Regard d’un électeur du PPE sur le résultat des élections européennes

, par Pierre-Antoine KLETHI

Regard d'un électeur du PPE sur le résultat des élections européennes
Jean-Claude Juncker Crédits photos : Wikipédia, Zinneke

Plutôt que de sombrer immédiatement dans la colère et le désespoir comme ne manqueront pas de le faire les représentants d’autres courants politiques, je voudrais d’abord souligner les points positifs que l’on peut relever aujourd’hui, lorsqu’on soutient les chrétiens-démocrates et conservateurs du PPE.

Tout d’abord, le PPE est en tête avec une bonne vingtaine de sièges d’avance sur les socialistes. Bien sûr, le PPE perd un nombre important de sièges (une soixantaine) par rapport à 2009. Mais les résultats de 2009 étaient particulièrement bons. En outre, les socialistes progressent à peine, eux qui étaient donnés au coude à coude avec le PPE. Le PPE, d’après les estimations dont je dispose, est en tête dans au moins la moitié des Etats membres, contre seulement 3 Etats qui ont placé l’extrême-droite ou d’autres europhobes en première place et un Etat (la Grèce) qui a placé l’extrême-gauche en tête. Et cela, malgré la poussée des extrêmes dans plusieurs pays et malgré une crise économique dans laquelle plusieurs Etats membres sont encore englués. La gestion saine de l’économie préconisée par le PPE est donc encouragée ; de nombreux électeurs sont conscients que les sacrifices peuvent mener à des résultats positifs à moyen et long terme.

Une semi bonne nouvelle est, ensuite, l’enrayement de la hausse de l’abstention. Alors qu’une abstention record était annoncée, la participation est finalement légèrement plus forte qu’en 2009. Mais ceci ne doit évidemment pas masquer une participation toujours inférieure à 50%, toujours trop faible. L’idée des têtes de liste européennes pour la Présidence de la Commission n’a pas suffi à mobiliser les foules ; les médias portent une grande part de responsabilité de cela – j’y reviendrai dans quelques lignes. Par ailleurs, je tiens absolument à souligner que les abstentionnistes n’ont pas voté Le Pen, Farage, etc. En d’autres termes, il ne faut pas les compter avec les europhobes, un amalgame que se plaisent ou se plairont à faire certains commentateurs, médias et politiciens !

Après la relative satisfaction du résultat à l’échelle européenne, j’en viens maintenant à la déception, et même une certaine colère quant au résultat français. Les médias ont beau jeu de mettre sur le même la percée de l’UKIP, du FN, de l’extrême-droite danoise, les 20% du FPÖ, les 21% de Grillo, etc. Mais le cas français me paraît bien isolé, si l’on excepte le Danemark. En effet, l’UKIP est europhobe mais n’a presque rien à voir avec le FN. Le FN n’a que 25% de moins de 50% de participants ; l’on peut donc relativiser l’attrait du parti de Marine Le Pen. Mais la France est bien le principal foyer de députés d’extrême-droite, rien ne peut le cacher !

Il nous faut donc réfléchir comment nous en sommes arrivés là. J’accuse la plupart des médias traditionnels et les partis politiques français d’avoir contribué à ce résultat. J’irais même plus loin : certains l’espéraient de tout cœur. En ce qui concerne les médias, France Télévisions a donné une large place au FN et a refusé de recevoir Martin Schulz : alors que nous étions dans une campagne européenne, France Télévisions a préféré une campagne nationale. C’est d’autant plus honteux que France Télévisions est un groupe financé avec l’argent des citoyens ! La presse écrite ne fait pas forcément beaucoup mieux : quand je lis dans Le Monde d’aujourd’hui Françoise Fressoz décrire l’UMP et le PS comme partis libre échangistes et européens, je me demande sur quelle base elle peut affirmer cela. Ces deux partis sont divisés sur les questions européennes et les résultats des élections européennes ne manqueront pas de susciter des soubresauts au cours des prochains mois. Sans compter que les partis français sont tous économiquement « étatistes » ; le libéralisme est quasiment inexistant en France, d’où d’ailleurs de grandes difficultés à réformer le pays face aux multiples intérêts corporatistes. Pourtant, l’exemple de Matteo Renzi en Italie montre qu’avec du dynamisme et de la volonté, on peut convaincre les électeurs qu’un changement est possible. Mais en France, la majorité socialiste est déchirée par ses querelles internes et paralysée par la médiocrité du locataire de l’Elysée. Venons-en aux partis politiques. Tant l’UMP que le PS sont responsables de la situation actuelle : le PS, par son incapacité à définir une ligne politique et à s’attaquer sérieusement aux problèmes quotidiens des Français ; l’UMP par ses divisions entre chefs et les multiples affaires qui touchent ses dirigeants. J’en soupçonne d’ailleurs certains, tant au PS qu’à l’UMP, d’être contents de la situation actuelle : ceux du PS car l’opposition républicaine est battue aussi ; ceux de l’UMP car ils font partie de ceux qui souhaitent stupidement un rapprochement avec le FN. Et que le PS ne vienne pas affirmer que les Européens ont condamné l’austérité : en Irlande, à Chypre et en Espagne, le PPE est largement devant la gauche ; au Portugal et en Grèce, il est juste derrière l’opposition. Le cas italien est particulier pour diverses raisons. Et chez les Allemands, qui contribuent le plus à la solidarité vis-à-vis des autres Européens, même s’ils ont parfois du mal à l’accepter, le PPE est en tête aussi, preuve que le PPE est le plus capable de rassembler les Européens autour d’une vision de l’économie et de l’Europe. La crise française n’est pas seulement économique ; elle est aussi politique et morale. C’est ce qui nous différencie de la plupart de nos voisins. C’est ce qui doit amener d’urgence nos politiciens et nos citoyens à repenser urgemment le fonctionnement de notre démocratie malade.

Le Taurillon rappelle que les articles qu’il publie n’engagent ni sa rédaction, ni les Jeunes européens. Sa ligne éditoriale trans-partisane mais résolument en faveur de la construction européenne permet à chacun d’exprimer ses opinions politiques conformément au pluralisme.

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