L’automne, le temps qui se rafraichit et sa course aux cadeaux de Noël marqué par un rendez-vous importé des États-Unis, le « black Friday » (ou vendredi noir), un jour de promotions monstres qui suit la journée de Thanksgiving et qui avait lieu le 23 novembre dernier. Outre-Atlantique, ce jour est l’occasion de véritables scènes d’hystéries collectives. Chez nous, les choses se passent plus calmement.
Pour l’essentiel, il s’agit d’une journée de promotions mettant en lumière les produits électroniques et informatiques. Une catégorie de produits au centre des attentions pour des pratiques contestées, leurs fabricants choisissant de raccourcir délibérément la durée de vie de leurs produits et/ou de les rendre irréparables pour inciter leurs clients à en acheter de nouveaux.
Ce phénomène, aussi appelé « obsolescence programmée », a fait l’objet d’un colloque organisé courant septembre par l’association « Hop ! » (Halte à l’obsolescence programmée) traduisant l’importance croissante de ce sujet pour les consommateurs.
L’événement fut aussi l’occasion pour l’association de médiatiser sa première action judiciaire sur le sujet. Celle-ci s’appuie sur un rapport [1] relatif à l’obsolescence programmée des imprimantes. L’association a centré son recours sur le fabricant d’imprimantes Epson, cas selon elle, cas le plus flagrant d’obsolescence programmée.
Repenser le modèle
Si le cas des imprimantes a servi de fil rouge à la journée avec les diverses techniques utilisées (logicielles comme matérielles) pour rendre irréparables les imprimantes et amener les consommateurs à acheter un nouveau modèle supposé « plus performant », le colloque a ouvert un débat plus large autour de la remise en cause du modèle économique actuel.
Il s’est d’abord centré sur l’action publique avec parmi les intervenants des élus comme Pascal Durand (député européen EELV), auteur d’un rapport parlementaire [2] sur le sujet, puis ont été étudiés les démarches développées par des entreprises pour développer un mode de production plus durable.
En définissant un cadre légal et en intégrant les impératifs des entreprises, l’objectif est d’agir avec l’ensemble des parties prenantes afin que l’obsolescence programmée, qui historiquement a été une façon pour l’industrie de masse de s’assurer des débouchés, intègre les principes de finitude des ressources, d’économie circulaire, et plus largement de RSE (responsabilité sociale des entreprises). Cela implique un changement de modèle loin d’être simple et coûteux à court terme pour les entreprises qui décident d’opter pour une démarche volontariste car génératrice de stocks de pièces détachées immobilisant ainsi du capital.
Il ne suffit donc pas d’augmenter la durée de garantie ou de rendre illégale l’obsolescence programmée pour changer les choses.
Un cadre européen à construire
La France, particulièrement en retrait ces dernières années, rendrait son action plus visible aux yeux des Européens en amenant le sujet sur la table.
L’obsolescence programmée est l’un des rares sujets sur lequel la France est pionnière puisqu’elle a élaboré un cadre légal et donné une définition à l’obsolescence programmée, créant un délit d’obsolescence programmée. L’action judiciaire de l’association Hop ! s’inscrit dans ce cadre légal tandis que pour les autres pays européens, le sujet est si ce n’est inexistant, à tout le moins secondaire.
Il semble n’y avoir que le groupe écologiste au Parlement européen pour s’y intéresser dans le cadre d’une démarche globale relative au gaspillage des matières premières et des questions qui y sont associées (conditions de travail dans les pays en voie de développement, impact sanitaire et environnemental). L’obsolescence programmée est pourtant un sujet sur lequel l’Union est fondée à agir car il concerne directement le marché intérieur. En développant des normes plus strictes en termes de qualité, de durabilité, l’Union se donnerait ainsi les armes de combattre la désindustrialisation qui a suivi son ouverture sans contraintes ou presque au reste du monde alors que la réciproque n’était pas vraie.
Rendre les objets plus durables ou à tout le moins réparables facilement et rapidement nécessite en effet des chaines d’approvisionnement courtes pour permettre de répondre rapidement aux demandes de pièces détachées.
Le chantier est donc conséquent mais s’inscrit directement dans les compétences de la Commission dont le Président a souhaité qu’elle s’occupe un peu plus du quotidien des Européens.
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