Le Prix Nobel de Médecine et les objectifs de Lisbonne

, par Paul Janiaud

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Le Prix Nobel de Médecine et les objectifs de Lisbonne

Le prix Nobel de Médecine vient de reconnaître l’apport important de trois chercheurs européens, deux français et un allemand.

C’est évidemment la reconnaissance de travaux scientifiques importants qui des années après la découverte initiale ont apporté, apportent et apporteront à l’humanité selon les vœux d’Arthur Nobel « des bienfaits à l’humanité entière ». Nobel avait dans un esprit européen avant la lettre indiqué que le prix devrait reconnaître des scientifiques non obligatoirement suédois dont les recherches peuvent avoir des conséquences pour le monde entier.

Soulignons d’abord que ce prix consacre deux scientifiques français l’une Françoise Barré-Sinoussi (directrice de recherche à l’Inserm) et Luc Montagnier (directeur de recherche CNRS), tout deux professeurs à l’Institut Pasteur et toute une équipe de chercheurs, enseignants chercheurs et cliniciens, et un scientifique allemand le professeur Harald Zur Hausen, directeur à l’époque des travaux du centre allemand de recherche sur le cancer (DKFZ) à Heidelberg et directeur d’une équipe de chercheurs se consacrant à la recherche sur les causes virales probables des cancers. Outre que ce prix met en lumière des travaux présentant la continuité nécessaire pour des questions complexes, difficiles nécessitant l’infrastructure lourde d’instituts de recherche importants, il illustre pleinement l’ardente obligation de développer les coopérations internationales nécessaires, et en l’occurrence des coopérations fortes en Europe.

ce Prix illustre l’obligation de développer les coopérations internationales et des coopérations fortes en Europe

En fait cette mise en lumière d’équipes illustre aussi l’importance considérable des coopérations de recherche permises par les programmes de recherche organisés par les programmes de recherche développement européen. En effet l’Institut Pasteur et le Centre allemand de recherche sur le cancer sont des contributeurs importants des programmes européens. En outre, le DKFZ a été un initiateur de nouvelles formes de coopération puisqu’il a créé deux unités mixtes, l’une avec l’Inserm à Heidelberg, et l’autre avec le CNRS à Lille.

L’orientation même des travaux qui ont été couronnés par le Nobel correspond pleinement aux objectifs de l’actuel programme cadre de recherche développement lui-même instrument des objectifs de Lisbonne : faciliter la recherche pour que lorsque c’est possible ses résultats suffisamment stabilisés puissent être mis au service des besoins de la société, en l’occurrence la santé, et si possible permettre des développements pouvant aboutir à créer ou maintenir des emplois. Ce prix Nobel récompense donc aussi les priorités de la Commission européenne vers les maladies graves, les maladies liées à la pauvreté (le Sida frappe actuellement essentiellement des pays en voie de développement).

Quelles réflexions peut-on proposer pour le futur proche ?

D’abord nous réjouir de constater les nombreuses coopérations existantes (des équipes de l’Institut Pasteur travaillent aussi sur les papillomas virus et les échanges sont nombreux en Europe, le Pr. Zur Hausen et de nombreux scientifiques du DKFZ sont des collègues appréciés des scientifiques français). Mais les moyens nécessaires manquent cruellement. Par des limitations dont les problèmes actuels concernant les questions financières montrent que l’insuffisance d’Europe, et les retards dans sa construction plus rapide créent des situations graves, le budget consacré par chaque État membre ne représente qu’environ 1% de son PIB.

les moyens nécessaires manquent cruellement

Le budget total annuel du programme cadre européen de recherche développement pour la priorité santé se monte pour les 27 Etats membres et les dix pays associés à environ 650 Millions d’euros. Ceci ne représente d’ailleurs qu’environ 5% de la somme des budgets consacrés dans les 27 états membres pour la recherche développement (publique et privée). Une augmentation des moyens est impérative, une augmentation des possibilités de coopération en Europe est nécessaire, une augmentation du nombre de chercheurs est urgente. Ceci fait partie des objectifs de Lisbonne qui visent à atteindre les 3% du PIB consacrés à la recherche développement.

Au delà de l’étape atteinte par les travaux réalisés sur les virus liés au cancer du col utérin permettant une approche vaccinale qu’il faudra étendre à plusieurs des sous types de virus du papillome humain découverts au DKFZ et à Pasteur, les connaissances actuelles ne permettent toujours pas de prévoir à court terme l’arrivée d’un vaccin contre le Sida, malgré l’accumulation de connaissances, de travaux mondiaux, français aussi. La DG Recherche consacre une part importante du budget aux trois grandes maladies tueuses de l’humanité le sida, la tuberculose, le paludisme. Mais il est évident qu’il faut faire plus, qu’il faut mobiliser davantage de compétences, de moyens, de concepts.

Les objectifs de Lisbonne signés par les Etats membres ne pourront être atteints sans un effort de volonté politique et de cohérence au long cours des gouvernements et des peuples européens. Se réjouir de ces succès présents c’est bien, mais affronter les défis du présent et de l’avenir serait encore mieux en créant le mouvement puissant de l’Europe vers des réalisations indispensables.

Illustration : photographie issue du site de la Commission européenne.

Le Taurillon remercie les Brèves Européennes du Mouvement Européen 77 de nous avoir autorisé à reproduire cette tribune.

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