Régulation financière : quand la Commission européenne dépasse le Gouvernement français...par la gauche

, par Ferghane Azihari

Régulation financière : quand la Commission européenne dépasse le Gouvernement français...par la gauche

« J’ai un ennemi, il n’a pas de visage, c’est le monde de la finance » disait le candidat François Hollande. Même si le ton belliqueux n’était sans doute pas nécessaire, chacun s’accordera à dire que la crise nécessite que l’on repense nos mécanismes de régulations. Mais paradoxe, la Commission européenne, souvent critiquée en ce qu’elle serait l’apôtre d’un dogme néolibéral au service des seules banques propose cette fois-ci une réforme bancaire européenne bien plus stricte que celle initiée par l’exécutif français, ce dernier se dressant vent-debout aux côtés des lobbys financiers contre la proposition de réforme du Commissaire européen conservateur Michel Barnier.

La réforme bancaire française, des mesures à faibles impacts

La loi du 26 Juillet 2013 dite sur « la séparation et la régulation des activités bancaires » est très controversée en ce qu’elle serait totalement insuffisante au regard du premier objectif qui était a priori affiché par le candidat à la Présidence de la République française : séparer les activités de banque de marché de celles de banque de détail. Les premières auraient du être isolées dans une filiale indépendante. Pourtant, sous pression des lobbys bancaires, le Gouvernement s’est résolu à faire voter une loi vidée de sa substance ne concernant qu’une infime partie des activités bancaires (moins de 2%). L’argument énonçait que la remise en question du système de banque universelle aurait été nuisible pour l’économie française.

En effet certaines analyses énoncent que l’opposition entre spéculation et activités utiles à l’économie réelle est impertinente. L’une serait finalement utile à l’autre puisque ce serait la rentabilité des activités de marché qui permettrait aux banques de prêter plus facilement aux individus et aux entreprises. Or cela serait plus difficile dans le cas où l’on isolerait ces deux facettes de l’activité financière car celles-ci seraient interdépendantes et donc indissociables. Séparer ces activités reviendrait à rendre les banques plus frileuses et moins aptes à injecter des capitaux dans l’économie réelle. C’est notamment le point de vue de Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France et Président de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, qui a sévèrement critiqué le projet Barnier qu’il juge « irresponsable », appuyant ainsi les mises en garde des lobbys bancaires français et européens.

La réforme bancaire européenne, plus stricte donc plus dangereuse ?

La proposition de réforme de Monsieur Barnier est censée aller de paire avec l’union bancaire européenne. Rappelons très brièvement que cette union bancaire consiste à placer les plus gros établissements financiers sous le contrôle de la Banque centrale européenne (BCE) tout en se dotant d’un mécanisme unique de résolution de crises qui a l’objectif de solliciter avant tout les créanciers et les actionnaires en vue de protéger le contribuable des éventuelles défaillances bancaires. Or d’autres analyses insistent sur le fait que l’union bancaire reste inutile tant que l’on ne résout pas le problème de la séparation des banques de marché et de détail puisque le lien qui existe entre les déposants et la spéculation incitera toujours les États (et donc les contribuables) à se porter garant en cas de défaillance majeure. Il semble que le Commissaire Michel Barnier soit de cette école puisque sa proposition de règlement (dont la synthèse est ici disponible en anglais) est beaucoup plus radicale et s’articule autour de deux principaux piliers.

Dans un premier temps, elle s’attache à ce que les banques ne puissent plus investir sur les fonds spéculatifs ainsi que sur les matières premières pour leur propre compte. Dans un second temps, elle donne le pouvoir aux régulateurs d’imposer aux banques le cantonnement des activités les plus dangereuses dans des filiales indépendantes. L’objectif affiché est l’incitation à l’investissement dans l’économie réelle en délaissant les activités spéculatives qui ne seraient pas utiles à la société. Au-delà de l’appréciation de l’opportunité économique de ce projet, le principal objectif de Monsieur Barnier sera sans doute de convaincre Paris et Berlin qui, aux côtés des lobbys bancaires, semblent vouloir l’enterrer.

Vos commentaires
  • Le 25 février 2014 à 11:14, par Bernard Giroud En réponse à : Régulation financière : quand la Commission européenne dépasse le Gouvernement français...par la gauche

    Spéculer ou investir a vue, parier ou mettre son argent dans la prochaine marche, risquer un peut-être qui n’est pas forcément probable, ou s’étaler, s’établir sur le terrain existant dans la continuité ?

    Il semble bien évidant que pour répondre, il faut s’entourer de la plus haute sécurité, de la plus haute vision possible dont on puisse disposer.

    C’est plus facile à dire qu’à faire.

    Cependant, les exemples, la sagesse qui perpétue la vie, donne la réponse.

    Sans risque de se tromper, on peut dire que le talent, ou la force , sous toutes ses formes, ne sont plus grand bénéfices que lorsqu’ils tiennent compte d’une vision de progrès général, que lorsque que l’initiative privé se situe dans la suite, ou modèle un présent, un futur, qui entraine, dynamise, l’ensemble du voisinage, l’ensemble du corps social, l’ensemble du « grand village ».

    Les acquis intellectuels et philosophiques sont assez clairs sur point, qui commandent d’utiliser tous les talents , toutes les ressources dont la famille humaine peut disposer, en n’oubliant pas que le chemin du civilisé est long, qu’il faut un peu de recul et de sagesse, et aussi un certain nombre d’autres qualités pour que le don qui nous est fait tous les jours, et pendant l’espace qui nous est donné, serve le sens de l’expansion de la vie.

    Il faut donc chercher à se comprendre, éviter l’écueil de l’égoïsme, du retour trop rapide sur soi, et des chapelles particulières, et parier sur les dynamiques multiples et multiformes de la famille humaine.

  • Le 26 février 2014 à 23:24, par Alexandre Marin En réponse à : Régulation financière : quand la Commission européenne dépasse le Gouvernement français...par la gauche

    « la Commission européenne, souvent critiquée en ce qu’elle serait l’apôtre d’un dogme néolibéral... »

    La commission n’est aucunement néolibérale, car le néolibéralisme, c’est l’absence de règles, donc la dérégulation. Or les 2/3 des normes nationales des Etats-Membres sont des normes directement ou indirectement communautaires. Ce qui cher à la Commission, c’est le « sacro-saint » principe de droit de la concurrence au nom du marché intérieur. Le droit de la Concurrence a besoin de beaucoup de règles pour être effectif. Ce n’est donc pas du néo-libéralisme.

    Ce qui est très critiquable cependant, c’est le fait qu’une partie des Services Publics, ceux dit « marchands » par le droit communautaire sont soumis à ce droit de la concurrence en même temps que les entreprises privées. En effet, les entreprises, elles ont comme essence le fait de faire des bénéfices, et les Etats, comme l’U.E doivent tout faire pour favoriser cela sous réserve du respect du droit par ces dernières. Mais le Service Public, c’est la satisfaction de l’intérêt général. Et l’intérêt général doit toujours primer sur les bénéfices des entreprises privées.

    Je critique l’U.E sur ce point, mais la critique vaut aussi pour la France, qui prend le prétexte de l’Europe pour faire la même chose avec ses Services Publics dit « Industriels et Commerciaux », sans que Bruxelles ne lui ait rien demandée.

    Néanmoins, les bêtises de l’une n’excusent pas les bêtises de l’autre.

  • Le 28 février 2014 à 11:10, par Bernard Giroud En réponse à : Régulation financière : quand la Commission européenne dépasse le Gouvernement français...par la gauche

    Pour personne il n’est simple de prévoir, ni d’interpréter dans le feu de l’action, l’utilisation des fonds financiers.

    Quelle part réserver à la consommation, quelle part à l’investissement ?

    En gros, la consommation fait disparaitre le produit ; Il ramène à l’étape précédente l’effort produit par l’élaborateur, et puise dans la ressource énergétique dont chacun voit le volume de la réserve à la mesure de ses connaissances, voir même de ses souhaits.

    L’investissement, parie, prépare, stocke, produit et énergie, en vue de ce qui doit être moins énergivore, ou plus économe ; Il parie pour un meilleur lendemain.

    La dérive dun tel pari s’installe lorsqu’il se transforme en piège, ou publicité et mass-média s’emploient à préparer les alouettes, à plonger aux filets des cupides.

    Le schéma est, bien sur, un peu simpliste, mais il faut y prendre garde, les choix que nous avons à faire entre consommation actuelle et investissement pour le futur, en appellent constamment à cette balance ; Ils en appellent à la réflexion, au jugement, au courage, parfois à l’héroïsme du sacrifice de la personne à la cause ;

    Trop souvent, depuis un certain nombre d’années, nous sommes dans l’exemple de la cause au service de la personne ; Cette attitude rétrécie l‘univers à un niveau désespérant, bouché par la limite de faible, et toutes sommes faites, de notre imparfaite individualité.

    Il nous faut faire renaitre l’espérance et les hommes ou groupes d’hommes qui pourront l’incarner

    Donc, oui, vivent ces hommes de paris et d’espérance, qui n’attachent pas leurs réalisations aux basques de leurs satisfactions rapides, et puissent-ils être nombreux ceux dont la réflexion ,l’imagination, et les réalisations embrassent un cadre qui au final, parfois sur l’instant incompris, se révèlent, par effet de volonté et de persévérance, bénéfice général pour soi et le plus grand nombre.

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