Za naszą i waszą wolność ! Histoire du drapeau de la Pologne

, par Paul Brachet

Za naszą i waszą wolność ! Histoire du drapeau de la Pologne
Source : Pixabay

Ce 11 novembre, les Polonais célèbrent leur fête nationale. Celle-ci commémore le retour officiel de la Pologne comme Etat à part entière par la prise de pouvoir politique et militaire par Józef Piłsudski. Ce retour à l’indépendance succède à 123 ans d’occupation par l’Empire allemand, austro-hongrois et russe et autant d’années où les trois empires ont cherché à « intégrer `` davantage la Pologne par une russification et une germanisation extrême. La Pologne a en effet été rayée par deux fois de la carte et a été privée par trois fois de son indépendance : lors des partages successifs de la Pologne (en 1772, 1793 et 1795), lors de l’occupation par l’Allemagne nazie (de 1939 à 1945) et lors de la période soviétique où le régime dictatorial polonais était intimement lié à Moscou (de 1945 à 1989). Alors que la Russie est redevenue une menace manifeste pour l’intégrité territoriale de ses voisins, intéressons-nous plus particulièrement au symbole de l’identité et de l’indépendance de la Pologne : son drapeau.

Rouge et Blanc

Le drapeau polonais est composé de deux bandes horizontales blanche et rouge. La composition du drapeau est codifiée depuis 1997 par l’article 28 de la Constitution de la République de Pologne, et avant elle par la « Loi sur les armoiries » de 1980. Officiellement, ces couleurs représentent la pureté et la noblesse pour le blanc, le sang et la force pour le rouge.

Historiquement, ces couleurs, czerwony i biały, viennent des armoiries de Bolesław Ier, premier à être couronné souverain de Pologne, en 1025. Fondateur de la dynastie des Piast, ce dernier arbore pour la première fois un blason rouge orné d’un aigle blanc couronné. Son successeur, Casimir II dit le Juste, participe alors à une guerre de succession pour le trône de Galicie, province méridionale de l’actuelle Pologne, unissant alors les grandes familles du royaume sous une même bannière, celle d’un aigle blanc couronné sur un fond rouge. Dès lors, l’aigle couronné devient représentant de l’Etat polonais et les couleurs, symboles de la souveraineté des princes polonais.

Le blason est repris par les princes polonais lors de la fondation du Grand-Duché de Pologne-Lituanie. L’union personnelle entre les deux pays donne à la Pologne un statut de grande puissance, incontournable dans l’Europe du XVIème et XVIIème siècle. Le drapeau du Grand-Duché est composé des blasons polonais et lituanien et arbore fièrement les couleurs blanche et rouge, symbolisant une union interétatique sous une même dynastie, celle des Jagellon. Toutefois, piégé par ses institutions et plus particulièrement par le droit de véto accordé à l’ensemble des dirigeants de l’Etat, le Grand-Duché va connaître une période de stagnation puis de déclin menant in fine à son dépècement entre les puissances allemande, austro-hongroise et russe par trois « partages » de son territoire. En 1795, à la suite de l’ultime partage, la Pologne n’est plus.

Le drapeau, vecteur d’identité pour la nation polonaise

Dire que la Pologne en tant qu’Etat souverain n’est plus est vrai, dire que la Pologne en tant qu’entité, en tant que nation, a disparu est on ne peut plus faux ! En effet, les Polonais, leur langue et leur culture persistent dans les territoires qui sont désormais à la croisée des empires. Les trois empires ont des politiques agressives de germanisation et de russification vis-à-vis de ces nouveaux territoires. Mais dans un contexte de montée des nationalismes à travers toute l’Europe, les autorités centrales se heurtent à la résistance de la population polonaise. Pour symboliser la continuité et l’union de son peuple, la nation polonaise brandit l’étendard blanc et rouge !

Alors que les politiques d’assimilation se font de plus en plus fermes, une révolte éclate dans ce qui est alors appelé « royaume de Pologne », et qui n’est autre que la partie occupée par la Russie du défunt Royaume de Pologne. L’insurrection de 1830 est brutalement réprimée. Mais seize ans plus tard, le conflit se réveille et embrase l’ensemble de l’Europe, y compris les territoires polonais sous administrations allemande ou autrichienne : c’est le Printemps des Peuples ! Des drapeaux bicolores sont visibles de Poznan à Varsovie, de Cracovie à Opole. Si le Printemps de 1845 permet la constitution d’une identité commune, notamment par le drapeau et les armoiries, il ne permet en rien l’établissement d’un Etat-nation polonais.

Un symbole inchangé malgré les occupations et les régimes

En 1918, l’Allemagne et l’Autriche-Hongrie signent l’armistice mettant fin à la Première Guerre mondiale (1914-1918). Un des points de l’armistice est la création d’un Etat nation polonais par la consécration d’un principe inédit, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. C’est-à-dire, le droit pour chaque nationalité de choisir sa structure de gouvernance, y compris l’établissement d’un Etat par l’indépendance. Le 11 novembre 1919, les pouvoirs politiques, autrefois panaches des empereurs allemand, autrichien et russe, sont confiés à Józef Piłsudski, ce militaire polonais devenant de fait le fondateur de la deuxième République de Pologne. La République choisit sans hésitation le drapeau blanc et rouge comme étendard et l’aigle blanc couronné sur fond rouge comme armoiries.

Le drapeau restera tel quel jusqu’à l’effondrement de la deuxième république, la raison : un énième partage. En 1939, la Seconde Guerre mondiale est déclenchée par l’Allemagne nazie, qui en septembre envahit la partie occidentale de la Pologne, laissant les territoires orientaux à l’Union soviétique par le pacte Molotov-Ribbentrop. La Pologne est encore une fois rayée de la carte. Tout symbole national est alors interdit, que cela soit la langue, les armoiries, le drapeau ou toute utilisation nationale des couleurs blanche et rouge. L’occupation nazie va durer jusqu’en 1945 lorsque l’URSS libère les territoires polonais. Toutefois, alors que nombre de peuples d’Europe centrale pensent pouvoir disposer librement de leur nation libérée, les stalinistes imposent un rideau de fer à l’Europe par la mise en place de régimes satellites dans les territoires « libérés ». Une nouvelle occupation débute, cette fois-ci soviétique.

Pendant la période communiste, de 1945 à 1989, la République populaire de Pologne conserve son drapeau. Fait rare pour le Bloc de l’Est, aucun élément indiquant la nature du régime n’est ajouté au drapeau ou aux armoiries. Alors que la Bulgarie, la Roumanie et la Yougoslavie possèdent tous trois une étoile rouge sur leur bannière, la Hongrie et la République tchèque, quant à eux, se voient imposer l’étoile socialiste seulement sur leur blason. En ce qui concerne la Pologne, le seul changement à constater est la disparition de la couronne d’or sur l’aigle héraldique.

L’aigle retrouve sa couronne en 1989. A cette même date, la Pologne retrouve son indépendance et sort de la dictature sous la pression conjointe des syndicats- notamment le célèbre syndicat des chantiers navals de Gdansk, Solidarnosc- et de l’Eglise catholique. En 2004, la Pologne souveraine et démocratique rejoint l’Union européenne avec un drapeau et des armoiries identiques à ceux de l’éphémère Seconde République de Pologne (1919-1939).

Le drapeau polonais, symbole de l’identité nationale de la Pologne et de son peuple, n’a donc jamais été contesté de l’intérieur. Les changements, marginaux, qu’il a subies ne sont venus que de l’intervention de puissances étrangères occupantes. Obchodzimy Święto Narodowe Polski ! [1]

Notes

[1Bonne fête nationale de la Pologne !

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