Lettre ouverte des Jeunes Européens au Front de Gauche : L’Europe se construit au service des peuples !

, par Le Bureau national des Jeunes Européens - France

Lettre ouverte des Jeunes Européens au Front de Gauche : L'Europe se construit au service des peuples !
Manifestation contre le TSCG le 30/09/2012 – CC BY-NC-ND 2.0 Philippe Leroyer

Depuis 2005, l’extrême gauche française a fait de l’Europe un bouc émissaire qu’elle s’empresse d’accuser de tous les maux. Responsable de la crise, elle serait le bras armé des banquiers, le chancre du libéralisme et l’ennemi des services publics. Si votre constat, sur certains points n’est pas dénué de bon sens, votre aversion générale pour la construction européenne actuelle est difficilement compréhensible, les changements que vous proposez sont loin d’être clairs et leurs conséquences potentiellement catastrophiques.

Si nous suivons votre argumentation, développée notamment à l’occasion de votre programme pour les élections présidentielles de 2012, il faudrait commencer le nettoyage et la dé-libéralisation en se débarrassant du Traité de Lisbonne. Il aurait en effet apporté une vague d’ultralibéralisme nocive à notre économie et qui expliquerait la crise économique que nous traversons. Nous sommes en désaccord avec vous sur plusieurs points.

Tout d’abord, l’Union européenne est une institution démocratique. Le Parlement européen est élu au suffrage universel direct tous les 5 ans. En tant que co-législateur, il contrôle le travail de la Commission et il exprime directement au sein de l’Union la voix des citoyens. Il s’avère qu’aujourd’hui, ce Parlement est composé à majorité d’élus de droite de doctrine libérale ou conservatrice. Mais cela ne veut absolument pas dire que l’Union en elle-même est de droite ou libérale. Ce serait là, et c’est ce que vous faîtes systématiquement, confondre la structure avec les politiques qui sont mises en place. Si un jour vos idées se retrouvent majoritaires au sein du Parlement européen, soyez certains qu’elles seront mise en place.

Il n’est pas nécessaire de s’en prendre à une organisation pour le seul motif que l’on ne parvient pas, à travers des élections démocratiques, à y être représenté.

De plus, malgré vos insinuations, l’Europe travaille de plus en plus dans des secteurs sociaux et ces travaux sont des réussites. Le programme Erasmus par exemple a connu un succès non démenti et continue encore aujourd’hui à créer une Europe des étudiants et des chercheurs. Mais on peut aussi citer le FSE, le fonds social européen qui, s’il n’est pas parfait, reste néanmoins une avancée importante sur la voie d’une Europe sociale. Au lieu de critiquer en permanence l’Union européenne, poussez donc en son sein vers la voie plus sociale que vous prêchez sous tous les toits.

Vous accusez l’Europe de ne pas être assez protectrice de ses concitoyens, pas assez sociale. En revanche, ce que vous ne dîtes pas, c’est qu’aujourd’hui l’Union européenne n’en a pas les moyens car les prérogatives de mise en place d’une politique sociale restent le domaine réservé des Etats nationaux. Pour avoir la possibilité de mettre en place l’Europe sociale que vous appelez de vos vœux, il faut créer le plus rapidement possible un Etat Européen fédéral et démocratique.

De même, l’Union européenne, si elle n’a pas empêché la crise actuelle, l’a en grande partie amoindrie. La crise économique que nous vivons provient en effet d’une crise financière qui, née outre- Atlantique, s’est diffusée largement en Europe. Grâce à notre monnaie, deuxième devise mondiale, et à l’existence du marché commun, nous avons pu, tant bien que mal, éviter un effondrement total de notre économie. L’intégration importante des économies européennes grâce au marché commun leur procure un grand dynamisme et c’est ce dynamisme qui nous a permis de ne pas entrer trop longtemps en récession.

Cependant, il est vrai que l’Union n’a pas permis d’éviter la crise et qu’elle peine actuellement à en sortir. Etrangement, si vous voulez remettre en cause le traité, vous estimez que ces difficultés ne sont dues qu’aux politiques mises en place par l’UE. Mais n’est-ce pas plutôt à cause de sa structure ? N’est-ce pas parce que l’Union ne dispose pas d’une volonté politique propre et déterminée qu’elle n’arrive pas à se relever ?

Vous plaidez pour le lancement d’une VIème république et pourtant, vous manquez cruellement d’ambition dans votre projet européen. A vous lire, une fois le Traité de Lisbonne dénoncé, un nouveau Traité renégocié en remplacement ferait de l’Union européenne une organisation internationale comme une autre. Une sorte de nouveau Conseil de l’Europe qui s’engagerait en particulier « pour le respect du peuple palestinien ». Mais l’Union européenne, n’est-ce pas bien plus que cela ? C’est une formidable création qui a permis en 50 ans de réunir des peuples qui ne connaissaient que la guerre. C’est un outil commun qui a assuré la prospérité des européens. La mise en commun de secteurs clefs comme l’agriculture aide les citoyens. Aujourd’hui, dans le cadre d’une économie mondialisée où la concurrence est très rude, il est nécessaire de donner à l’Union européenne la possibilité de protéger ses citoyens, car la France n’arrive aujourd’hui plus à le faire seule.

Vouloir négocier un nouveau Traité qui n’irait pas dans le sens de plus d’intégration, c’est aller contre le besoin des citoyens et en réalité dans le sens du nationalisme. Les européens ont aujourd’hui besoin d’avoir un cap clair pour l’avenir. Et il n’est pas possible d’offrir un cap pour l’avenir sans que ce cap soit européen. La France est faible, diplomatiquement, économiquement, vous le dites vous-même. Cette faiblesse doit être compensée par un changement d’échelle.

Alors pourquoi vouloir en faire une organisation internationale lambda dans laquelle il faudrait renforcer les prérogatives des parlements nationaux ? N’est-ce pas en réalité un nationalisme classique qui se cache dans votre programme sous le couvert d’une solidarité internationale rassembleuse ? Quand on entend les propos de votre Président à l’égard de l’Allemagne, on serait tenté de le croire. Vous voulez construire une Europe ambitieuse, au service de l’humain : construisez d’abord une Europe forte. Une Europe qui nous permette de nous battre pour conserver nos valeurs, nos modèles sociaux et qui nous permette de résister à l’influence toujours plus présente des autres poids lourds mondiaux. Cette Europe forte politiquement, c’est une Europe fédérale qui réunirait, dans la démocratie, les peuples européens.

A titre d’exemple, sur le dossier palestinien qui vous tient tant à cœur, la France n’a jamais et n’aura jamais le poids suffisant pour avoir un impact sur le conflit Israélo-Palestinien. Mais une Europe unie, parlant d’une seule voix pour défendre nos valeurs des Droits de l’homme et de démocratie, voilà qui aurait de l’impact face aux autres parties du quartet pour le Moyen-Orient.

Ne vous trompez pas de combat : en vous battant pour une autre Europe, ne vous battez pas contre l’Europe. L’Europe fédérale que nous appelons de nos vœux pourra bien entendu être de gauche, si les citoyens européens en décident ainsi démocratiquement. Soyez une véritable force de proposition et non une force constante d’opposition qui ne prend pas la peine de voter au sein du Parlement européen. Devenez une force de proposition et choisissez l’avenir qui mettra l’humain d’abord dans une Union européenne politiquement unie et renforcée !

Vos commentaires
  • Le 3 octobre 2013 à 15:51, par Loïc Rossi En réponse à : Lettre ouverte des Jeunes Européens au Front de Gauche : L’Europe se construit au service des peuples !

    Je suis militant au Parti Communiste Français, et ai participé à la campagne du Front de Gauche en 2012. Je ne prétends pas parler au nom de mes camarades, mais je me permettrai quelques commentaires :

    « Tout d’abord, l’Union européenne est une institution démocratique. Le Parlement européen est élu au suffrage universel direct tous les 5 ans. En tant que co-législateur, il contrôle le travail de la Commission et il exprime directement au sein de l’Union la voix des citoyens. »

    C’est vrai que le Parlement est élu démocratiquement, et j’en suis content ! Le problème tient dans le « co-législateur ». Le Conseil légifère aussi, mais il n’est lui pas directement élu, et constitue plus la défense de 28 intérêts nationaux que d’un intérêt européen. Le Conseil constitue une partie épineuse du problème…

    Il s’avère qu’aujourd’hui, ce Parlement est composé à majorité d’élus de droite de doctrine libérale ou conservatrice. Mais cela ne veut absolument pas dire que l’Union en elle-même est de droite ou libérale. Ce serait là, et c’est ce que vous faîtes systématiquement, confondre la structure avec les politiques qui sont mises en place.

    Oui et non. Je suis d’accord quand vous dites qu’il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain en attaquant l’idée européenne plutôt que la façon dont elle est mise en œuvre. Oui à l’Europe, mais pas celle-ci ! Je ne suis pas d’accord quand vous dites que l’Europe n’est pas libérale par essence. Un peu quand même ! Le traité de Maastricht et le TSCG participent à forcer des politiques d’austérité en prônant l’équilibre budgétaire à tout prix, y compris en sacrifiant les investissements et la relance. Le statut de la BCE qui ne peut prêter aux états, les oblige à emprunter sur les marchés et donc à se soumettre à la finance. L’absence d’initiative législative du Parlement est un frein aux avancées démocratiques pour l’Europe. Ces traités et institutions sont les mêmes quelles que soient les majorités en place, ce qui nous fait dire que les bases institutionnelles de l’UE actuelle sont plutôt orientées vers le libéralisme que vers le socialisme…

    Au lieu de critiquer en permanence l’Union européenne, poussez donc en son sein vers la voie plus sociale que vous prêchez sous tous les toits.

    Je vous renvoie l’attaque. Lisez notre programme : on y propose une harmonisation des normes sociales par le haut, un salaire minimum dans tous les pays membres. Et je n’ai pas vu où nous critiquions les programmes Erasmus et le FSU. Nous sommes au contraire d’accord pour dire que ces deux projets sont trop peu financés et développés.

    Vous accusez l’Europe de ne pas être assez protectrice de ses concitoyens, pas assez sociale. En revanche, ce que vous ne dîtes pas, c’est qu’aujourd’hui l’Union européenne n’en a pas les moyens car les prérogatives de mise en place d’une politique sociale restent le domaine réservé des Etats nationaux. Pour avoir la possibilité de mettre en place l’Europe sociale que vous appelez de vos vœux, il faut créer le plus rapidement possible un Etat Européen fédéral et démocratique.

    Les intérêts nationaux et l’absence de réel budget européen tuent effectivement les avancées dans ce domaine. Sur le fédéralisme : je suis communiste et fédéraliste, car l’un n’empêche pas l’autre, au contraire. Mais tous mes camarades, surtout dans l’ancienne génération, ne sont pas aussi emballés. Le fédéralisme oui, mais il faut effectivement faire attention au respect des principes démocratiques. Je ne serais pas emballé par un état fédéral qui empêcherait un pays qui veut aller plus loin dans les normes sociales, de le faire.

    De même, l’Union européenne, si elle n’a pas empêché la crise actuelle, l’a en grande partie amoindrie. La crise économique que nous vivons provient en effet d’une crise financière qui, née outre- Atlantique, s’est diffusée largement en Europe. Grâce à notre monnaie, deuxième devise mondiale, et à l’existence du marché commun, nous avons pu, tant bien que mal, éviter un effondrement total de notre économie. L’intégration importante des économies européennes grâce au marché commun leur procure un grand dynamisme et c’est ce dynamisme qui nous a permis de ne pas entrer trop longtemps en récession.

    Pour la crise financière peut-être, mais pour la crise de la dette, c’est plutôt l’inverse. La BCE aurait du soutenir la relance économique en prêtant aux états à bas taux, en rachetant des dettes, et en créant des euro-bonds. Aurait du, mais ne le peut pas, à cause de ses status. D’autre part, le marché commun actuel incite plus au dumping social et fiscal qu’à une collaboration progressiste…

    vous estimez que ces difficultés ne sont dues qu’aux politiques mises en place par l’UE. Mais n’est-ce pas plutôt à cause de sa structure ? N’est-ce pas parce que l’Union ne dispose pas d’une volonté politique propre et déterminée qu’elle n’arrive pas à se relever ?

    Partiellement d’accord. La construction trop peu démocratique, les traités à coloration libérale, et le manque de vision européenne nous empêchent d’aller vers le progrès social et démocratique. Mais quand la Commission et la BCE imposent une odieuse cure d’austérité à la Grèce, ce n’est pas uniquement une question de manque de volonté ou un problème d’institutions, c’est surtout un choix résolument libéral.

    Vous plaidez pour le lancement d’une VIème république et pourtant, vous manquez cruellement d’ambition dans votre projet européen.

    Là dessus, malheureusement, je suis d’accord. Le Front de Gauche manque de précision sur les propositions pour l’UE. Cependant, le PCF va tenir en novembre une convention sur l’Europe, et le Parti de la Gauche Européenne tient son congrès en décembre. J’ai bon espoir que cela nous donne les moyens d’avoir un programme très concret (et je l’espère fédéraliste) pour les élections européennes.

    Aujourd’hui, dans le cadre d’une économie mondialisée où la concurrence est très rude, il est nécessaire de donner à l’Union européenne la possibilité de protéger ses citoyens, car la France n’arrive aujourd’hui plus à le faire seule.

    Oui. Et c’est pourquoi nous voulons changer l’euro plutôt que le quitter. L’euro pourrait être un formidable outil de développement social s’il était utilisé à meilleur escient… De même l’UE pourrait aider à harmoniser les règles sociales en Europe, et donner une position forte face à l’ingérence des États-Unis et la montée de nouvelles forces économiques mondiales. Un siège commun à l’ONU ne serait pas idiot en ce sens.

    Vouloir négocier un nouveau Traité qui n’irait pas dans le sens de plus d’intégration, c’est aller contre le besoin des citoyens et en réalité dans le sens du nationalisme.

    Intégration oui, mais pas au détriment des citoyens et des travailleurs européens. Ce n’est pas être nationaliste que de dénoncer cette tendance à la libéralisation forcée. Et plutôt que des critères de convergence économiques, pourquoi pas des critères de convergence sociale (minima sur l’éducation, la santé, l’égalité des sexes, la lutte contre les discriminations, le taux d’emploi,etc.) ? L’union politique avant l’union bancaire !

    Cette Europe forte politiquement, c’est une Europe fédérale qui réunirait, dans la démocratie, les peuples européens.

    Le communisme c’est l’internationalisme, donc c’est le fédéralisme. Pour moi l’Europe est donc l’évidence, mais tout le monde ne le voit pas ainsi, même chez nous. Mais là encore, ça évolue dans le bon sens !

    Ne vous trompez pas de combat : en vous battant pour une autre Europe, ne vous battez pas contre l’Europe. Soyez une véritable force de proposition et non une force constante d’opposition qui ne prend pas la peine de voter au sein du Parlement européen. Devenez une force de proposition et choisissez l’avenir qui mettra l’humain d’abord dans une Union européenne politiquement unie et renforcée !

    L’attaque est basse d’autant qu’elle est infondée. Nous avons des idées sur l’Europe, et nous ne critiquons pas aveuglément. J’ai cité des propositions du FDG et des mouvements progressistes européens, ce n’est pas que de la gesticulation. Lisez le manifeste de l’Alter Sommet d’Athènes, il y a des idées pour l’alternative, issues de nombreuses organisations de gauche européennes.

    Votre lettre a un mérite : pointer nos faiblesses sur les propositions, mais elle se trompe lourdement sur un fait. Nous ne sommes pas contre l’Europe en tant qu’idée. Ce que nous dénonçons c’est l’implémentation libérale qui est en cours actuellement. Le poncif souvent relayé par les médias comme quoi nous serions anti-europe, anti-euro, et nationalistes est archi-faux, et il est vraiment blessant pour le communiste que je suis d’être assimilé au FN sur les questions européennes alors que nous sommes diamétralement opposés sur les solutions à apporter à ces questions.

    J’aime l’Europe, j’aime l’idée du fédéralisme, mais le problème est qu’on en est loin. Alors nous continuons la critique, aussi constructive que possible.

    Désolé d’avoir été long.

  • Le 3 octobre 2013 à 17:37, par tnemessiacne En réponse à : Lettre ouverte des Jeunes Européens au Front de Gauche : L’Europe se construit au service des peuples !

    C’est intéressant, est ce que tous les pouvoirs législatifs sont élus directement ? Avec l’Union c’est intéressant aussi le pouvoir législatif est élu directement et en même temps bientôt fifty fifty il est accompagné d’un pouvoir législatif élu démocratiquement à un degré, c’est à dire nommé par quelqu’un élu directement et démocratiquement.

    ça peut constituer un garde fou

  • Le 3 octobre 2013 à 17:43, par tnemessiacne En réponse à : Lettre ouverte des Jeunes Européens au Front de Gauche : L’Europe se construit au service des peuples !

    @Loïc Rossi

    « Le traité de Maastricht et le TSCG participent à forcer des politiques d’austérité en prônant l’équilibre budgétaire à tout prix, y compris en sacrifiant les investissements et la relance. »

    Vu que la dette constitue le premier poste budgétaire on peut se dire que quand celle ci aura diminué on aura le premier poste budgétaire pour réaliser la relance.

  • Le 3 octobre 2013 à 17:56, par tnemessiacne En réponse à : Lettre ouverte des Jeunes Européens au Front de Gauche : L’Europe se construit au service des peuples !

    @« Bureau national », l’ensemble ?

    « Vous accusez l’Europe de ne pas être assez protectrice de ses concitoyens, pas assez sociale. En revanche, ce que vous ne dîtes pas, c’est qu’aujourd’hui l’Union européenne n’en a pas les moyens »

    On a l’impression avec votre tournure de phrase que l’Europe n’est pas sociale mais elle l’est, tout son budget l’est : PAC, Fonds structurels, tous ses programmes et sa législation protège les citoyens elle les protège par diverses mesures comme les règles sanitaires pour les aliments, la santé au travail, les règles environnementales etc...

  • Le 6 octobre 2013 à 19:23, par tnemessiacne En réponse à : Lettre ouverte des Jeunes Européens au Front de Gauche : L’Europe se construit au service des peuples !

    @Ferghane AZIHARI

    En quoi : « les bases institutionnelles de l’UE sont trop politisées et d’orientation libérale »

    « les traités européens qui ne doivent pas enchaîner l’édifice à une seule doctrine »

    En quoi ?

  • Le 7 octobre 2013 à 13:17, par Ferghane AZIHARI En réponse à : Lettre ouverte des Jeunes Européens au Front de Gauche : L’Europe se construit au service des peuples !

    @tnemessiacne

    Pour ma part le statut de la BCE est un exemple suffisant. Le fait que pour sauver l’euro, Mario Draghi ait du VIOLER LES TRAITÉS, cela ne vous choque pas ?

    Après j’ai sans doute un peu exagéré l’intensité de mes propos, mea culpa, je ne veux pas dire que l’UE est une fanatique du néolibéralisme...en ce que beaucoup de dispositions dans les traités tempèrent les libertés économiques et laissent place à l’intervention étatique. En effet par exemple lorsque les traités viennent proclamer la libre circulation des capitaux, quelques temps plus tard, un article tempère cette liberté et autorise la restriction sous certaines conditions, pareil pour la concurrence et les aides d’Etat.

    Mais tout de même, ce genre de dispositions économiques n’a rien à faire dans des actes constitutifs et doivent relever du règlement et/ou de la directive pour que l’on puisse aisément revenir dessus si besoin.

    Demain, si jamais des socialistes devaient être majoritaires au Parlement et au Conseil (je ne parle pas des sociaux-démocrates mais des socialistes), il serait très difficile pour eux d’appliquer leur programme sans violer les traités. Cela n’est pas normal.

    N’ayons pas peur des mots. Je suis moi même social-libéral, donc je ne vois pas le libéralisme économique du même œil qu’un communiste. Mais force est de constater que les communautés européennes sont nées aux lendemains de la WWII et donc au début de la guerre froide, et qu’elles se sont d’emblée proclamées (du moins dans leurs déclarations) comme de ferventes partisanes du libéralisme économique en réaction à l’expansion du communisme à l’est. Devons nous en avoir honte ? Doit-on revenir sur les quatre libertés emblématiques du projet européen ? Pour moi non.

    Toujours est-il que les droits et libertés ne sont jamais absolus (sauf un nombre limité de droits et libertés comme le droit à la vie, la prohibition de la torture etc...), et c’est pourquoi je trouve que les traités constitutifs européens contiennent beaucoup trop de dispositions qui ne méritent pas d’avoir une valeur matériellement constitutionnelle comme les règles relatives à la concurrence, aux activités de la banque centrale européenne...et c’est cela que je dénonce lorsque je dis que l’UE est par essence beaucoup trop politisée. En plus de cela (mais ce n’est pas le même débat), ces dispositions rendent le traité monstrueusement long et inacessible au yeux du citoyen. Rappelons que la complexité du traité fut une des causes du rejet du TCE en 2005).

    J’espère avoir été suffisamment précis.

  • Le 7 octobre 2013 à 18:04, par tnemessiacne En réponse à : Lettre ouverte des Jeunes Européens au Front de Gauche : L’Europe se construit au service des peuples !

    @ Ferghane AZIHARI

    « les traités viennent proclamer la libre circulation des capitaux, quelques temps plus tard, un article tempère cette liberté et autorise la restriction sous certaines conditions, pareil pour la concurrence et les aides d’Etat. »

    La liberté de circulation des capitaux et les trois autres sont seulement les libertés d’un marché unique. Imaginez en France si ces libertés n’existaient pas.

    Et le respect de la concurrence et le contrôle des aides d’Etat, pareil, en France, dans tous les pays, on contrôle les aides qu’accordent les régions sur leur territoire.

  • Le 8 octobre 2013 à 00:24, par Ferghane AZIHARI En réponse à : Lettre ouverte des Jeunes Européens au Front de Gauche : L’Europe se construit au service des peuples !

    @tnemessiacne

    Certes mais je ne pense pas que les dispositions relatives à la concurrence avaient une valeur constitutionnelle en France. Je ne remets pas en cause la pertinence de ces principes, seulement le fait qu’ils aient une valeur matériellement constitutionnelle. Combien de fois avons nous du violer les traités en cinq ans pour résoudre la crise ? Beaucoup de fois. La BCE l’a fait en rachetant les dettes. L’Allemagne l’a fait en intervenant sur le secteur de l’automobile. L’Irlande l’a fait en sauvant ses banques. Cela montre que les dispositions dans les traités sont impertinentes.

  • Le 13 octobre 2013 à 18:22, par Alexandre Marin En réponse à : Lettre ouverte des Jeunes Européens au Front de Gauche : L’Europe se construit au service des peuples !

    Pour comprendre certaines dispositions des traités, en effet assez orientées économiquement, il faut garder à l’esprit que Jacques Delors, lorsqu’il était à la tête de la commission européenne a voulu relancer la construction européenne. Les politiques de l’époque ne s’y intéressaient pas, et les peuples non plus. Il s’est tourné vers les industriels, qui, eux avaient un intérêt évident à profiter d’une communauté européenne plus intégrée.

    Du reste, la libre circulation des marchandises et des capitaux est normale dans une Europe que certains veulent fédérale (je m’inclus dans ces certains). Après tout, que dirait-on en France, si on mettait fin à cette libre circulation ? Le problème arrive quand certains pays ont des niveaux d’imposition, et des normes sociales très diverses. Faut-il entreprendre une politique harmonisations fiscale et sociale ou laisser ces compétences aux Etats ? Le droit devra trouver un juste milieu.

    En ce qui concerne les normes à rang constitutionnel, peut-on réellement dire qu’il y a un droit constitutionnel en Union européenne ? Il n’ y a ni constitution, ni souveraineté (le conseil européen en est la démonstration), ni démocratie (les élections européennes rendent compte d’une démocratie nationale, étant donné qu’elles sont, hélas, organisées par les Etats membres). La seule norme qu’on pourrait qualifier de « constitutionnelle » est la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et ce, même s’il y a une hiérarchie des normes européennes. Il est vrai qu’un changement de majorité au parlement ne permettrait pas de changer la politique européenne avec règlements et directives, car entre le délai qu’ont les Etats membres pour transposer des directives, et les mandats électoraux, la majorité aura pu changer de nouveau. Ensuite, les traités bloqueraient un changement de politique économique. Aux Européens d’avoir une constitution non orientée politiquement, et d’avoir un droit constitutionnel européen. A court terme, la solution serait une réinterprétation des traités par la jurisprudence de la CJUE.

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