Parlement européen : l’essentiel de la session plénière de juin 2018

, par Emma Giraud

Parlement européen : l'essentiel de la session plénière de juin 2018
Le Premier ministre des Pays-Bas, Mark Rutte, s’exprime devant les parlementaires européens le 13 juin 2018 à Strasbourg © European Union 2018 - Source : EP

Les députés européens se sont réunis en session plénière du 11 au 14 juin 2018. L’occasion de débattre sur la crise migratoire, le profil du Parlement européen post-Brexit, la cyberdéfense européenne, les tensions à l’Est de l’Union, les relations avec les partenaires de la zone Afrique-Caraïbes-Pacifique (ACP) et enfin sur l’avenir de l’Europe.

Crise migratoire : un accord politique à la fin du mois ?

Alors que les migrations sont à l’ordre du jour du sommet européen – réunion des chefs d’Etat ou de gouvernement – des 28 et 29 juin prochain, les députés européens ont interpellé ces derniers sur la nécessité de trouver une solution politique à la crise migratoire. Ils ont insisté en particulier sur l’accord attendu pour une réforme du système de Dublin, systématiquement repoussé par les sensibilités nationales, alors qu’une proposition de la Commission européenne est sur la table depuis le printemps 2016. [1] Après avoir déploré la réaction de Rome face à l’arrivée du bateau Aquarius au large des côtes italiennes, ils ont appelé à un accord axé sur la solidarité. Toutefois, la politique des quotas et de la répartition des réfugiés obligatoire entre Etats ne fait pas l’unanimité au sein de l’hémicycle, dont une partie les considère impossible à mettre en œuvre.

Le Parlement européen post-Brexit

Dans l’hypothèse d’une sortie effective du Royaume-Uni de l’UE, les eurodéputés ont validé la composition du futur hémicycle européen, excluant les députés britanniques. Conformément au débat lors de la session plénière de février 2018, le Parlement devrait se réduire à 705 députés, contre 751 aujourd’hui. Sur les 73 sièges libérés, 27 seront répartis entre 14 Etats membres actuellement sous-représentés – la représentation parlementaire des pays n’étant pas proportionnelle – alors que les 46 restants seront mis à disposition pour de potentiels nouveaux entrants dans l’UE. Les deux co-rapporteurs ont souligné l’opportunité d’offrir ainsi « une représentation plus équitable des citoyens ».

Renforcer la cyberdéfense européenne face aux menaces extérieures

Face à la multiplication de cyberattaques (espionnage, désinformation, accès limité à Internet, etc.), les députés ont appelé à moderniser les outils de cyberdéfense et à renforcer les équipes d’intervention européennes ainsi que la coopération avec l’OTAN, afin de pouvoir faire face à la puissance de ces attaques. Ils évoquent ainsi la possibilité de renforcer la coordination des exercices, des équipes techniques et d’experts, de la formation, etc. non seulement entre l’UE et l’OTAN mais aussi au sein même de l’UE, caractérisée aujourd’hui par une superposition de stratégies nationales. Ce renforcement pourrait s’appuyer sur deux cyber-projets développés dans le cadre de la PESCO (coopération structurée permanente) dédiés à l’échange d’informations et aux équipes d’intervention rapide en réponse aux attaques.

Soutien financier à l’Ukraine, dénonciation de l’occupation russe en Géorgie

Les eurodéputés ont approuvé l’octroi d’un nouveau (le 4ème depuis 2014) programme d’assistance financier à l’Ukraine constitué d’un prêt de 1 milliard €, pour aider le pays à faire face aux conditions de son financement externe jusqu’en 2019. Toutefois, ils réclament que le versement effectif de ce prêt (prévu en deux phases) soit strictement conditionné à l’accélération du rythme des réformes, en particulier en faveur de l’Etat de droit, du pluralisme parlementaire et des droits de l’Homme, à l’utilisation de l’aide financière européenne pour lutter contre la pauvreté et soutenir l’emploi, et enfin au renforcement de la lutte contre la corruption sur la base de l’institution d’un tribunal spécialisé, votée par le Parlement ukrainien le 7 juin dernier.

Sur un autre terrain - mais non éloigné du cas territorial ukrainien, les députés ont exhorté la Russie à cesser toute occupation des territoires d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud en Géorgie, via notamment une présence militaire. Ils ont assuré que l’UE était en mesure d’apporter son aide sous forme de médiation dans la résolution du conflit entre les deux pays, alors que la Russie reconnaît l’indépendance de ces deux régions à l’opposé de la position européenne, qui soutient l’intégrité territoriale de la Géorgie.

Quel partenariat UE-ACP post-2020 ?

Dans le cadre des discussions à venir sur un nouveau partenariat entre l’UE et l’ACP (Afrique, Caraïbes et Pacifique), qui regroupe 78 Etats de la zone, les députés ont de manière générale soutenu la proposition de la Commission tout en adressant leurs propres recommandations, en mettant l’accent sur la lutte contre la pauvreté, le dialogue politique et parlementaire, l’agriculture durable, l’équité et le respect mutuel entre les partenaires.

Mark Rutte, partisan d’une Europe intergouvernementale efficace avant tout

Lors du désormais traditionnel débat mensuel entre un chef d’Etat ou de gouvernement et l’hémicycle européen, Mark Rutte, Premier ministre néerlandais, a fait entendre sa voix en faveur d’une Europe « d’Etats membres souverains » qui doit se concentrer sur des « missions essentielles », préférable à une Europe du « quotidien » dispersée. Une condition pour être efficace et ainsi renforcer l’unité et la force de l’Union. Parmi ces missions essentielles, M. Rutte a notamment évoqué une politique environnementale et de lutte contre le changement climatique plus ambitieuse, la politique migratoire, le contrôle des frontières extérieures de l’Union et la sécurité collective. Il a également fortement insisté sur la nécessité de respecter les accords déjà conclus entre les Etats avant d’envisager des avancées ultérieures, à l’image du Pacte de stabilité et de croissance (critères de déficit et de dette publique notamment – respectivement 3% et 60% du PIB), en rejetant le scenario d’une Europe « à la carte ». Mais sur ce point, certains députés lui ont rappelé les considérations liées à des pratiques d’évasion fiscale – particulièrement favorables aux entreprises multinationales – qui pèsent régulièrement sur les Pays-Bas.

La position de M. Rutte en faveur d’une Europe intergouvernementale n’est pas nouvelle. Au début de l’année, il avait ainsi conduit la « fronde » des pays du Nord de l’Europe contre toute réforme ambitieuse de la zone euro, avancée notamment par la France, plaidant pour le respect des règles en vigueur avant tout approfondissement de l’intégration. Il avait également pris position pour un budget européen réduit – et donc moins ambitieux – sur la période 2021-2027, comme conséquence directe du Brexit – position qu’il n’a pas manqué de rappeler lors de son discours au Parlement européen.

Notes

[1Proposition de RÈGLEMENT DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (refonte), COM(2016) 270 final

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