Prix Louise Weiss 2009 : promouvoir les journalistes qui parlent d’Europe

Interview de la président du jury : Véronique Augier, journaliste à France 3

, par Fabien Cazenave

Prix Louise Weiss 2009 : promouvoir les journalistes qui parlent d'Europe

L’Association des Journalistes Européens (AJE) remet le prix Louise Weiss 2009 ce mercredi 4 mars 2009 par le nouveau Ministre des Affaires européennes, M. Bruno Le Maire et par Véronique Auger (France 3), présidente du jury, en présence de M. Jean Leclant, président de la Fondation Louise Weiss et M. Peter Kramer, secrétaire général International de l’AEJ.

Le Taurillon : L’Association des Journalistes Européens remet le prix Louise Weiss à trois lauréats. Que récompense-t-il ?

Véronique Auger : L’objectif est de promouvoir les journaliste qui parlent d’Europe. En France, c’est le parent-pauvre du journalisme. Nous voulons valoriser des reportages originaux et un décryptage de l’actualité européenne. Beaucoup de postulants ont écrit des articles très bien faits sur le traité de Lisbonne. Nous avons dû les mettre de côté car il s’agissait d’une actualité incontournable, et donc pas d’un travail de pionnier.

Le Taurillon : Qui sont les lauréats et pourquoi reçoivent-ils ce prix ?

Véronique Auger : Les lauréats ont bien mis le doigt sur l’actualité européenne de cette année avec l’immigration et l’énergie. Il ont su être très originaux par rapport à ce qu’on a pu lire par ailleurs.

Mathilde Auvillain (Deutsche Welle) a été récompensée pour son reportage audio sur l’Orchestra di Piazza Vittorio. On entend souvant qu’en Italie, il y a du racisme. Elle nous a proposé un reportage qui montre au travers de la culture qu’il y a un mariage possible entre l’Italie, l’Europe et l’Afrique.

Véronique Leblanc a été désignée co-lauréate ppur son article "Strasbourg, une porte vers l’ouest" (paru dans La Libre Belgique). Ce reportage raconte le quotidien des demandeurs d’asile tchétchènes à Strasbourg. Elle fait découvrir des choses que même ceux qui ont suivi ce sujet cette année n’ont pas forcément vues.

Enfin, dans la catégorie espoirs : c’est Sébastien Daycard Heid avec son article « L’Angleterre retourne au charbon » (paru dans Le Figaro Magazine). Il avait fait deux très originaux. A l’intérieur de celui-ci, il a su bien mettre en exergue les problématiques de la pénurie énergétique, de l’effet de serre, de l’emploi…

Le Taurillon : Un ancien lauréat - Jean Quatremer - est devenu président de l’AJE... Les bons journalistes sur l’Europe existent, mais la place réservée au sujet est souvent des plus réduites dans les médias. Pourquoi ?

Véronique Auger : C’est quand même un peu en train de changer. Quand on regarde la pagination de la presse écrite, il y a de plus en plus d’articles sur les pays européens, avec des comparatifs ou de l’institutionnel. De même à la télévision. Mais il est vrai qu’il n’y en a pas encore à la hauteur de ce que représente théoriquement l’Europe dans la vie des gens.

Je comparerais ça à la situation de la presse économique d’il y a 20 ans. On n’avait pas d’information économique à la télévision ou dans la presse écrite. Parce que les Français ne sont pas suffisamment éduqués sur l’économie ou sur l’Europe. Ils ne sont donc pas capables de saisir de façon facile les informations diffusées sur ces sujets. Aujourd’hui, tout le monde sait ce qu’est un taux de croissance ou l’indice des prix. Tout le monde en parle. Il y a vingt ans personne ne le savait. Et aujourd’hui encore, on raconte parfois n’importe quoi sur l’économie. C’est pareil pour l’Europe.

L’Europe n’est pas encore assez dans les programmes scolaires, donc il leur manque les mots. Les gens ne savent pas par exemple ce qu’est une directive ou la différence entre le Conseil, la Commission et le Parlement. Pourtant ils sont avides de ça. Quand on a fait des débats sur le référendum de 2005 ou l’entrée des pays de l’Est en 2004 dans l’Union européenne, les émissions ont beaucoup été regardées et les forums de discussion avaient des débats très forts.

Enfin, il y a la part des dirigeants des médias. Ils savent peu comment ça se passe ailleurs. Donc ils ne voient pas l’utilité et transposent leur incompréhension sur ce que ressent le citoyen. Je ne suis pas d’accord avec cette analyse.

Le Taurillon : Ne manque-t-il pas un véritable espace public européen ?

Véronique Auger : C’est un peu une tarte à la crème. Il existe un espace public aux Etats-Unis : quand un Texan boit du café d’une grande marque, c’est le même goût que celui du New-Yorkais. En Europe, il y a 27 goûts différents pour le même produit. On a des éléments en commun mais on ne se ressemble pas.

Le traitement des sujets à la télé est aussi différent suivants les pays. Il y a des sujets communs, mais pas encore tous semblables. On a des ressentis différents même sur des sujets où nous avons une communauté d’analyse, comme lors de l’affaire des caricatures de Mahomet. Autre exemple, en France, on n’imaginerait pas avoir un roi car il est le symbole de la tyrannie. Mais l’Angleterre et l’Espagne sont pourtant des démocraties. Il y a donc des traditions totalement différentes. Pourtant, nous avons une histoire en commun, même si nous nous y affrontions beaucoup. On a les mêmes valeurs mais pas forcément la même manière de les exprimer.

Notre espace public européen est à créer. Les élections européennes sont très importantes car nous allons voter au même moment sur les mêmes questions.

L’AJE est la section française de l’AEJ (Association of european journalists). L’AEJ est née en 1961 et rassemble des professionnels des media, répartis dans toute l’Europe, convaincus de la nécessité de l’intégration européenne sur une base démocratique. A ce jour (juin 2008), on compte 23 sections nationales de l’AEJ (liste complète).

Avec plus d’un millier de membres, l’AEJ peut être considérée comme le plus grand club de journalistes d’Europe. Elle est reconnue par le Conseil de l’Europe et par l’Unesco, et a le statut d’observateur auprès du Conseil de l’Europe.

La raison d’être de l’AEJ est de sensibiliser les journalistes, les étudiants en journalisme, aux questions européennes. Nous fournissons des invités de qualité, des pistes de réflexion, des clés de décryptage à ceux qui informent sur l’Europe. L’AEJ est aussi engagée dans le combat pour la liberté de la presse en Europe, et a publié le rapport "Goodbye to media freedom ?".

Le bureau de la section française est dirigé par :
 Jean Quatremer, président, journaliste à Libération ,auteur du blog « Les coulisses de Bruxelles »
 Fabrice Pozzoli-Montenay, secrétaire général, correspondant de OTR Global
 Régis Verley, trésorier, journaliste indépendant spécialisé dans les questions sociales (précédent président)

La section française (AJE France) développe de nombreuses activités : séminaires européens dans les écoles de journalisme, prix Louise Weiss du journalisme européen, rencontres-débats à la Maison de la Radio (centre d’accueil de la presse étrangère), partenariats avec des événements européens, cafés européens dans des endroits accueillants et conviviaux.

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