Pour vous, quels sont les objectifs et engagements qui devraient être apportés par le Parlement européen à la COP21 ?
Le Parlement européen peut jouer un rôle important lors des négociations de la COP21, car il peut faire pression et de fait, il le fait déjà maintenant pour que le positionnement officiel de l’Union européenne et des États membres soit plus ambitieux et obtenir que l’Europe soit la région leader dans les négociations. Le Parlement européen en 2014 a déjà approuvé une résolution à propos de la COP20, qui a eu lieu à Lima, le mois de décembre dernier pour que les objectifs de 2030 soient des objectifs contraignants.
En plus, il y a quelques mois, depuis l’Assemblée parlementaire euro-latino-américaine (EurLat dont la délégation euro parlementaire Ernest Urtasun est vice-président), nous avons approuvé la résolution d’urgence sur « la position de l’Europe et de l’Amérique latine sur les questions relatives au climat et au changement climatique dans l’optique du sommet de 2015 qui se tient à Paris (COP 21) », nous avons souligné l’importance de trouver un nouveau paradigme du bien-être humain qui doit réconcilier le double défi de battre le changement climatique et d’améliorer l’égalité et la cohésion sociale. Au groupe politique des Verts/ALE du Parlement européen, nous avons aussi fait pression pour que le positionnement du Parlement et aussi de l’Europe donne l’exemple au sommet de Paris et donc, on puisse fixer des objectifs clairs et ambitieux comme une réduction annuelle du 6% du gaz à effet de serre ou d’éliminer tout soutien politique ou financier aux combustibles fossiles.
Avec les Verts, nous avons été très claires sur nos demandes pour le sommet de Paris ; fixer comme objectif une transition de 100% vers les énergies renouvelables pour 2050 ; fixer des objectifs de réduction des émissions qui soient compatibles avec l’objectif de limiter le réchauffement planétaire à 2 degrés ; créer un système commun pour mesurer les émissions de gaz à effet de serre ; accroître l’aide financière et le soutien aux pays en voies de développement qui luttent contre le changement climatique et que dans chaque action climatique soit envisagée comme un élément clé les droits humains et les droits des femmes.
Après la polémique élection de Arias Cañete comme commissaire européen au Climat et à l’Énergie ; Que pensez-vous de la politique environnementale de la Commission Juncker ? Serait-elle en manque d’ambition, notamment dans son paquet « Énergie-Climat 2030 » ?
La politique qui a été faite jusqu’à maintenant par l’actuelle Commission et le commissaire Cañete est très peu ambitieuse, voire alarmante. Les signes que nous percevons de la nouvelle Commission nous inquiètent énormément. Dans le programme de travail qu’elle a présenté pour cette année, nous voyons clairement que la politique environnementale a été méprisé ; en enlevant de très importants projets de législation environnementale comme celui de créer une économie circulaire ou celui sur la qualité de l’air. Nous croyons que la Commission devrait repenser cette approche et, à l’occasion des négociations de Paris, adopter une position beaucoup plus ambitieuse.
Le paquet présenté par la Commission sur l’énergie et le climat 2030 est un autre exemple du manque d’ambition de la Commission et du commissaire Cañete. Le paquet ne favorise pas une lutte efficace contre le changement climatique, ne mise pas assez sur les énergies renouvelables et l’efficience, ni ne parvient donc à réduire la dépendance sur les combustibles fossiles. Par exemple, les objectifs fixés de réduction des émissions de gaz sont bien inférieurs aux recommandations faites par les experts et, à l’avenir, vont rendre excessivement difficile les moyens d’atteindre l’objectif global de ne pas dépasser 2 degrés d’augmentation de la température moyenne mondiale. La proposition sur la croissance des énergies renouvelables est ridicule, elle est bien en dessous de la croissance enregistrée dans la dernière décennie et même inférieure à ce qui serait obtenu si aucune politique n’était appliquée. Au lieu de supprimer des propositions de directives environnementales ou de fixer des objectifs ridicules, la Commission devrait donner la priorité à des politiques ambitieuses sur le climat et l’environnement.
En Espagne, les Verts sont peu représentés. Pourquoi n’existe-t-il pas un parti vert au niveau national ? Où en est le débat environnemental en Espagne ?
Au niveau national depuis 2011 il existe un parti écologiste, EQUO, qui a fait partie des différentes coalitions des partis progressistes, dont a fait aussi partie ICV (Iniciativa per Catalunya Verds), qui se sont présentés aux élections régionales cette année, et certains de ces partis coalisés ont réussi à gagner des mairies et des municipalités comme à Madrid, à Barcelone ou à Valence.
Le changement climatique n’est pas une menace si lointaine, ses effets sont déjà perceptibles dans beaucoup d’endroits et les phénomènes météorologiques extrêmes comme les vagues de chaleur, les sécheresses, les cultures moins abondantes ou les changements des précipitions sont de plus en plus courants. Nous savons trop bien que la cause principale du réchauffement climatique est l’utilisation de combustibles fossiles. C’est pour cela qu’il est triste et scandaleux qu’en Espagne actuellement le gouvernement du PP, à part sa réforme énergétique, empêche et met des entraves à la transition vers les énergies renouvelables, vers l’autoconsommation et l’efficience énergétique. L’investissement en Shale Gaz ou les propositions du gouvernement catalan de faire de l’Espagne un centre de stockage et de distribution de gaz en Europe, avec l’augmentation considérable des émissions de gaz dans l’atmosphère et les risques que cela implique comme nous avons pu en être témoins lors de l’incident de l’usine de gaz Castor, montrent la faible attention et sensibilisation à ces questions des hommes politiques qui sont au gouvernement aujourd’hui. C’est la raison pour laquelle avec ICV, nous avons dénoncé depuis des années ces politiques et en redisant qu’il était nécessaire d’en finir avec la barbarie du modèle actuel de consommation et d’épuisement des combustibles fossiles, que ce soit le gaz, le pétrole ou l’uranium ; et de laisser la place à un système basé sur les énergies renouvelables et un avenir propre.
Entre les projets de réforme de la zone euro, on entend beaucoup parler d’une Europe plus sociale qui reste à construire. En quoi, votre expérience dans le monde syndical vous a aidé dans votre travail d’eurodéputé ? Cette Europe sociale fait-elle défaut ?
Malheureusement nous sommes encore très loin de l’Europe sociale. Aujourd’hui l’Union européenne est devenue une machine pour démanteler les grandes réalisations des travailleurs et travailleuses qui ont été consacrées dans la plupart de nos pays. L’Europe sociale est encore à construire ; c’est l’Europe basée sur la législation du travail, les systèmes du bien-être, sur des systèmes qui garantissent les pensions pour les personnes âgées, des prestations aux exclus et aux plus désavantagés, et qui assurent l’accès universel public et gratuit aux services fondamentaux. Malheureusement, cette Europe a très peu à avoir avec l’actuelle Union européenne.
Dans les dernières années, l’Union européenne a été utilisée pour l’extrême opposé, pour attaquer le système de bien-être à partir des mesures d’austérité et une supposée discipline fiscale qui a réduit les droits sociaux et ceux des salariés. Des droits qu’il a fallu de nombreuses années pour conquérir. La façon dont certains dirigeants européens ont traité la crise grecque et le mépris pour le peuple grec est le meilleur exemple de ce qui se passe de nos jours. À l’ICV nous travaillons et croyons depuis longtemps qu’il y a un autre chemin, celui de l’Europe sociale, où les intérêts des personnes sont prioritaires aux intérêts économiques, où l’on veille pour que les législations approuvées ne génèrent plus d’inégalités.
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