les frontières nationales.
Pour paraphraser Schuman, voici des réalisations concrètes qui font espérer en l’action bénéfique de l’Europe pour ses citoyens.
1. Le 2 octobre 2014 à 13:57, par tnemessiacne En réponse à : La protection des données personnelles sur internet par le droit européen
Article impressionnant, ça change.
J’aurais une question, auriez-vous des ouvrages clairs et synthétiques sur le droit « pratique » européen à partager ?
Je vous remercie
2. Le 3 octobre 2014 à 16:00, par Hadrien Bajolle En réponse à : La protection des données personnelles sur internet par le droit européen
Bonjour, Merci pour votre commentaire. Je ne peux malheureusement pas vraiment vous aider dans votre choix de manuel. Ha.
3. Le 7 octobre 2014 à 10:35, par Mathilde En réponse à : La protection des données personnelles sur internet par le droit européen
Bonjour, le manuel Droit matériel de l’Union européenne (édition 2012) de Claude Blumann et Louis Dubouis peut t’être utile.
4. Le 8 octobre 2014 à 13:41, par tnemessiacne En réponse à : La protection des données personnelles sur internet par le droit européen
Merci pour le livre.
J’en « profite » pour citer un livre qui sort du lot :
Dictionnaire de l’Union européenne de Christophe Degryse.
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