Manuela Carmena, nouvelle reine de Madrid

, par Robin Alves

Manuela Carmena, nouvelle reine de Madrid
Manuela Carmena est investie à la mairie de Madrid. - Ahora Madrid

Presque inconnue et maintenant au-devant de la scène, simple citoyenne engagée, Manuela Carmena prend la mairie de Madrid. Ancienne magistrate et à la tête d’une coalition de gauche radicale, elle a mené une campagne électorale atypique, mais au succès fulgurant. A travers elle, c’est le mouvement Podemos, « Nous pouvons », créé au moment des élections européennes en 2014 et héritier du mouvement des indignés né en 2011, qui s’enracine dans le paysage espagnol. Contre une classe politique traditionnelle à bout de souffle, ces nouvelles forces citoyennes se sont imposés aux élections régionales et locales.

Manuela Carmena, une figure rassurante

A 71 ans, Manuela Carmena ne croit plus dans la politique traditionnelle, elle croit au contact avec le citoyen et la réalité quotidienne. Militante contre la dictature franquiste et la corruption tout au long de sa carrière, elle a travaillé comme avocate et juge pendant quarante-cinq ans. Parcourant la capitale espagnole à vélo et discutant avec ses habitants, elle a finalement décidée de se lancer en politique. Ses amis se rappellent : « Allez, file un coup de main, il faut quelqu’un avec de l’expérience, qui amène beaucoup de propositions. » Figure rassurante, elle est élégante, souriante et possède une douce autorité. Elle est à l’opposée de Pablo Iglesias, le meneur d’homme du mouvement Podemos, dont le look laisse à désirer, Manuela Carmena inspire confiance. « Il est clair que c’est la force qui souhaite le changement qui l’a emporté. Et cette force, ce n’est pas un parti politique, c’est vous », a-t-elle clamé devant les militants et les sympathisants de sa liste Ahora Madrid.

Souhaitant valser les partis traditionnels, la liste de Manuela Carmena est arrivée deuxième avec 31,85% des voix, derrière le PP (Parti Populaire) emmené par la candidate conservatrice Esperanza Aguirre. Un score d’autant plus impressionnant que la mairie bascule entre ses mains grâce à un accord est trouvé avec le PSOE (Parti Socialiste Ouvrier Espagnol). Le parti socialiste espagnol, au début hostile au mouvement citoyen, a du toutefois composer. De même que le Parti Populaire dont la stratégie est de qualifier Manuela Carmena de « marxiste » et de « léniniste » semble être dans une impasse.

Manuela Carmena dans la lutte contre le chômage et la corruption

Inquiet, Mariano Rajoy remarque bien que sa politique cause de nombreux dommages. Les nombreux scandales de corruptions, la cure d’austérité et les paradoxes de certaines décisions politiques telles que la loi sur l’avortement ont semé de trop nombreuses contestations, permettant l’émergence et la pérennisation de ces nouvelles forces citoyennes. A quelques semaines des élections législatives, Manuela Carmena et le mouvement Podemos sont ainsi dans une bonne dynamique. Et malgré son âge, l’ancienne magistrate incarne à merveille la contestation née à la Puerta del Sol en 2011 dont l’objectif de faire tomber une « classe politique corrompue et inféodée au pouvoir financier. »

A Madrid, Manuela Carmena est force de propositions. Elle souhaite stopper les expulsions, garantir à tous les foyers les services élémentaires, établir un plan d’urgence pour l’emploi des jeunes et des chômeurs de longue durée.

Elle avait déjà gagné par l’attitude. Les dépenses de campagne financées essentiellement par micro crédits sont modestes et elle tient la promesse de diviser son salaire par deux à la suite de son investiture. Ainsi, la priorité d’Ahora Madrid est de rendre la société de la capitale de plus en plus égalitaire : « C’est scandaleux qu’à Madrid, il y a deux mondes distincts. » Son opposante Esperanza Aguirre et admiratrice de Margaret Thatcher réagit en évoquant que « si Podemos est le parti le plus prisé dans ces élections en Espagne, ça sera la dernière fois que nous votons librement. Après ça, nous voterons dans un pays comme Cuba. » Mais, ces propos n’atteignent pas l’ancienne magistrate.

Le 1er juin, elle a même reçu José Mujica, l’ex-président uruguayen qui avait renoncé à occuper le palais présidentiel, reconverti en refuge pour les sans-abris. Tout un symbole pour celle a mené une campagne pour « l’espoir ». Manuela Carmena ajoute que « maintenant, c’est le temps d’utiliser le langage de l’action. Nous allons faire en sorte de vivre mieux dans une société qui soit plus juste et plus équitable. »

Thomas Piketty, qui s’intéresse à ces nouveaux mouvements politiques, conclue en évoquant qu’ « il faut bien voir qu’il s’agit d’un mouvement qui est très pro-européen, très internationaliste et je pense qu’il vaut mieux s’appuyer sur des mouvements de ce type pour essayer de transformer l’Europe et les politiques d’austérité en Europe, plutôt que de les rejeter. »

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