L’UE « s’adapte encore mal à l’existence d’un acteur véritablement indépendant dans [son] voisinage », analysait David Frost à la chambre des Lords le 9 février dernier. Il faut croire cependant que l’adaptation doit se faire des deux côtés. La décision de Londres de suspendre le statut diplomatique de Joao Vale de Almeida, l’ambassadeur de l’Union européenne au Royaume-Uni, est tout à fait symptomatique des cafouillages couronnés d’un manque de communication qui ont marqué les 50 premiers jours du Brexit. L’enjeu de cette suspension est d’importance pour la future relation entre les deux entités : il s’agit de confirmer ou non l’immunité diplomatique dont pourra bénéficier le représentant de l’Union européenne. À cela s’ajoute une forte dimension symbolique, celle de la perception de l’Union européenne par le Royaume-Uni. En effet, le statut diplomatique est généralement alloué aux représentants d’États souverains. L’argument des Britanniques – l’Union européenne n’est pas un État souverain mais une union d’États – est grotesque et dangereux. Au-delà de disputes politiciennes sans grand intérêt, cette suspension pourrait ouvrir la voie à de possibles actions similaires dans d’autres pays, s’inquiète le journal en ligne Politico.
Quelques jours après l’annonce de Londres concernant le statut de l’ambassadeur européen, le Brexit se retrouve au cœur de l’actualité. Le 29 janvier, Ursula von der Leyen rajoute in extremis, sans concertation préalable, un paragraphe au texte du Mécanisme de transparence et d’autorisation pour les exportations de vaccins. Cette disposition, depuis effacée, aurait pu conduire à la fermeture de la frontière irlandaise et ainsi à la rupture de l’accord du Vendredi Saint, l’un des points les plus sensibles des négociations sur le Brexit. Euractiv décrit une « erreur » de la présidente de la Commission européenne. Les conséquences de ce faux-pas ne se font pas attendre, le gouvernement britannique demande la renégociation de l’accord sur les frontières irlandaises. Dans une lettre datée du 3 février 2021 et adressée au vice-président de la Commission européenne Maroš Šefčovič, le ministre du Cabinet Michael Gove demande une prolongation de deux ans (jusqu’en janvier 2023) des dérogations appliquées à certains biens traversant la frontière irlandaise. Seraient concernés certains produits alimentaires, dont les viandes réfrigérées, ainsi que des produits pharmaceutiques ou encore les colis venant de Grande-Bretagne à destination de l’Irlande du Nord.
« Il y a une vie après le Brexit » postait Joao Vale de Almeida le 17 janvier dernier sur son compte Twitter. À quoi ressemblera cette vie ? C’est bien cela qui se joue actuellement. Les négociations avancent doucement, au fur et à mesure que le Royaume-Uni se retire des différentes organisations de l’Union européenne. Les prochains dossiers à l’ordre du jour concerneront certainement la mise en place, l’encadrement et l’efficacité des douanes et des contrôles aux frontières. La question des visas, de la pêche et de la mise aux normes européennes des biens, notamment alimentaires, seront également mises sur la table lors des prochains mois. Reste enfin l’épineuse question de la frontière irlandaise, à laquelle l’accord du 24 décembre n’offre qu’une réponse temporaire.
1. Le 2 mars 2021 à 20:07, par Rumin En réponse à : Un Brexit sans fin
Il est tout à fait exact que l’Union européenne n’est pas un État souverain, c’est une organisation internationale qui bénéficie simplement de transferts de compétences, souverainement décidés par les pays qui en sont membres. Et il est bien normal que les premiers temps du Royaume-Uni hors de l’UE connaissent des difficultés, après 40 ans d’imbrication juridique, technique, commerciale. Avec le temps, tout se mettra en place, autrement qu’avant le Brexit.
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