Pour comprendre le combat du peuple kurde, il est nécessaire de faire un retour en arrière. C’est au moment de la Première Guerre mondiale que s’est jouée la négation de son droit à un Etat indépendant. En 1916, la France et le Royaume-Uni ont signé des accords secrets pour s’assurer le contrôle du Moyen-Orient, les accords Sykes-Picot. Après la défaite de l’Empire ottoman et la victoire des nationalistes turcs, les Alliés ont reconnu la République de Turquie et sacrifié les Kurdes. Le Traité de Sèvres de 1920, qui reconnaissait le droit du peuple kurde à un Etat, est jeté aux oubliettes de l’Histoire et les Kurdes sont répartis entre quatre Etats : Turquie, Syrie, Irak et Iran.
Depuis, les Kurdes n’ont cessé de subir des persécutions. Ce sont ces répressions qui ont poussé notamment à la création du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan) à la fin des années 1970 et à la lutte armée après le coup d’Etat militaire de 1980. S’ensuivent des années de guerre civile notamment dans les années 1990 où 4 000 villages kurdes sont rasés par les autorités turques.
N’oublions pas non plus les 5 000 Kurdes d’Irak exterminés par les gaz chimiques de Saddam Hussein et il en a été de même en Iran et en Syrie.
Après la guerre d’Irak, les Kurdes de ce pays se sont vus reconnaitre une large autonomie.
En 2002, l’AKP (Parti de la justice et du développement) arrive au pouvoir en Turquie avec le soutien de certains Kurdes qui ont cru aux promesses de reconnaissance de leurs droits par l’AKP.
S’ensuivent quelques années d’accalmie mais la situation se détériore de nouveau à partir de la fin des années 2000, malgré une nouvelle tentative de processus de paix en 2013, et atteignent leur sommet depuis les élections du 7 juin 2015 où le HDP (Parti démocratique des peuples, coalition pro-kurde rassemblant aussi d’autres minorités dont les droits sont bafoués en Turquie) obtient 13 % des voix.
Recep Erdogan, faute de majorité absolue à la Grande Assemblée nationale, voit son rêve de présidentialisme s’éloigner. Alors qu’Abdullah Öcalan a été remis à l’isolement en avril 2015, le président turc s’appuie sur l’assassinat de trois soldats en juillet pour déclencher une vague de répression sans précédent contre les Kurdes. Les élections de novembre dernier aggravent encore la situation.
Aujourd’hui, le bilan est lourd : plus de 768 civils assassinés depuis juillet 2015 dont 87 femmes et 98 enfants y compris en bas âge. Comment peut-on faire croire que ces enfants sont des terroristes. Les méthodes utilisées par les autorités turques sont celles de la guerre et même le droit de celle-ci n’est pas respecté notamment pour l’évacuation des morts et des blessés dans les zones de conflit.
Les principaux dirigeants de l’Union européenne observent un silence coupable, obsédés par la question des réfugiés. Oui, 850 000 personnes ont traversé la Méditerranée depuis les côtes de la Turquie jusqu’en Grèce, prenant des risques inouïs. Comment les gardes côtes turcs ont-ils pu ne rien voir et laisser faire les passeurs ?
En réalité, par là-même, les autorités turques ont trouvé un moyen de chantage idéal sur les dirigeants européens et cela marche comme vient de le démontrer l’odieux accord entre l’Union européenne et la Turquie qui bafoue le droit international et le droit européen en matière d’asile.
Nous avons le devoir de briser le mur du silence et de tout faire pour dénoncer ce qui se passe dans le Sud-Est de la Turquie tout comme la répression qui frappe celles et ceux qui osent le dénoncer et notamment les journalistes et les universitaires. Le Parlement européen entend jouer son rôle en ce domaine. Les Kurdes y comptent de nombreux ami(e)s.
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