Transports en Europe : Un redémarrage pied au plancher pour l’automobile ?

, par Jérôme Flury

Transports en Europe : Un redémarrage pied au plancher pour l'automobile ?
Photo d’illustration : Kiki Zhang / Burst

Après la pandémie, quels transport dans l’Union européenne fin 2020 ? L’automobile est un secteur qui s’est retrouvé à l’arrêt complet lorsque les divers Etats européens ont pris les décisions d’instaurer des confinements. Mais, grâce aux aides nationales, et indirectement à cause des craintes nouvelles inspirées par les transports en commun à l’heure d’une pandémie mondiale, le domaine semble connaître une évolution majeure ces dernières semaines.

Parmi la première salve d’annonces livrées par le gouvernement français à l’heure du reconfinement, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a glissé que les garages peuvent toujours prendre les commandes de clients en ce qui concerne les achats de véhicules. Quelques mots symboliques de l’attention portée par l’Etat français, premier actionnaire de Renault, au secteur de l’automobile depuis le début de la crise. Et à l’image de la France, de nombreux pays européens se sont engagés pour protéger leurs constructeurs. Bloomberg estimait en décembre dernier que “l’Europe devrait connaître en 2020 la plus forte croissance en matière de ventes de voitures électriques et hybrides rechargeables”. Le mouvement est passé à la vitesse supérieure avec la crise provoquée par le coronavirus.

Comme le développe Courrier international, qui se repose sur une “note de l’analyste allemand Matthias Schmidt publiée en août”, les Européens ont acheté plus de voitures électriques et hybrides rechargeables que les Chinois au premier semestre 2020. Les véhicules hybrides rechargeables et à batteries représentaient 18% des immatriculations en août 2020, contre 7,5% un an plus tôt sur le vieux continent. Pour Bloomberg, les subventions gouvernementales sont une des explications majeures à ce phénomène.

Courrier international rapporte ces diverses aides, d’une subvention allant en Allemagne jusqu’à 9000 euros pour les voitures électriques, et 6750 euros pour les modèles hybrides, à celle de la prime attribuée en Croatie, qui peut monter à 9 200 euros pour l’achat d’une voiture électrique. À Madrid, c’est le plan Moves II qui a été instauré, une aide pouvant aller jusqu’à 5500 euros. Des politiques qui portent leurs fruits.

Coup de foudre pour l’électrique

“‘Grâce aux normes européennes, la part de marché des voitures électriques (VE) se situe autour de 10 % des ventes en Europe et s’élèvera à 15 % en 2021révélait l’organisation Transport & Environment’s sur son site le 12 octobre. Il est vrai que le secteur est en plein boom et les chiffres sont aux couleurs du Green deal. L’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA) a communiqué les résultats du premier trimestre 2020. Au sein de l’Union européenne, les immatriculations de véhicules personnels électriques et hybrides rechargeables sont au nombre de 167 132, contre 83 281 au premier trimestre 2019, soit… une augmentation de 100 % malgré les nombreux confinements ! En Tchéquie, cette progression monte même à 570 % et tous les pays sauf Chypre (passé de 5 à 4 immatriculations) sont dans le vert.

Comme le relève Capital, la période a vraiment profité à ce type précis de véhicules, “En septembre, les immatriculations des voitures hybrides et électriques ont dépassé celles des diesel en Europe”, note le site web. Il s’agit d’une première historique. Tant et si bien que certains spécialistes s’interrogent : le marché a-t-il enfin basculé ?

Des freins au développement

Il ne faudrait pas cependant s’enflammer pour autant. De nombreux problèmes demeurent, comme sur le plan pratique en ce qui concerne les voitures électriques. “Voilà la réalité du moment”, explique Jacques Chevalier sur le site du Point, “le marché de la voiture électrique s’envole, mais les points de recharge restent à la traîne”. Alors que les ventes de ce type de voitures ainsi que des modèles hydrogène ont bondi de 110% en trois ans en Europe, “dans le même temps, le nombre de bornes sur la voie publique n’a progressé que de 58 %, restant sous la barre des 200 000”. C’est particulièrement le cas pour l’hydrogène, sur lequel misent des constructeurs japonais face aux décisions européennes de mettre en place des normes plus strictes : il existe peu de bornes de recharge à l’heure actuelle.

Une voiture électrique reste en moyenne de 10 000 euros plus chère que son équivalent thermique, et davantage au fur et à mesure que l’on monte en gamme”, rappelle de son côté Cécile Goubet, déléguée générale de l’Association nationale pour le développement de la mobilité électrique (Avere). Malgré les aides, l’investissement que nécessite l’achat d’un véhicule personnel, qu’il soit électrique ou non, peut rester prohibitif, notamment pour des jeunes diplômés qui pourraient avoir pris d’autres habitudes en ville, comme celle du vélo.

Les chiffres annuels restent catastrophiques pour les constructeurs. “Après s’être effondré de 55,1% en mars, de 76,3% en avril, puis de 52,3% en mai sous l’effet du confinement des populations et de la fermeture des commerces automobiles, le marché européen se remet difficilement des conséquences de la pandémie de Covid-19”, annonçait l’AFP en septembre 2020.

À une autre échelle, les règles de l’UE et les amendes encourues par les constructeurs ont commencé à avoir des conséquences. Les groupes Fiat-Chrysler et PSA avaient sans doute cet aspect en tête au moment de signer un accord en décembre 2019, qui fera d’eux prochainement le 4e groupe automobile mondial, nommé Stellantis. Les critères de production sont surveillés plus étroitement par les instances. Les émissions en matière d’oxyde d’azote doivent maintenant être testées dans des conditions de circulation, pour parer à de nouvelles polémiques telles que le “diesel gate” d’il y a plusieurs années qui avait été une très mauvaise publicité pour le concepteur allemand de la Volkswagen.

Une évolution finalement incertaine

L’embellie actuelle pour les achats de voitures restent donc à relativiser car le contexte de ces dernières années était plutôt nuageux dans le secteur. Zones à faibles émissions, péages aux portes des villes, interdiction des diesels dans certaines communes… Les règles sont de plus en plus strictes pour les propriétaires de véhicules. Ce qui pourrait aussi avoir pour effet d’inciter les citoyens à se tourner vers d’autres modes de transport. Dans une interview à Cuej.info, Eric Vidalenc, économiste à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) affirmait pour sa part, “la voiture pour tous, tout le temps, est un idéal révolu”.

Comme dans tous les domaines, difficile de dire pour l’instant quelles conséquences aura le coronavirus, mais la pandémie pourrait accélérer des réflexions qui étaient déjà en cours chez les constructeurs comme celle de la mise en fonction de véhicules autonomes. L’automobile semble malgré tout encore loin d’être bonne pour la casse.

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