Dans son projet de rapport sur les évolutions et les adaptations possibles de la structure institutionnelle de l’Union Européenne, Guy Verhofstadt dresse des constats et esquisse des solutions à la poly-crise européenne, mais il parle aussi méthode. Parmi les changements avancés, et non des moindres, celui de soumettre les modifications des traités à un référendum à échelle de l’Union.
Citoyens, citoyennes, peut-être n’aimez-vous pas les réformes, mais vous aimerez probablement un référendum !
La situation actuelle est bien connue, chaque Etat membre peut donner son véto lors de la procédure de ratification des traités, et bon an mal an, il peut s’appuyer pour ce faire sur les instruments à sa disposition, allant jusqu’à consulter sa population. À ce titre, les Français ont encore tous en mémoire le non retentissant qui fut opposé en 2005 au Traité de Rome de 2004 (« traité établissant une constitution pour l’Europe »), et de savourer encore aujourd’hui le statu quo des institutions européennes, et l’engluement de la scène politique nationale au sujet de l’Europe. On a une bonne nouvelle, la crise est là, et l’inter-gouvernementalisme expose ses défaillances au grand jour.
Pensez à David Cameron !
Le constat d’une crise démocratique en Europe semble unanime, et si le problème est démocratique, pourquoi ne pas recourir à ce procédé de consultation semi-directe ? Deux choses plaident pour la proposition avancée par Monsieur Verhofstadt. La première, c’est d’assurer dès le départ une légitimité démocratique à la question posée, en conférant le rôle de chef de file des évolutions constitutionnelles au Parlement Européen. La seconde, c’est évidemment sa dimension continentale, car, quoi que donnerait la cartographie des résultats, c’est bien l’idée que ce sera le vote de toute l’Europe, et non pas de pays ou de circonscriptions. Les Bruxellois votent contre et la Wallonie est pour, et alors ? Pensez à David Cameron ! C’est la règle du scrutin qui fait la décision, il n’y a pas de second tour, c’est la force du suffrage et on ne s’accommode pas de la démocratie.
« Quand on ne sait pas où l’on va, il faut y aller… Et le plus vite possible. » — Les Shadoks
Les référendums sont parfois proposés par des responsables politiques pour contester la situation établie, en remettant les questions qui fâchent à l’arbitrage des citoyens. Ces référendums sont souvent invoqués mais jamais mis en place. En pratique, un responsable propose plutôt un référendum pour légitimer les choix qu’il pense voir confirmés, ou apporter une réponse nette à une question qu’il ne souhaite pas trancher. Pensez à David Cameron ! Voilà le problème de ce mode de gouvernance, on pose des questions auxquelles on ne sait pas répondre, et on laisse aux citoyens le soin de mieux le faire. Ainsi la ratification d’une constitution européenne serait-elle la cible d’un fusil à un coup, sans splendide isolement possible ; une vraie chance, non ?
« On n’est jamais aussi bien battu que par soi-même. » — Les Shadoks
Guy Verhofstadt imagine la ratification par les quatre cinquièmes des Etats membres comme alternative au référendum. Cette idée a toujours l’avantage de faire prévaloir le vote de la majorité, mais elle a selon nous le double désavantage d’être une ratification à la discrétion des Etats, et de favoriser a priori des coalitions à même de fragiliser encore l’Union. Il a aussi pensé au sort des perdants, et propose ainsi que les Etat qui refuseraient de reconnaître la ratification du traité, démarrent dès lors le processus de sécession (pensez à David Cameron !), ou choisissent « le statut d’association » -on peut y voir un renoncement aux prérogatives politiques de l’Etat dans l’Union Européenne.
Les fédéralistes européens sont convaincus que le blocage actuel des Etats, leurs alliances à géométrie variable, et l’absence d’une scène politique européenne sont préjudiciables à la démocratie en Europe et à l’affirmation d’une citoyenneté européenne. Un système de référendum paneuropéen sur les questions constitutionnelles aurait un double avantage : sans personnaliser le choix – tel la désignation du Spitzenkandidaten à la présidence de la Commission –, il permettrait un réel arbitrage politique des citoyens sur le futur de l’Europe, et la préparation d’un tel scrutin s’étendrait nécessairement au-delà des frontières nationales et politiques actuelles, les chefs d’Etats n’étant pas comptables de l’expression des urnes.
1. Le 7 novembre 2016 à 10:16, par billion En réponse à : Rapport Verhofstadt, ou comment sortir de l’ornière ? (1/6)
Relancer l’Europe par un référendum ?
bonjour, et merci de me laisser m’exprimer dans vos colonnes...
Tenter de relancer l’Europe en demandant aux peuples de se prononcer par référendum, est selon moi, à la fois utopiste, et totalement irresponsable : quelles que soient les questions posées, les peuples voteront fatalement contre ; et ce, malheureusement, nous le savons ...
La seule façon de relancer l’Europe, et cela pour longtemps encore, est de s’appuyer sur les institutions existantes de l’UE en les faisant fonctionner mieux par modifications d’organisation discrètes, en recentrant l’action sur quelques projets principaux tout en laissant la subsidiarité maximale dans les autres domaines. Il faut que Parlement, Conseil, et Commission, travaillent ensemble de manière extrêment soudée à quelques projets prioritaires, en s’interdisant tout excès afin de rendre possibles des actions réelles précises.
Que les dangereux idéologues et idéalistes, qu’ils soient souverainistes ou fédéralistes (même sympathiques...), freinent leurs ardeurs ! leur inévitable confrontation, et celle des citoyens qui les suivent ou qui adhèrent à leurs thèses, ne peut qu’amener à un délitement lamentable du beau projet européen. Il nous faut une « Task Force » de queques hommes forts et déterminés au sein du Parlement, du Conseil et de la Commission, qui décident de travailler ensemble pour accoucher rapidement d"avancées significatives visibles ...
2. Le 7 novembre 2016 à 13:46, par Valéry En réponse à : Rapport Verhofstadt, ou comment sortir de l’ornière ? (1/6)
... et pourquoi ne pas simplement donner l’option d’accepter le choix majoritaire comme dans tout système démocratique ? Le changement de statut doir rester un plan B.
3. Le 7 novembre 2016 à 13:48, par Valéry En réponse à : Rapport Verhofstadt, ou comment sortir de l’ornière ? (1/6)
En quoi est-ce une alternative au référendum ? C’est une alternative au liberum veto actuel.
Notons que cette proposition avait été formulée — je crois par Alain Lamassoure — au cours de la Convention qui a donné le traité de 2004. S’il avait été écouté l’Europe se fut épargnée bien des déboires.
4. Le 7 novembre 2016 à 16:18, par robert leleu En réponse à : Rapport Verhofstadt, ou comment sortir de l’ornière ? (1/6)
M’enfin, pourquoi ne comprend-on pas que pour faire Europe il faut que les européens se parlent, et que le plus court chemin pour y parvenir est de généraliser l’enseignement de l’espéranto en première langue étrangère
5. Le 7 novembre 2016 à 19:14, par Benoît En réponse à : Rapport Verhofstadt, ou comment sortir de l’ornière ? (1/6)
Très bon article et merci Le Taurillon pour donner un cadre pour l’actualité européenne. Une petite question au rédacteur / à la rédactrice de l’article. Je ne comprends pas en quoi l’idée de référendum européen serait négative car cela résulterait en une ratification « à la discrétion des Etats ». N’est-ce justement pas le but de l’Union européenne que de « libérer » le citoyen du cadre national de ses institutions ?
6. Le 8 novembre 2016 à 16:47, par Frankie Pérussault En réponse à : Rapport Verhofstadt, ou comment sortir de l’ornière ? (1/6)
oui oui, moi j’opine ! Un référendum pour décoincer le système et un référendum sur tous les Etats de l’Union actuelle le même jour. Oui, c’est une très bonne idée :-)
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