Le prochain budget européen, les propositions aux mille enjeux

, par Pierre Verat

Le prochain budget européen, les propositions aux mille enjeux
Source : Consilium

L’Union européenne s’apprête cette année à finaliser son prochain budget pluriannuel 2021-2027. Il reste donc un an pour le finaliser, alors que la Commission européenne a présenté ses propositions il y a presque deux ans. Deux ans que les institutions se battent pour définir ce budget qui sept ans durant impactera largement la vie des citoyens aux quatre coins du continent. Les chefs d’États et de gouvernement des membres de l’Union ont rendez-vous ce jeudi pour négocier. Le précédent budget avait été approuvé seulement dix jours avant son entrée en vigueur… Nous verrons bien si l’histoire une fois de plus se répètera.

Fin 2019, la Finlande, qui présidait le Conseil des ministres, a proposé un budget de 1,07 % du RNB alloué au budget de l’Union, alors que la Commission européenne avait elle mis en avant 1,08% et le Parlement européen 1,30%.

Les nouvelles priorités de la Commission européenne

La proposition de la Commission européenne continue la baisse proportionnelle des grands programmes que sont la Politique agricole commune (PAC) et la politique de cohésion, qui concentreront 30% du budget européen chacun. Ce alors que la PAC constituait plus de 50% du budget à la fin des années 80, et s’est stabilisée légèrement en dessous dans les années 2000, avant d’amorcer une baisse à 30% du budget à l’heure actuelle. Les fonds de cohésion représentent, eux, 30% depuis les années 2000 mais diminuent depuis ces dernières années.

Cette baisse cela s’accompagne néanmoins d’une hausse des budgets des autres programmes. Ainsi, les fonds alloués à la politique Migrations et frontières sont multipliées par 2,6 pour 2021-2027, par 2,2 pour la Jeunesse, dont le ‘programme +’ voit ses dotations multipliés par quatre, et 1,8 pour la Sécurité.

La Commission, par rapport à son précédent budget pluriannuel, a mis de côté, dans ses priorités, la croissance durable et l’emploi.

Alors qu’en 2014-2020 les priorités étaient croissance intelligente et inclusive, la croissance durable, la sécurité et la citoyenneté, puis l’Europe dans le monde, elles changent largement pour 2021. On retrouve en premier le marché unique, l’innovation et le numérique, suivi des chapitres Cohésion et valeurs, Ressources naturelles et environnement, Migration et gestion des frontières, Sécurité et Défense, ainsi que Voisinage et Monde.

La culture, l’écologie et les citoyens parents pauvres du nouveau budget

Lorsque la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, promeut son « Green New Deal » ou « Pacte Vert » alors que la proposition de budget pluriannuel a été finalisée il y a plus de 2 ans on peut s’étonner que le principal programme écologique qu’est le programme Life dispose de 800 millions d’euros par an contre 400 millions d’euros en 2014. Il y a certes un doublement du budget mais sur un budget total de 165 milliards cela ne représente que 0,6%.

Pour réellement œuvrer à la cohésion européenne, le levier le plus fort est la culture. Et pourtant, le programme « Europe créative » qui finance la distribution des films européens, la traduction littéraire et autres synergies dans les médias européens ne voit son budget annuel passer que de 200 millions d’euros à légèrement moins de 300 millions. A ses côtés, le programme destiné à renforcer la citoyenneté européenne par l’engagement des citoyens, « Europe pour les citoyens », doté en 2014 de 30 millions de budget annuel est fondu dans le nouveau programme Justice, Droits et Valeurs à 134 millions d’euros.

L’activisme du Parlement européen

Le Parlement européen a voté plusieurs résolutions, dont une avant même la publication de la proposition de la Commission, à la majorité, pour exprimer sur ses positions concernant le prochain budget pluriannuel. Sa priorité, c’est un budget qui représente 1,30% du RNB des États membres.

Or, le Parlement européen a été élu directement au suffrage universel donc sa voix à la majorité comme dans tout système politique doit avoir de la force. Ce sont les députés élus directement par les citoyens européens face aux leaders de chacun des États membres. La légitimité du Parlement européen devrait également être renforcée après la hausse importante de la participation aux élections européennes, pour avoir une plus grande voix sur le budget européen.

Dernièrement, en octobre 2019 le Parlement européen, déterminé pour voter un budget à 1,3%, a demandé expressément à être plus étroitement associé aux négociations, et réclame des avancements sur les futures ressources propres. Il liste notamment un panier d’une dizaine de ressources propres tels que les taxes sur les services numériques et une assiette consolidée de l’impôt sur les sociétés qui permettrait aux multinationales et notamment numériques de payer un accès au marché unique européen qui leur procure de considérables profits. Il inclut également la taxe sur les plastiques qui est compris dans les plans de la Commission européenne.

Le retrait du Royaume-Uni, un casse tête budgétaire

Les négociations entre les institutions se basent sur des postes précis de dépenses qui ont été remaniés par la Commission européenne. Le retrait du Royaume-Uni, notamment, a u impact important car il augmente proportionnellement le budget de l’UE. Il était de 1% en 2014-2020 avec le Royaume-Uni et de 1,13% en soustrayant l’apport des Britanniques aux ‘27’. Le Brexit augmente donc proportionnellement les contributions des États membres au budget. Avec une part de 1,08% du PIB pour le budget, la Commission européenne propose une baisse par rapport au précédent budget théorisé sans le Royaume-Uni de 1,13%. C’est pour ça que le Parlement européen réclame fortement une hausse des propositions.

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De nouvelles ressources propres pour l’Union européenne ?

Les ressources du budget proviennent à 66,6% directement des États membres. Ce qui n’était pas le cas avant 1983. Depuis 2003, elles constituent même la majorité du budget européen. Auparavant, les deux ressources du budget étaient fondées sur la TVA et les ressources propres traditionnelles que sont les droits de douanes et les cotisations "sucres". À côté des taxes sur les services numériques et l’impôt sur les multinationales, grâce à la nouvelle priorité écologique de la nouvelle Commission européenne, c’est l’occasion de diminuer les contributions directes des États membres en instaurant la taxe carbone aux frontières de l’UE comme ressource propre au budget européen.

Pour aller plus loin : Le Monde Mouvement européen Communication (2018) 321 de la Commission européenne Résolution du Parlement européen : « Cadre financier pluriannuel 2021-2027 et ressources propres : il est temps de répondre aux attentes des citoyens ». Octobre 2019

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