Le couple franco-allemand est-il encore uni pour les élections européennes ?

, par Marine Denis

Le couple franco-allemand est-il encore uni pour les élections européennes ?

Quel est l’état des forces politiques en France et en Allemagne avant le 25 Mai 2014 ? Deux défis s’imposent au couple franco-allemand à l’aube des élections européennes : combattre l’abstention et la montée des partis populistes eurosceptiques. Pourtant, si les deux pays semblent marcher main dans la main en réaffirmant la nécessité d’approfondir la construction de l’Union Européenne, les électorats allemand et français envisagent de façon bien différente la tenue et l’issue des élections européennes.

Union Européenne : Je t’aime, moi non plus

« Le couple franco-allemand, moteur de la construction de l’Union Européenne », tel est le leitmotiv redondant que l’on retrouve dans de nombreux livres d’histoire à destination des étudiants des deux pays. Pourtant lorsqu’on les interroge sur l’avenir de l’Union Européenne, les français et les allemands arrivent rapidement au désaccord. Selon une étude menée par le professeur de sciences politiques et chercheur Pascal Perrineau, 82% des allemands portent un jugement positif sur l’Union Européenne contre seulement 7% des Français. A la question « est-ce que la situation économique et sociale en Europe peut s’aggraver ? » 18% des Allemands répondent que oui, ils sont 37% pour les Français. L’Allemagne est le 4e pays à se sentir le plus européen au contraire de la France qui se situe à la 20e place sur les 28 pays européens. Les Français sont d’ailleurs au-dessous de la moyenne européenne de 59% lorsqu’on leur pose la question « Vous sentez-vous citoyen de l’Union Européenne ». Ils répondent à 57% par l’affirmative contre 73% pour les Allemands.

Ces comportements différents engendrent de nouvelles configurations électorales pour les élections européennes à venir. En effet, 74% des Français considèrent leur droit de vote aux élections européennes comme un vote de méfiance. Ils sont seulement 26% à exprimer un vote de confiance à l’égard de l’Union Européenne. Si le constat est pessimiste et tend à révéler un euro scepticisme grandissant en France, les Allemands ne sont toutefois pas tous des euro béats ni de grands euro convaincus.

Une Allemagne moins europhile ?

En France, un ouvrier et un employé sur deux s’apprêtent aujourd’hui à voter pour le Front National lors des élections européennes et 27% des jeunes de moins de 35 ans affirment leur sympathie à l’égard du parti d’extrême droite français. Des chiffres alarmants qui confirment une nouvelle fois la montée de l’euro ras-le-bol en France. Mais outre-rhin, la critique allemande à l’égard de l’Union Européenne est tout aussi grandissante. Selon une étude publiée dans l’hebdomadaire « Freitag », 70% des sondés interrogés sont totalement ou partiellement d’accord avec l’idée selon laquelle l’Allemagne accorde trop d’argent à l’Europe. 30% des interrogés partagent totalement ou partiellement l’idée d’une « Allemagne indépendante, sans l’euro et sans aucune ingérence politique de l’Union Européenne ». Des chiffres révélateurs sur lesquels de nouveaux partis politiques allemands euro sceptiques s’appuient pour justifier la sortie de l’Allemagne de l’Union Européenne. C’est le cas d’Alternative für Deutschland qui obtint 4,7% des votes lors des élections législatives allemandes du 22 Septembre 2013. Ratant de peu le seuil légal des 5% nécessaires afin d’entrer au Bundestag, il s’agit d’une petite victoire pour ce parti lancé officiellement en Avril 2013 à Berlin.

De l’Alternative für Deutschland au Front National : unis contre l’Europe ?

Associer Alternative für Deutschland au Front National en France serait un raccourci rapide. En effet, le parti allemand joue sur l’ambiguïté en ce qui concerne les questions européennes. Sur son site Web on peut lire qu’elle n’est pas contre l’Union Européenne et qu’elle « approuve pleinement l’unification pacifique de l’Europe voulue dans [...] le Traité de Rome ». Dans son programme, l’Alternative für Deutschland se prononce en faveur « d’une Europe d’Etats souverains avec un marché commun » bien qu’elle requiert « le démantèlement ordonné et prudent de la zone euro dans un processus transitoire de plusieurs années ». L’AfD prône un démantèlement progressif sur la base d’une « réinsertion de monnaies nationales dans les pays sud-européens, tout en y gardant parallèlement l’euro au départ, pour empêcher une panique bancaire. La part de monnaie nationale en circulation devrait ensuite être augmentée graduellement pour finir par une élimination complète de l’euro ». Bien que l’Alternative für Deutschland est moins critique à l’égard des institutions de l’Union Européenne, son programme économique prônant la sortie de la zone euro n’est pas sans rappeler le programme d’un certain Front National en France...

La visibilité politique et l’influence d’Alternative für Deutschland risquent de s’accroître à l’issue de la récente décision de la Cour de Karlsruhe du 26 Février 2014. Celle-ci a déclaré inconstitutionnelle la loi électorale fixant le seuil minimum de 3% des suffrages exprimés pour obtenir des élus lors des élections européennes. Bien qu’aucune alliance entre le Front National et l’AfD n’ait été envisagée par l’un des deux camps, espérons que ces deux mouvements ne construisent pas de stratégie politique franco-allemande pour mieux desservir les intérêts de l’Union Européenne.

Vos commentaires
  • Le 15 mars 2014 à 11:40, par Bernard Giroud En réponse à : Le couple franco-allemand est-il encore uni pour les élections européennes ?

    Comme d’habitude, ces articles traitant des questions de fond ou sur la pérennité de certaines institutions de l’UE, sont abordées avec une grande liberté, et une véritable volonté de mettre le débat au niveau utile :

    Un ensemble économique aussi peu coordonné que l’actuel peut-il fonctionner longtemps en l’absence de profondes réformes ? Je suis de ceux qui pensent que non. Après réflexion approfondie, mais certainement pas définitive, ce serait prétentieux, en voici quelques unes ;

    Nulle part, il ne se voit jamais que l’on peut indéfiniment dépenser, consommer, plus que ce que l’on produit. Peu importe les règles, ou prétendues telles qui on court dans le monde bisou-nounours dont nos médias vite formées, et vite déformées veulent nous ancrer le cerveau, en matière d’espace social et fiscal, représenté en gros, par les pays nationaux et leurs langues réciproques, il faut ré instituer un contrôle qui permette :

    1/ d’arrêter une hémorragie qui permet au plus fort de vivre sur le dos du plus faible, donc limiter à ce que l’on peut, les importations non indispensables( ex.les luxueuses berlines...) ;

    2/ reconstruire, à partir des ressources , elles sont importantes en France, le tissu de l’équilibre productif. La règle en la matière est simple : « Je permet à tes »vaches« (L’extérieur ) de brouter dans mon pré, il faut que tu comprennes que notre intérêt c’est le faire repousser, sinon abstient toi ».

    3/ Redonner à ceux qui l’ont perdu, en particulier à la jeunesse, la possibilité et le gout d’entreprendre, et celui de l’autonomie. Les grandes entreprises ont toutes été petites. A ce stade il est indispensable qu’on change de système éducatif, et que l’on procède plus, ou au moins autant, par effet d’exemple, que par effet d’apprentissage livresque et de bourrage de crane tel que pratiqué actuellement par notre « éducation » nationale.

    Voilà donc très sommairement et sans trop m’étendre la réponse rapide que m’inspire cet article. Il serait probablement nécessaire de développer chacun de ces trois premiers points, pour une meilleure compréhension, et un apport utile à cette difficile édification européenne, permettant la solidité, donc une pérennité plus assurée de notre monde d’avenir commun..

  • Le 16 mars 2014 à 14:39, par Jean-Luc Lefèvre En réponse à : Le couple franco-allemand est-il encore uni pour les élections européennes ?

    « Le couple franco-allemand, moteur de la construction européenne, leitmotiv redondant... » ? Plus qu’un leitmotiv, une vérité historique ! Comme est une vérité historique leur immense responsabilité dans le déclenchement de trois conflits en Europe en moins d’un siècle, dont, le plus meurtrier, celui de 1914 - 1918 qualifié de « guerre civile européenne » : l’Italie, les Pays-Bas, la Belgique étaient NEUTRES à l’époque !

    Une responsabilité aussi lourde, quand tout avait été détruit, quand la tutelle extérieure des Etats-Unis était devenue incontournable, ne pouvait après 1945 qu’OBLIGER à prendre une part active dans la reconstruction, matérielle d’abord, morale ensuite, d’un continent laminé par les égo de chacun. Cela n’a été possible que parce que des géants, parce que rebelles dans leur propre pays (ADENAUER et DE GAULLE) ont accepté de se parler, de faire mémoire et, surtout, de pardonner.

    Mais ils n’étaient pas seuls ! CHURCHILL lui-même avait aussi balisé le terrain, DE GASPERI, SPAAK et d’autres venus d’ailleurs les ont accompagnés ! Un « couple franco-allemand », donc, mais il serait injuste pour les autres, dont la responsabilité avait été moins engagée devant l’Histoire, d’en faire de simples figurants dans la pièce.

    En 2014, quand la guerre a été oubliée, quand les vieux démons de la préférence nationale refont surface, ici et ailleurs, d’autres partenaires improbables peuvent prendre le relais d’un couple rattrapé par l’usure du temps. Après tout, cela a toujours été ainsi dans l’histoire européenne. Quand un phare s’éteignait, un autre prenait sa place, ce qui n’a jamais été le cas en Chine, en Inde ou en terre d’Islam.

    L’Union européenne, ce n’est pas que la France et l’Allemagne ! N’en faisons pas le monopole de certains sous le fallacieux prétexte du déterminisme historique.

    Comme disait DE ROUGEMONT, ce grand fédéraliste européen, l’avenir est notre affaire, à tous !!! Qu’il s’agisse d’individus ou de collectivités, personne sur terre, jamais, n’est irremplaçable !

  • Le 19 mars 2014 à 14:55, par Rossi Loïc En réponse à : Le couple franco-allemand est-il encore uni pour les élections européennes ?

    Selon une étude menée par le professeur de sciences politiques et chercheur Pascal Perrineau

    Serait-il possible d’avoir la source ? Un sondage sans indication de la méthodologie choisie ne vaut rien !

    Pareil pour le sondage allemand. On est sur Internet, il y a des liens hypertextuels, servez-vous en bon sang ! Donnez les sources !

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